Problèmes médicaux: dispositions pratiques pour en faciliter le règlement (III)
En octobre 1982 le supplément du Ministère du Royaume faisait connaître les dispositions nouvelles prises par la Société pour aider les proclamateurs à régler les problèmes relatifs au refus de transfusion sanguine.
À l’origine, il s’agissait de dispositions expérimentales, et celles-ci se sont avérées à l’usage appropriées et pratiques. Des résultats très positifs ont été obtenus dans les rapports avec le corps médical qui a fait preuve, dans certaines circonstances, d’une plus grande compréhension à l’égard des Témoins de Jéhovah.
Le présent supplément a pour objet de préciser et de compléter les informations contenues dans les deux premiers suppléments d’octobre 1982 et de septembre 1983, auxquels nous vous conseillons de vous référer pour avoir une idée complète du sujet.
L’ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DES COMITÉS D’AFFAIRES MÉDICALES (CAM)
Au départ, seize CAM ont été créés à travers le pays et regroupés à l’intérieur de sept grandes régions, chaque comité étant constitué de trois anciens qui, nous le rappelons, ne sont ni médecins ni juristes. D’autres CAM ont été constitués par la suite afin de faire face aux besoins nouveaux, notamment dans les principales villes dotées de centres hospitaliers. À l’heure actuelle certains CAM sont composés de plus de trois membres; il en existe 28 regroupés à l’intérieur de cinq régions, elles-mêmes dotées d’un responsable régional. En fonction des besoins, d’autres CAM seront éventuellement créés à l’avenir.
À la suite des informations recueillies dans toutes les congrégations, les CAM disposeront prochainement d’un nouveau fichier qui sera mis à jour et qui contiendra des renseignements sur les médecins et les chirurgiens connus pour leur respect de nos convictions.
Le rôle des CAM, dont l’action s’exerce sur une zone géographique déterminée, est d’aider les proclamateurs à faire face aux problèmes médicaux et juridiques qui impliquent leur foi et leur conscience. Ils sont composés d’anciens dont la mission consiste à:
1) Assurer une œuvre pastorale visant à soutenir et à réconforter les malades et leur famille affligée par l’épreuve de la maladie. Bien entendu, dans chaque congrégation les anciens devraient être en mesure d’apporter une telle aide. Il serait également souhaitable, dans les cas les plus graves, qu’ils prennent contact avec le CAM dont ils dépendent pour l’entretenir de la condition spirituelle du futur opéré. En effet, certains chrétiens faibles n’ont pas laissé un bon témoignage lors de leur passage en milieu hospitalier. Si les anciens locaux prennent soin de prévenir le CAM, celui-ci pourra veiller tout particulièrement à apporter une aide bienveillante, mais vigilante, à ces chrétiens faibles (voir w 15/4/85, pp. 12-15).
2) Donner les informations et les conseils en fonction des cas à traiter à l’aide du fichier et de l’ensemble des publications de la Société qui ont abordé la question du sang.
Nous rappelons que le CAM se contente de transmettre des informations neutres en réponse aux demandes qui lui sont faites sur la base des derniers éléments connus pour un praticien donné. Chaque malade est libre de disposer de ces informations comme il l’entend. Ni le CAM ni la Société ne se portent garants des informations données (w 1/10/75, p. 607; w 15/9/82, p. 22, § 5; p. 24, §§ 3-6).
Par ailleurs, les informations du fichier médical ne devraient pas faire perdre de vue la nécessité pour chaque malade de faire connaître sa position suffisamment à l’avance afin d’obtenir l’accord du chirurgien et de l’équipe d’anesthésistes. Le malade a le devoir moral de poser d’emblée la question du sang et d’exprimer clairement ses convictions (voir le supplément d’octobre 1982, § 6). Nous rappelons que c’est le malade qui exprime sa conviction et défend sa foi. Ce n’est pas son conjoint ni sa famille, et encore moins le CAM. Un contrat moral de confiance existe entre le malade et son médecin.
3) Assurer la relation avec les frères médecins et juristes dans les situations difficiles.
Chaque comité dispose en effet des noms et adresses de ces frères. Veillez dans la mesure du possible à créer et à maintenir des relations de confiance avec les chirurgiens et le personnel paramédical des établissements de la région. D’excellents résultats ont ainsi été obtenus dans certaines villes où les membres du CAM sont parvenus à nouer des relations quasi amicales avec des chirurgiens et des anesthésistes. De tels rapports favorisent grandement le déroulement des interventions chirurgicales sans transfusion sanguine.
4) Assurer le suivi des interventions qui se sont déroulées dans leur territoire et la mise à jour du fichier à partir des informations recueillies auprès des proclamateurs ayant subi une opération.
5) Pourvoir éventuellement à l’hébergement des accompagnateurs des malades et les aider pour effectuer certaines démarches administratives urgentes.
Dans le but de favoriser une application harmonieuse de ces dispositions, la Société a demandé à chaque collège d’anciens des congrégations de désigner l’un de ses membres comme correspondant aux affaires médicales. Ce frère assurera la liaison entre les membres de sa congrégation et le CAM local. Si besoin est, il pourra s’entretenir avec ceux qui doivent subir une intervention chirurgicale, ce qui contribuera à leur affermissement spirituel (I Thess. 2:7, 8, 11, 12). Son aide sera également très appréciée pour régler les questions qui trouvent leur réponse dans les publications de la Société. Il ne manquera pas de stimuler l’amour chrétien des membres de la congrégation en organisant les visites du malade après son opération.
LE RÔLE DE L’ASSOCIATION DES MÉDECINS ET JURISTES TÉMOINS DE JÉHOVAH (AMS)
L’Association Médico-Scientifique d’information et d’assistance du malade (AMS) régie par la loi du 1er juillet 1901, différente des associations créées par la Société, a vu le jour en 1981. Ses objectifs sont les suivants:
1) Informer les membres du corps médical et juridique du pays afin de développer des relations de confiance en vue d’aboutir à une meilleure coopération dans le traitement des malades Témoins de Jéhovah.
2) Aider les proclamateurs dans l’épreuve par des conseils et des interventions ponctuels sur le terrain.
Pour cela l’AMS organise, regroupe, gère et coordonne, sous l’égide de la Société, les ressources humaines, techniques et matérielles dont elle a besoin. Ses membres sont en liaison permanente avec les comités d’affaires médicales et ils interviennent dans des cas difficiles auprès du corps médical ou judiciaire, afin de tenter de trouver une solution satisfaisante.
C’est ainsi que des opérations chirurgicales sans transfusion sanguine ont pu être pratiquées grâce à l’intervention opportune de frères médecins. Par leur persévérance, certains ont fini par convaincre des chirurgiens de relever le défi qui consiste à soigner les Témoins de Jéhovah.
Par exemple, dans une clinique de la région de Bordeaux, une opération délicate et particulièrement onéreuse a été réalisée par une équipe chirurgicale. Lorsque le médecin de l’AMS qui collabore habituellement avec cette équipe a reçu la facture, il s’est aperçu que les honoraires du chirurgien n’y figuraient pas. Pensant qu’il s’agissait d’une erreur, il a appelé ce dernier, lequel lui a répondu que c’était volontaire et qu’il faisait don de ses honoraires.
Dans un autre établissement, deux chirurgiens ont opéré ensemble un patient Témoin de Jéhovah, afin de limiter les pertes sanguines. L’opération ayant parfaitement réussi, ils se sont partagé les honoraires alors que, normalement, ayant opéré à deux, ils auraient pu prétendre à une double rémunération.
Ces faits, pris parmi d’autres, illustrent les bons résultats obtenus grâce au travail dévoué des médecins et des juristes de l’AMS pour faciliter les rapports avec le corps médical français.
L’AMS a également participé à des rencontres en milieu hospitalier. Tel fut le cas au Centre hospitalier universitaire de Strasbourg en novembre 1983, à l’occasion de la soutenance d’une thèse de médecine consacrée aux “problèmes posés en anesthésie-réanimation par le refus de transfusion sanguine chez les Témoins de Jéhovah”.
Une table ronde tenue dans l’amphithéâtre de la faculté de médecine a réuni bon nombre de praticiens de la ville. D’emblée un professeur, chef de service, a fixé les limites de la discussion en déclarant: “Les Témoins de Jéhovah fondent leur refus de transfusion sanguine sur des textes bibliques. Nous ne sommes pas là (...) pour les remettre en question. Le respect de leurs croyances est posé comme un postulat!” Les médecins et juristes de l’AMS ont pu ensuite répondre aux questions et raisonner avec l’auditoire, dissipant ainsi nombre de malentendus dans un climat de tolérance et de confiance exceptionnelles.
Cette réunion a été organisée avec le concours du CAM de Strasbourg, qui entretient les meilleures relations avec les médecins hospitaliers de cette ville. Des expériences similaires ont eu lieu dans d’autres villes de France.
C’est pourquoi la Société recommande vivement aux frères médecins et juristes d’organiser à leur échelon régional des rencontres avec les médecins et chirurgiens qui acceptent de soigner les Témoins de Jéhovah. L’expérience a montré que les bonnes relations, patiemment établies, facilitaient par la suite le règlement des problèmes médicaux. Une telle rencontre a eu lieu début novembre à Nice.
En ce qui concerne le fichier médical mis à la disposition des comités d’affaires médicales et des membres de l’AMS, il a été refondu et réactualisé par la Société, avec le concours des congrégations, des frères médecins et des membres des comités corps d’affaires médicales. Nous insistons sur l’importance d’une mise à jour régulière de ce fichier. Chaque proclamateur ayant subi une intervention sans transfusion sanguine devrait informer son comité d’affaires médicales ou le correspondant de sa congrégation des conditions dans lesquelles s’est faite l’intervention. Ces renseignements seront ensuite communiqués à la Société. Prochainement le fichier médical sera informatisé, afin de rendre les mises à jour plus faciles et plus fiables.
Nous avons pensé que ces informations relatives à l’association des frères médecins et juristes vous intéresseraient. Toutefois, nous précisons bien qu’il s’agit d’une disposition qui a pour but d’améliorer nos relations avec le corps médical en général. Il ne conviendrait donc pas de faire état de l’existence de cette association comme d’une menace contre des praticiens qui refuseraient de respecter nos convictions religieuses.
LE RÔLE DE CHACUN
Les deux premiers suppléments contenaient de nombreuses informations auxquelles il convient de se reporter, notamment sur la nécessité d’une prise de position ferme, sur la façon d’aborder la question du sang avec un chirurgien, etc.
Il a été rapporté que certains médecins sont d’un contact difficile, car invariablement ils reviennent à la charge pour inciter le malade à accepter une transfusion sanguine. En fait, les malades doivent s’attendre à soutenir une telle discussion, parce que le médecin a le devoir de se persuader de la profondeur des convictions et de la détermination de son patient. C’est donc une excellente occasion pour le malade de donner un témoignage complet de ses convictions religieuses relatives à la question du sang et d’expliquer au chirurgien quel est le fondement biblique qui détermine sa prise de position. Lors de cet entretien, il sera approprié de remettre au chirurgien la brochure Les Témoins de Jéhovah et la question du sang et de lui laisser le dépliant La transfusion sanguine — pourquoi les Témoins de Jéhovah refusent-ils cette thérapeutique? Il sera ainsi possible dans certains cas de gagner le respect de nos détracteurs. Cette façon de procéder a permis à des proclamateurs de commencer des études bibliques avec des membres du personnel hospitalier.
Une question nous est fréquemment posée: Quelle est la valeur juridique de la décharge de responsabilité? Ce document est essentiel. Il importe donc que chaque malade établisse une décharge avant toute intervention, même si le chirurgien ou l’anesthésiste estime qu’elle n’est pas nécessaire. En effet, de nombreuses interventions sont simples, mais il ne faut pas oublier que des complications inattendues peuvent se présenter. La décharge (ou attestation de décharge) devrait être rédigée en termes clairs et précis. À ce propos, voyez les brochures Le sang, la médecine et la loi de Dieu, pages 50 et 51, et Les Témoins de Jéhovah et la question du sang, pages 29 et 30.
Certains établissements hospitaliers en France font signer une décharge intitulée “Refus de consentement à la transfusion sanguine”. Cette décharge est libellée de la façon suivante: ‘Je, soussigné... refuse que du sang ou des dérivés du sang me soient administrés pendant mon séjour dans le service de... du centre hospitalier de.... Je maintiens cette décision même si le médecin responsable des soins qui sont donnés, ou d’autres médecins travaillant avec lui, estime que l’utilisation de sang ou de ses dérivés est le seul moyen de sauver ma vie, ou d’éviter des conséquences graves et définitives pour ma santé.
‘Je dégage donc de toute responsabilité pour les conséquences qui pourraient résulter de ce refus, l’hôpital et l’ensemble de son personnel.’ Ce document est signé par l’intéressé après qu’il a indiqué la mention “lu et approuvé”, et il est contresigné par les témoins et le chef de service de l’hôpital.
Les juristes de l’AMS proposent le modèle suivant en guise d’attestation de refus: ‘Je soussigné..., patient du docteur..., admis le... (date, clinique et service) pour... (préciser l’acte chirurgical),
‘Dûment informé de la nature exacte de cette intervention chirurgicale, accepte de la subir à condition qu’il ne me soit administré ni sang ni dérivés du sang, comme convenu lors de notre entretien du... avec le docteur... et le docteur... (nom de l’anesthésiste) dont ce document reprend expressément les termes de notre accord.
‘En cas d’urgence, et (ou) d’inconscience, il est bien entendu que seuls des remplaçants non sanguins du volume plasmatique ne violant pas mes convictions religieuses de Témoin de Jéhovah pourront être utilisés sur ma personne.
‘Éclairé sur les conséquences et les risques d’une telle décision pour ma santé et ma vie, je déclare renoncer à toute action en responsabilité ayant pour but de réparer un éventuel préjudice directement lié à mon refus.
‘Fait en double exemplaire à..., le... (signature)’
Quelle est la valeur juridique de telles décharges? (Voir g 8/9/85, p. 11.)
Elle est la traduction du contrat qui lie le médecin à son malade. La Cour de cassation, dans son arrêt de principe du 20 mai 1936, a précisé que cette relation contractuelle comportait
pour le malade:
la liberté de choisir librement son médecin, la nécessité d’adhérer, de consentir à l’acte médical;
pour le médecin:
une obligation de moyen, c’est-à-dire de prodiguer des soins conscients et attentifs, conformes aux données acquises (on dirait aujourd’hui actuelles) de la science et non une obligation de résultat, c’est-à-dire guérir.
Bien entendu, il ne faut jamais sous-estimer les diverses contraintes qui pèsent sur le chirurgien et qui, parfois, dictent ou expliquent ses réactions. Le médecin possède également une conscience qui l’incite à employer tous les moyens dont il dispose pour aider le malade. Il en résulte un conflit entre la conscience du médecin et celle du malade. Toutefois, même dans ces moments de forte pression, le chrétien gardera une attitude polie (Phil. 4:5; Gal. 5.22, 23).
La décharge n’est donc pas une exonération de responsabilité du médecin.
Elle ne l’exonère pas pour ses fautes d’imprudence ou pour la violation de ses obligations définies ci-dessus. En revanche, elle matérialise, d’une part, le consentement du malade au traitement proposé, et, d’autre part, le refus circonstancié d’une thérapeutique spécifique. En conséquence, le malade accepte de supporter les risques pouvant découler de sa prise de position.
Elle rend impossible toute poursuite du médecin sur le fondement de l’article 63 — alinéa 2 du code pénal, visant la non-assistance à personne en danger (Cour de cassation, 3 janvier 1973).
Elle interdit enfin au patient de demander réparation du dommage qui a pu résulter pour lui de son refus de transfusion.
En ce qui concerne le délicat problème des enfants mineurs, les parents chrétiens reconnaissent que l’État en général, et les membres du corps hospitalier en particulier, s’intéressent au bien-être des enfants et qu’ils désirent les protéger des mauvais traitements ou des négligences préjudiciables.
Les parents Témoins de Jéhovah sont loin de négliger leurs enfants. Ils ne veulent que leur bien.
C’est pourquoi ils cherchent les médecins les plus compétents et les meilleures thérapeutiques, sous réserve toutefois que celles-ci ne s’opposent pas à leurs profondes convictions religieuses.
Les rapports émanant de chirurgiens renommés établissent qu’il est possible de soigner les enfants de Témoins de Jéhovah et de respecter en même temps les convictions de leurs parents.
Un professeur, éminent chirurgien français, spécialisé en chirurgie cardiaque, écrivait en réponse à la lettre de remerciement d’une sœur: “Nous sommes heureux du résultat obtenu chez votre enfant, comme nous l’avons souvent obtenu chez d’autres malades du cœur opérés sans transfusion sanguine. Ce que nous espérons, c’est que cette information arrive à franchir les ‘barrières’ grâce à la publicité que vous lui donnerez auprès des médecins qui restent trop souvent aveugles.”
Nous savons que tant que ce système durera il sera nécessaire pour les serviteurs de Jéhovah d’avoir recours à la médecine ou de se faire soigner en milieu hospitalier.
Toutefois, nous devons être circonspects au sujet des promesses d’une meilleure santé ou de prétentions déraisonnables dans ce domaine. Il est tout naturel de vouloir jouir de la meilleure santé possible. Mais nous devons être équilibrés sur ces questions, comme le déclare la Parole de Dieu. — Mat. 6:27; Job 14:1, 2; voir également w 15/9/82, pp. 22-29.
C’est seulement dans le nouvel ordre de choses que nous pourrons retrouver une santé parfaite. Bien qu’il soit naturel que nous recherchions à être soulagés de nos difficultés dans toute la mesure du possible, nous ne voulons pas nous préoccuper de ces choses à l’excès, comme par convoitise.
En revanche, nous devrions être déterminés à faire le maximum pour que nos convictions relatives à la question du sang soient respectées par le corps médical, rendant ainsi un excellent témoignage à la bonne nouvelle.
Nous espérons que l’ensemble des dispositions ci-dessus vous y aideront et permettront par la même occasion aux médecins et aux chirurgiens qui se dévouent pour soigner les Témoins de Jéhovah de comprendre que ceux-ci ne sont pas des fanatiques, mais des chrétiens désireux de plaire à Dieu.