Une construction qui en dit long

“On savait que les Témoins de Jéhovah construisent des églises en quarante-huit heures. Mais ce week-end, ils se sont surpassés. Pour la première fois, ils ont construit deux églises Salles du Royaume et un appartement qui les relie en quarante-huit heures.”

ANNETTE Lopez-Munoz, une journaliste du South Dade News Leader, a débuté son article avec les propos reproduits ci-dessus. Elle faisait allusion au week-end qui venait de s’écouler, les 25 et 26 février 1984.

Les congrégations des Témoins de Jéhovah de la région d’Homestead, en Floride, se sont multipliées si rapidement qu’un programme de construction s’avérait urgent. Jim Crosley, un surveillant itinérant du sud de la Floride, a dit à cette journaliste: “Un élan nouveau a poussé à la construction de ces Salles du Royaume: l’arrivée de nos frères cubains sur des bateaux de réfugiés. À Miami, il nous faut construire cinq ou six autres Salles du Royaume.”

Les salles jumelles construites dans la région d’Homestead sont utilisées par quatre congrégations: deux de langue espagnole et deux de langue anglaise.

Le journal Miami News a rapporté les propos d’un autre Témoin qui a expliqué les raisons de la construction ‘instantanée’ de ces Salles du Royaume: “Notre philosophie est de les construire le plus rapidement possible, afin de pouvoir nous consacrer ensuite à des choses plus importantes.”

Les choses “plus importantes” se rapportent aux activités d’évangélisation, à la prédication et à l’enseignement public concernant le Royaume de Dieu, sans oublier la tâche qui consiste à faire des disciples, à les baptiser et à les former pour qu’ils ‘servent le Dieu vivant par un service sacré’. — Hébreux 9:14; Matthieu 24:14; 28:19, 20.

Une pareille démarche nécessite des centres d’enseignement, plus précisément des lieux d’enseignement biblique, des Salles du Royaume. Ces salles, poursuivait le Miami News, sont construites d’une manière rationnelle. “Elles ne contiennent pas d’ornements parce qu’elles ont pour fonction de servir d’écoles ou de centres d’enseignement. Ce sont des lieux de culte, mais les services religieux qui s’y déroulent sont essentiellement éducatifs.” Chaque salle a une surface de 370 mètres carrés, comporte 250 sièges, deux salles de classe annexes, un salon, une pièce pour se procurer des écrits bibliques et des toilettes.

Deux salles construites en quarante-huit heures?

Béatrice Rogers, un Témoin de Jéhovah de Homestead, possédait un champ d’avocatiers de deux hectares. Ce terrain était bien situé pour les quatre congrégations. Au bout d’un an de délibérations, il fut décidé de construire côte à côte deux Salles du Royaume.

Au cours des deux années précédentes, les Témoins de Jéhovah des États-Unis et du Canada ont construit en moyenne chaque semaine une Salle du Royaume en se servant de la méthode de construction dite instantanée. Mais que dire de la construction de deux salles sur un même terrain? Les expériences précédentes laissaient-​elles présager qu’une telle chose serait possible? Parviendrait-​on à réunir un nombre suffisant de volontaires? Si la direction de 200 à 400 travailleurs sur un seul projet constituait un défi, qu’adviendrait-​il si entre 400 et 600 ouvriers étaient réunis? Avec autant de monde et de matériaux, l’entreprise n’allait-​elle pas se transformer en une gigantesque ‘pagaïe’?

Un avertissement donné par Jésus a fait l’objet de beaucoup de réflexion: “Qui d’entre vous, s’il veut bâtir une tour, ne s’assoit pas d’abord pour calculer la dépense et voir s’il a de quoi la terminer? Sinon, il pourrait en poser les fondements mais se trouver incapable de l’achever, et tous les spectateurs commenceraient à se moquer de lui, en disant: ‘Cet homme a commencé à bâtir mais a été incapable d’achever.’” — Luc 14:28-30.

Toutefois, après des mois de discussions (calcul du coût du projet et études des méthodes de construction), les Témoins de Jéhovah de Homestead sont parvenus à une décision après avoir prié Dieu: “Avec la bénédiction de Jéhovah, nous pourrons y arriver!”

Vendredi soir, 24 février. Nelson Crites, l’un des coordinateurs du programme de construction des Salles du Royaume du sud de la Floride, anime une réunion qui rassemble plus de 700 volontaires enthousiastes dans un auditorium de South Dade. À un moment donné il prononce ces paroles: “C’est un événement historique. Il sera couronné de succès grâce à la puissance de Jéhovah.”

Les volontaires sont répartis en onze équipes placées sous la direction de professionnels du bâtiment. Nombre d’entre eux ont déjà participé à la construction de Salles du Royaume en deux jours. Mais cette fois-​ci, les équipes ont toutes été doublées, une pour chaque salle, qu’il s’agisse des équipes de menuiserie, de plomberie, d’électricité, etc. En outre, toutes les informations nécessaires à la construction sont disponibles à la fois en espagnol et en anglais. En dehors de la location de deux grues assurant la pose des fermes des toits très tôt le samedi matin, la totalité du travail et des services est fournie bénévolement.

Des débuts sous la pluie

Samedi matin, six heures. Un solide petit déjeuner est servi à tous les travailleurs. Les matériaux de construction d’une valeur de deux millions de francs français attendent les équipes d’hommes, de femmes et d’enfants. Ces matériaux ont été déposés sur les semelles en béton des deux salles, aux endroits stratégiques où ils seront employés. Chaque semelle de béton de 370 mètres carrés est entourée d’une armature métallique conformément à la législation de cette région de Floride où les ouragans ne sont pas rares. À sept heures le travail va commencer afin de transformer ces monticules de matériaux bruts en deux Salles du Royaume.

À sept heures précises, le travail débute sous la pluie qui ne cesse de tomber depuis minuit. Pas une seconde il ne sera interrompu. Des tentes en plastique et des appentis ont été disposés pour faciliter le travail des électriciens et des autres corps de métiers. Les entrepreneurs et les artisans travaillent à partir de leurs camions et de leurs camionnettes. Des milliers de coffrets-repas, préparés à domicile et protégés par un film plastique sont déposés sur de longues tables dressées dans le champ d’avocatiers. À la cuisine, construite en plein champ, une armée de cuisiniers s’affairent autour de fours, de marmites et de bacs. La pluie est tout bonnement ignorée.

Plus forte est la pluie, plus vite les fermes du toit semblent être mises en place. En une heure et demie elles sont posées dans les deux salles. La pose des panneaux muraux suit le même rythme. À neuf heures les grutiers n’ont plus de travail. Tout autour des bâtiments, de nombreuses mains posent les panneaux muraux, et avant qu’une autre heure ne se soit écoulée, ce travail est virtuellement achevé dans les deux salles. À présent, la configuration des bâtiments se détache nettement au milieu des palmiers plantés un jour ou deux auparavant avec le concours de gros engins.

La noirceur des nuages ne fait qu’accélérer le rythme du travail. Au lieu d’assister à des départs sur le chantier, on voit un flot de travailleurs qui ne cessent d’arriver. Dans la rue, l’agent de police (une femme) explique que la seule chose qu’elle ait à faire est de se tenir à l’écart de la route. En effet, des volontaires règlent la circulation des véhicules autour des pâtés de maisons voisins, aux intersections des rues proches et devant le chantier. Un voisin a d’ailleurs prêté gratuitement un terrain de six hectares situé de l’autre côté de la rue pour servir de parking.

La pluie s’avère la bienvenue. Elle maintient l’humidité des mottes de gazon qui sont prêtes à être étalées. Les plantes et les arbustes sont mis en terre dans des parterres bien arrosés. De leur côté, les maçons utilisent l’eau pluviale pour conserver l’humidité de leur mortier.

Pendant ce temps, les murs continuent à être montés. Au rythme où une équipe pose les panneaux sur les chevrons, au même rythme une autre équipe dispose dessus du feutre bitumé. Sous le ciel gris, les silhouettes de centaines de travailleurs se profilent. Sur le sol des combles, des conduites d’air se tortillent, semblables à des vers géants. À l’extérieur, les travaux de lambrissage s’achèvent. On a monté sur les toits de lourds paquets de bardeaux que l’on a répartis. De loin, on croit voir sur les toits une mosaïque de bardeaux et de couvreurs.

Et la pluie dans tout cela? Elle s’en est allée sans avertir. Lorsqu’elle est de retour, les deux toits sont terminés.

Des volontaires toujours plus nombreux

Un appartement de quatre pièces est agencé. Il relie les deux Salles du Royaume. Vu du ciel, l’ensemble forme un H géant.

Qu’il pleuve ou qu’il vente, le service des volontaires, installé sous une tente en plastique, reste ouvert. On compte plus de travailleurs que nécessaire. Des volontaires sont venus de régions aussi lointaines que le Texas, l’Ohio, l’Idaho, la Grande-Bretagne, le Canada et la Jamaïque, sans citer les États voisins de la Floride et les différentes localités de cet État. Le total des demandes de volontaires s’élève à 810.

Dawn Brinklow, la paysagiste, a expliqué que ses volontaires ne connaissaient pas le nom des plantes et ne pouvaient distinguer un philodendron d’une malpighie. “Aussi nous les avons codées par couleur. Il suffisait d’envoyer quelqu’un chercher une ‘rouge’, une ‘bleue’ ou une ‘verte’. En outre, tous les termes devaient être disponibles dans les deux langues, car dans chaque équipe on comptait des Blancs, des Noirs et des Latino-Américains.”

L’unité, l’amour et l’esprit de Jéhovah

Un monsieur qui possédait une hypothèque sur ce terrain avait été invité le samedi à venir retirer son remboursement. Il fut tellement surpris de voir que deux bâtiments de 370 mètres carrés chacun avaient surgi au-dessus des semelles de béton qu’il avait vues la veille, qu’il se précipita chez lui pour amener sa femme sur le chantier.

Le service de presse accueillait et accompagnait les journalistes, les photographes, les cameramen de télévision ainsi qu’un flot continuel de visiteurs. Parmi eux, on a vu des entrepreneurs espérant découvrir comment ils pouvaient construire de la même manière que les Témoins de Jéhovah. De son côté, un enseignant d’une Église baptiste souhaitait insuffler à ses membres le même esprit qui anime les Témoins de Jéhovah. “Dans notre Église, a-​t-​il expliqué, je ne parviens pas à faire réparer une fuite sans devoir payer quelqu’un.”

Archie Francis de Hialeah a passé toute la journée du samedi au service de l’entretien. Ce soir-​là, sa tante arrivait du Belize, un pays d’Amérique centrale. Son neveu lui expliqua qu’il participait à la construction de deux Salles du Royaume au cours du week-end.

“Je ne te crois pas”, lui répondit-​elle.

“Je peux te montrer les films vidéo.”

“Non.” La tante ne croirait son neveu qu’en voyant le chantier de ses propres yeux.

À cause de son insistance, ils ont parcouru au milieu de la nuit les trente-cinq kilomètres qui les séparaient du chantier. Les plâtriers qui travaillaient toute la nuit étaient encouragés par un groupe de chrétiennes qui chantaient des cantiques en espagnol. La tante d’Archie les rejoignit. “Il se pourrait bien que je devienne Témoin de Jéhovah, a-​t-​elle confié. J’emploie des Témoins de Jéhovah dans mon affaire. Ils sont honnêtes, et je lis toujours leurs périodiques.”

Un autre parent d’Archie, stupéfait de ce qu’il voyait, a demandé: “Mais comment vous y arrivez?”

“Grâce à l’unité, à l’amour et à l’esprit de Jéhovah”, répondit Archie.

Warren Brundage, un policier de South Dade, fait des rondes dans le quartier chaud de la ville où les meurtres, la drogue et les bagarres raciales sont courantes. Sur le chantier, ce policier a vu la nature humaine sous un jour très différent. “Je pense tout simplement que c’est fantastique, a-​t-​il expliqué à un journaliste. Voir autant de gens travailler ensemble sans qu’il y ait de querelle ou de bagarre (...). Il y a des Noirs, des Blancs, des Latino-Américains (...); ils font différents métiers et pourtant ils travaillent tous pour une cause unique. Hier, il y avait même un banquier qui travaillait sur le toit.” Il est resté après cinq heures, ce qui n’est pas courant pour un banquier!

Au tout début du dimanche après-midi, à la demande d’un photographe, on fit passer une annonce en anglais et en espagnol pour que l’ensemble des travailleurs et des visiteurs se regroupe devant le chantier et qu’ils lèvent leurs bras en signe de victoire. On dénombra quatre mille personnes, cette estimation est basée sur le chiffre fourni par la cafétéria qui, peu de temps auparavant, venait de servir quatre mille repas.

Les tons et les couleurs du paradis

Les aménagements paysagers ont créé dans ce site une atmosphère de paradis. L’ondoiement des palmes, les pierres et les fleurs trahissent l’existence de deux jardins tropicaux, l’un situé devant les bâtiments, l’autre à l’arrière. Une noria de camions ont apporté les arbres et les arbustes. Un Témoin a fait don de palmiers. Le paysagiste responsable du choix des arbres avait remarqué un boqueteau de trois phœnix reclinata, des dattiers d’une essence rare. Leur propriétaire ignorait même leur existence. Le conducteur d’un chargeur les entoura de soins pour les déplacer, lorsqu’il apprit que chaque arbre valait l’équivalent de 10 000 francs français.

Les jardins d’une superficie de 6 000 mètres carrés ont été plantés en deux jours. Il aurait fallu trois semaines à six paysagistes pour exécuter ce travail d’une valeur de 250 000 à 300 000 francs français. En l’occurrence, tout fut fait bénévolement.

Une occasion exceptionnelle

La journaliste Lopez-Munoz est revenue le dimanche en compagnie de sa mère qui ne parle que le portugais. La jeune journaliste avait ressenti un climat qu’elle avait du mal à définir. “D’où provient donc l’énergie, la motivation de vos gens?” a-​t-​elle demandé.

“Elle vient de la Bible”, lui a-​t-​on répondu.

“J’ai lu dans la Bible la description de la construction d’une grande tour et la façon dont Dieu confondit les langues des bâtisseurs qui ne purent ainsi achever leur travail.”

“C’est parce qu’ils œuvraient contre la volonté de Dieu.”

“Alors, à présent, il vous aide à surmonter la barrière de la langue?”

“C’est parce que nous faisons sa volonté.”

Les Témoins de Jéhovah gardent présent à l’esprit que “la parole de Dieu est vivante et fait sentir son action”. (Hébreux 4:12.) Si vous réagissez positivement à sa Parole, vous vous ouvrez à l’action de son esprit.

“Ce que vous ressentez en partie, c’est le plaisir que nous retirons de ces réunions spéciales, telle la construction d’une Salle du Royaume, a ajouté un membre du service de presse. Le dynamisme des Témoins de Jéhovah provient essentiellement du fait que nous sommes une société d’évangélisation. Nous sommes unis dans la prédication et l’enseignement relatifs au Royaume de Dieu. C’est la raison pour laquelle nous avons besoin de Salles du Royaume qui sont des centres de culte et d’éducation biblique. Dans des occasions particulières comme aujourd’hui, nous sommes réunis pour un projet d’extension. Nous pouvons ainsi partager nos compétences et nos aptitudes professionnelles. Ou bien, nous pouvons simplement manifester de la bonne volonté en faisant tout notre possible pour aider autrui. Chacun fait de son mieux, et les efforts de tous sont appréciés. Mais même dans ces domaines, notre réunion est guidée par les principes bibliques. Ici, par exemple, nous sommes pleinement conscients de la teneur de Galates 5:26: ‘Ne devenons pas vaniteux, suscitant des rivalités entre nous, nous enviant les uns les autres.’ Nous nous souvenons également de Proverbes 11:14: ‘Quand il n’y a pas l’art de diriger, le peuple tombe.’”

Une allure de paradis spirituel

Leur foi, voilà ce qui permet aux Témoins de Jéhovah de réaliser des choses que d’autres estiment impossibles. Les Témoins commencent par se débarrasser de l’esprit du monde. Comme l’a reconnu très rapidement W. Brundage, un policier, cela demande de s’affranchir de tout ce qui caractérise l’esprit du monde: racisme, haine, jalousie, distinctions sociales, usage de la drogue, obsession sexuelle, etc. Ce policier se retrouvait dans un univers différent, où toute amertume mauvaise, toute colère, tout courroux, tout cri, tout propos outrageant, avaient été enlevés, et aussi toute malice, et où les participants s’efforçaient de ‘devenir bons les uns pour les autres, pleins d’une tendre compassion, se pardonnant volontiers les uns aux autres, comme Dieu aussi leur a pardonné volontiers par Christ’. — Éphésiens 4:31, 32.

L’esprit du monde qui se manifeste par “les œuvres de la chair” signifie inimitié contre Dieu. Lorsqu’on s’affranchit d’un tel esprit, on fait place au fruit de l’esprit de Dieu qui est “l’amour, la joie, la paix, la longanimité, la bienveillance, la bonté, la foi, la douceur, la maîtrise de soi”. — Galates 5:19-23; Romains 8:5-8.

L’un des visiteurs, un mormon, vit des enfants de Témoins, des enfants noirs, blancs et métis jouer ensemble. L’homme fit ce commentaire: “Nous avons adopté un enfant noir. Les membres de notre Église ne permettent pas à leurs enfants de jouer avec le nôtre.”

En adoptant l’enseignement de la Bible, les Témoins de Jéhovah connaissent l’unité dans un nombre de pays encore plus élevé que celui que comptent les Nations unies.

On a même dit que l’édification d’une Salle du Royaume en deux jours donnait “un avant-goût des constructions du paradis”. Ces paroles expriment la conviction qui habite les Témoins de Jéhovah: Dans un avenir proche, le Créateur balaiera tous les éléments qui saccagent la terre et ses habitants, pour laisser la place à l’édification d’un paradis à l’échelle planétaire. — Révélation 11:17, 18; 21:3, 4; Ésaïe 65:17-25.

[Illustration, page 14]

Les poses des panneaux muraux et des fermes du toit se sont faites simultanément. À neuf heures, la grue avait posé le dernier élément de la charpente.

[Illustration, page 17]

Mise en place de trois palmiers, une partie du décor paysager “instantané”.