Les femmes qui travaillent: Le jeu en vaut-il la chandelle?
“LORSQUE j’étais chez moi toute la journée, j’avais l’habitude de tenir mon intérieur si propre que j’en étais réduite à chercher des choses à faire dans la maison. J’étais si maniaque! Nous avions un tapis à poils longs dans le salon. Si quelqu’un marchait dessus, je le peignais aussitôt pour que les brins soient bien droits.” Cette femme qui occupe un emploi ajoute en riant: “Maintenant que je travaille, je ne suis plus comme ça!” Mais son mari n’a peut-être pas autant envie de rire. Avec une pointe de nostalgie, il fait remarquer: “En tout cas, quand les poils du tapis ‘sont bien droits’, c’est vraiment joli.”
Ce court dialogue illustre bien un point que le professeur William Michelson a fait ressortir dans l’étude approfondie qu’il a consacrée au travail des femmesa. Si la plupart d’entre elles arrivent à concilier leur travail profane et leurs tâches ménagères, elles doivent pour cela ‘en payer le prix et consentir des sacrifices’. Le couple dont il vient d’être question a appris cette leçon: Quand une femme travaille, il se peut tout bonnement qu’elle n’ait ni le temps ni l’énergie nécessaires de se consacrer à son intérieur comme lorsqu’elle était toute la journée à la maison. Et pour certains couples, c’est là un grand sacrifice.
De nombreuses femmes éprouvent sincèrement une profonde satisfaction à tenir leur maison propre et à préparer de bons repas pour leur famille. À bon droit, car la Bible fait l’éloge de l’“épouse capable” qui, avec assiduité, “surveille les faits et gestes de sa maisonnée”. (Proverbes 31:10, 27.) Une mère de famille a confié: “Quand je prépare un bon petit plat pour le dîner ou que je prends un peu plus de temps que d’habitude pour faire quelque chose pour ma famille, et que l’un de mes enfants âgé de 15 ans me dit: ‘Maman, tu t’es vraiment surpassée!’, c’est là une si merveilleuse récompense qu’elle vaut beaucoup plus que l’augmentation dont un employeur pourrait me gratifier. Ce que je ressens alors est formidable.” Par conséquent, si une femme doit se mettre à travailler, il se peut que sa famille et elle-même éprouvent un sentiment de perte.
D’autre part, le travail de la femme est parfois la cause de tensions conjugales. Les femmes s’irritent souvent de devoir faire injustement la majeure partie des tâches ménagères. De leur côté, il se peut que certains maris ne supportent pas qu’on leur demande leur aide. Certains même se plaignent, comme ce mari qui a dit: “Je me sens très souvent délaissé. Quand elle rentre à la maison, elle est fatiguée et de mauvaise humeur. Elle est toujours prise avec les enfants. Nous ne faisons pas assez de choses en commun. Bien sûr, je comprends qu’elle doit s’occuper de tout cela, mais je n’en suis pas plus heureux pour autant.” La fatigue due au travail peut même ôter tout plaisir aux rapports conjugaux. — I Corinthiens 7:3-5.
Un mari a souligné en ces termes un autre sacrifice important que consentent les couples qui travaillent: “Vous sacrifiez votre présence auprès de vos enfants. Chez nous, ils arrivent deux heures avant ma femme. Ils ne restent pas seuls puisque leur grand-mère est là. Mais ma femme perd deux heures qu’elle pourrait leur consacrer. Si seulement elle était à la maison, elle pourrait accomplir encore mieux son devoir d’éducation.” Toutefois, tous les couples qui travaillent n’ont pas une grand-mère ou une amie à leur disposition pour s’occuper de leurs enfants. De plus, il est souvent difficile de trouver de bonnes garderies, dont les services sont généralement coûteux. Ainsi, la revue Newsweek fait état d’“une explosion dans le nombre d’enfants qui passent au moins une partie de la journée, pendant la semaine, sans la moindre surveillance d’un adulte”.
Il n’est donc pas étonnant que, d’après un récent sondage effectué auprès de 200 000 Américains (dont 57 pour cent appartenaient à des familles où les deux conjoints travaillent), 69 pour cent des personnes interrogées pensaient que le travail de la femme avait “un effet néfaste sur la vie de famille”.
Besoins ou désirs?
Certes, l’emploi d’une femme n’entraîne pas toujours de graves conséquences. De nombreux couples parviennent admirablement à s’occuper de leur travail profane, de leurs tâches ménagères et de leurs enfants. Néanmoins, il peut arriver qu’un couple s’inquiète du travail de la femme et pense qu’il est la cause de problèmes familiaux. Dans ce cas, il convient de se souvenir du conseil que Jésus a donné en Luc 14:28: CALCULEZ LA DÉPENSE!
En bref, cela signifie qu’il faut examiner sérieusement sa situation financière et peser ensuite le pour et le contre afin de décider si la femme doit travailler ou non. Deux salaires sont-ils vraiment indispensables pour couvrir les besoins essentiels de la famille, dans les domaines du logement, de la nourriture, du vêtement, etc.? Ou bien le deuxième salaire permettra-t-il uniquement de satisfaire des désirs superflus tels qu’un logement luxueux, des sorties au restaurant, des divertissements et des vêtements élégants?
Beaucoup de couples ne savent tout simplement pas faire la différence entre leurs besoins et leurs désirs. Qu’en résulte-t-il? Le livre L’individu, le mariage et la famille (angl.) tient en substance le raisonnement suivant: ‘Immanquablement, les familles qui ont un revenu équivalant à 100 000 francs par an pensent que, si elles gagnaient ne serait-ce que 30 000 francs de plus, leurs besoins financiers seraient satisfaits. Or, les familles qui ont un revenu de 130 000 francs se sentent aussi “à l’étroit” financièrement que celles qui gagnent 100 000 francs et sont convaincues qu’avec 160 000 francs elles seraient plus à l’aise. Mais même avec des revenus de 160 000, de 300 000 ou même de 500 000 francs, il semble que les gens n’aient jamais assez d’argent pour réaliser tous leurs désirs, car à mesure que les revenus d’une famille augmentent, ses dépenses et les besoins dont elle prend conscience s’accroissent plus rapidement, de sorte que les ménages qui ont de gros revenus ont souvent plus de dettes que les familles aux revenus moyens, elles-mêmes étant plus endettées que les foyers à faibles revenus.’
Dans le même ordre d’idées, une enquête réalisée par la revue Psychology Today a révélé que “ceux qui sont les plus satisfaits de leur situation financière ne sont pas forcément ceux qui ont les revenus les plus élevés. (...) L’inflation est donc souvent une question d’optique”.
Ceux qui travaillent pour essayer de combler leurs désirs insatiables se fatiguent pour rien. Le roi Salomon a écrit: “J’ai observé une autre situation absurde qui existe sur la terre: voici un homme absolument seul, sans compagnon, qui n’a ni frère ni fils, et qui travaille à n’en plus finir. Il désire toujours plus de richesses, bien qu’il se demande pour qui il travaille et se prive de bonheur. C’est encore une façon mauvaise et absurde de mener sa vie.” (Ecclésiaste 4:7, 8, La Bible en français courant; c’est nous qui soulignons). Quel niveau de revenus une famille devrait-elle s’efforcer d’atteindre? La Bible nous donne ce conseil utile dicté par l’expérience: “Si donc nous avons nourriture et vêtement, nous nous contenterons de cela.” — I Timothée 6:8.
L’expression “nourriture et vêtement” ne désigne ni les commodités les plus modernes ni la misère noire (voir Proverbes 30:8). Il ne conviendrait donc pas de classer d’emblée dans les rangs des matérialistes celui qui a les moyens de s’offrir une belle maison ou un poste de télévision. Cependant, un problème surgit effectivement quand un couple s’évertue à obtenir de telles choses aux dépens de ses relations conjugales, de sa spiritualité ou de celle de ses enfants. Lorsqu’un peu d’argent supplémentaire coûte si cher, un ménage devrait commencer à se demander si le jeu en vaut vraiment la chandelle.
Beaucoup en ont conclu que le jeu n’en valait pas la peine. C’est le cas de Christine Davidson; cette femme auteur a décidé qu’elle en ‘avait assez’ d’essayer de mener de front sa vie professionnelle et sa vie de famille. Lorsqu’elle a quitté son poste dans l’enseignement, les revenus de son ménage ont diminué. “Nous sommes tout le temps fauchés, dit-elle. Nous ne pouvons pas, la même semaine, payer la moindre facture et acheter des chaussures de sport à nos enfants. Mais cela ne fait rien, car je peux maintenant leur donner autre chose. Je ne leur dis plus: ‘Non, pas cet après-midi, je dois travailler’ ou: ‘Non, pas maintenant, je suis trop fatiguée.’” Ne se pourrait-il pas que l’attention supplémentaire qu’elle accorde désormais à ses enfants ait plus de valeur qu’un salaire?
‘J’ai besoin d’autre chose dans ma vie’
Bien sûr, toutes les femmes ne peuvent pas quitter aussi facilement leur emploi. Certaines disent même qu’elles s’ennuieraient ou qu’elles ne “s’épanouiraient” pas si elles devaient rester toute la journée à la maison. Une femme qui travaille a confié: “J’ai besoin de faire autre chose dans ma vie que les lits ou la cuisine.”
De telles femmes pourraient donc envisager le travail à temps partiel. Selon le professeur William Michelson, le travail à temps partiel apporte non seulement des revenus supplémentaires, mais ‘il permet également aux femmes de concilier plus facilement leurs différentes responsabilités (...) tout en étant moins prises par le temps, moins tendues, et d’avoir l’avantage de s’occuper elles-mêmes de leurs enfants’. Certaines femmes à l’esprit créatif ont même entrepris chez elles des activités lucratives (voir page 8).
Néanmoins, ce n’est ni dans ses tâches ménagères ni dans son travail profane qu’une femme trouvera le véritable “épanouissement”. Jésus a dit: “Heureux ceux qui sont conscients de leurs besoins spirituels.” (Matthieu 5:3). On ne peut donc se sentir vraiment complet à moins de se soucier de ses besoins spirituels. C’est ainsi que de nombreuses chrétiennes saisissent l’occasion qui s’offre à elles d’être dégagées d’un travail profane pour accroître leur service pour Dieu. Certaines femmes Témoins de Jéhovah se sont donc arrangées pour passer 60 heures, voire 90 heures par mois, à enseigner la Bible à autrui. Cette œuvre constitue un défi, mais elle leur procure un sentiment de plénitude qu’aucun travail profane ne pourrait jamais leur donner.
Tirez le meilleur profit de votre situation
Toutefois, c’est à chaque famille de décider ce qui lui conviendra le mieux. Les interviews retranscrites dans les pages suivantes montrent comment deux couples de Témoins de Jéhovah, dont la situation respective diffère en tous points, en sont arrivés à des conclusions opposées. Il serait donc mal de juger les autres sur ces questions ou d’établir des comparaisons injustes. — Romains 14:4.
Les réalités économiques actuelles obligent beaucoup de couples à avoir deux salaires. Ils n’ont pas le choix. Cependant, les difficultés auxquelles les couples qui travaillent doivent faire face ne sont pas du tout insurmontables. (L’édition du 8 mai 1985 de ce périodique a montré comment les principes de la Bible peuvent aider ces couples.) Étant donné que la Bible ordonne au chrétien de ‘prendre soin des siens’, personne ne devrait se culpabiliser s’il a besoin pour cela de deux salaires. — I Timothée 5:8.
Certes, la situation de la femme qui travaille de nos jours n’est pas idéale. Mais celle du mari qui travaille ne l’est pas davantage. Son emploi le sépare aussi de sa famille pendant de longues heures. Pour jouir de conditions idéales, nous devons donc attendre le nouvel ordre de choses promis dans les Écritures (II Pierre 3:13). Un travail satisfaisant occupera alors la race humaine tout entière (Ésaïe 65:21-23). Les couples n’auront plus à lutter pour subvenir aux besoins des leurs, car Dieu promet une abondance de bonnes choses, matérielles et spirituelles, pour ceux qui jouiront de la vie à cette époque-là. — Ésaïe 25:6.
Mais en attendant, ne vous laissez pas consumer par les soucis ni par les difficultés que vous rencontrez pour gagner votre vie. ‘Rachetez le temps’ pour votre conjoint et vos enfants (Éphésiens 5:16). Ne soyez jamais occupé au point de ne plus avoir le temps de servir Dieu en famille. Tandis que nous vivons des jours difficiles, la chose la plus sage à faire est de mobiliser vos efforts pour poser ‘un beau fondement pour l’avenir, afin que vous vous saisissiez résolument de la vie véritable’. — I Timothée 6:19.
[Note]
a Organisation de l’emploi des mères. Conséquences pour les femmes et leurs familles — Université de Toronto.
[Encadré/Illustration, page 5]
Avantages Inconvénients
Moins de soucis financiers Moins de temps pour les
tâches ménagères
La femme a l’occasion Moins de temps consacré
de sortir de chez elle aux enfants
Le mari fait moins Impôts plus élevés
d’heures supplémentaires
La femme utilise ses Risque de tensions
compétences professionnelles entre les conjoints
La famille pourra s’offrir Dépenses supplémentaires
des extra (déjeuner, vêtements)
[Illustrations, pages 6, 7]
Les avantages liés à un emploi valent-ils le temps que vous pourriez passer en famille?
[Illustration, page 9]
Même si les deux conjoints travaillent, ils doivent réserver du temps pour l’étude familiale.