Plongée au cœur du cosmos
De notre correspondant à Hawaii
EST-IL possible de voir dans le passé? La réponse est oui!
En fait, chaque fois que nous levons les yeux vers le ciel constellé d’étoiles, nous plongeons dans le passé. Mais où réaliser cette fascinante expérience qui consiste à voir ce qui n’existe plus? À Hawaii. À l’instar des Polynésiens qui découvrirent cette île en suivant les étoiles, beaucoup aujourd’hui viennent à Hawaii pour suivre ou observer les étoiles. Ils y découvrent ce qui se fait de mieux en matière de technique astronomique, une technique qui permet de voir très loin dans le passé.
Prenons donc la direction d’Hawaii, encore appelée la Grande Île. Une fois sur place, nous monterons au sommet d’un volcan éteint, le Mauna Kea, qui culmine à 4 205 mètres. Là, nous visiterons certains des plus prestigieux observatoires spatiaux du monde, véritables scrutateurs de l’univers.
Sur les pentes du Mauna Kea
Au petit matin, nous nous sommes engagés sur la route longue et sinueuse qui mène au sommet du Mauna Kea. Nous quittons les basses altitudes, caractérisées par un climat tropical et un niveau de précipitations qui dépasse 5 000 millimètres par an, et montons vers les flancs arides de ce volcan éteint, que la neige recouvre parfois plusieurs mois durant. À partir de la ligne supérieure de la forêt, nous nous engageons sur une route difficile, poussiéreuse et escarpée, et nous comprenons alors pourquoi un véhicule à quatre roues motrices est nécessaire.
Enfin, nous atteignons le sommet. Un peu partout sont disséminés de nombreux observatoires. L’air est vif, l’atmosphère claire, quasiment transparente. Nous garons la voiture et sortons. Un vent glacial nous cloue sur place. Mais presque aussi vite, une sensation d’ivresse nous envahit à la vue du panorama qui s’offre à nous. Du haut de ce volcan aride, nous dominons une mer de nuages qui nous donne l’impression d’être coupés de la terre et de l’océan.
Pourquoi ici?
C’est au début des années 60 que les astronomes ont commencé à construire sur la Grande Île le premier observatoire qui allait leur permettre de scruter l’espace et de voir dans le passé. Mais pourquoi ici, au sommet d’un volcan insulaire perdu dans le Pacifique?
Il y a quatre paramètres fondamentaux qui rendent ce site si propice à l’observation des cieux étoilés: 1) La proportion élevée de nuits claires dans l’année; 2) la clarté et la stabilité de l’air, ce qui réduit les distorsions lors des observations; 3) la très faible pollution lumineuse nocturne grâce aux réglementations en vigueur sur la Grande Île; et 4) la très faible hygrométrie, facteur important quand on sait que l’humidité entrave le fonctionnement de certains instruments.
Rien qu’à l’œil nu, on peut facilement se rendre compte des qualités atmosphériques exceptionnelles de ce site. On comprend que le Mauna Kea soit considéré comme le poste d’observation astronomique idéal.
À l’intérieur des observatoires
Nous faisons connaissance avec notre guide, puis nous nous dirigeons vers l’observatoire Keck, qui abrite le plus grand et le plus puissant télescope construit à ce jour.
Une fois à l’intérieur, nous comprenons rapidement que le temps est révolu où les astronomes regardaient dans ces télescopes à l’œil nu. De nos jours, on se sert de puissants ordinateurs et autres appareils élaborés, qui permettent de multiplier par un facteur de plusieurs milliards ce qu’il est possible de voir à l’œil nu.
Vertigineux, n’est-ce pas? Grâce à cet équipement perfectionné, les astronomes peuvent recueillir en quelques jours une masse d’informations dont le dépouillement et l’analyse les occuperont ensuite pendant des mois.
Le guide attire maintenant notre attention sur ce qui fait de l’observatoire Keck le nec plus ultra de la technique astronomique: son télescope unique en son genre. Son miroir est composé de 36 segments hexagonaux d’environ 1,80 mètre de diamètre chacun, ce qui en fait l’équivalent d’un miroir de 10 mètres de diamètre.
Un article publié par l’Association californienne de recherche astronomique a dit de ce télescope que “grâce à son système de pilotage électronique d’une précision d’un millionième de pouce, mille fois plus petit que le diamètre d’un cheveu humain”, et avec seulement un quart de ses miroirs en place, il “égale déjà en puissance le télescope Hale de 5 mètres de l’observatoire Palomar” en Californie.
Mais ce n’est pas tout! Notre guide nous révèle qu’ils viennent de recevoir des fonds pour l’installation d’un second télescope, adjacent à ce premier, qui est encore en construction. Ces télescopes jumeaux fonctionneront comme une paire de jumelles géantes et permettront de voir plus loin qu’on ne l’aurait jamais cru. Vraiment, quelle visite exaltante!
Mais, vu l’altitude, il est préférable que nous ne nous excitions pas trop, car l’hypoxémie (mauvaise alimentation des tissus du corps en oxygène) nous guette. La difficulté que nous éprouvons à nous concentrer et à trouver nos mots est un signe que nos facultés mentales ne sont pas à leur meilleur niveau. En fait, si nous nous déplaçons trop vite ou si nous dépensons trop d’énergie, nous risquons de souffrir de maux de tête, de nausées, voire de tourner de l’œil. Manifestement, l’endroit n’est pas indiqué pour les gens en mauvaise santé.
Ainsi, après avoir passé cinq heures au sommet, il est temps que nous redescendions sous les 3 000 mètres. Mais que de choses intéressantes nous avons déjà vues ce matin!
Que nous apprennent les étoiles?
À 2 800 mètres d’altitude se trouvent des logements et des installations pour une cinquantaine d’astronomes et d’autres membres du personnel. Un centre d’accueil permet également aux visiteurs d’entendre des exposés sur les observatoires du Mauna Kea.
De plus, ceux qui veulent rester en soirée ont la possibilité d’observer les étoiles à l’aide d’un télescope de 28 centimètres et de bénéficier des explications d’un des scientifiques de l’université d’Hawaii. Nous sommes restés, et nous ne l’avons pas regretté. C’est un très bon moyen de savoir ce que les étoiles peuvent nous apprendre et de terminer en beauté une journée exceptionnelle.
Peut-être vous demandez-vous pourquoi nous avons affirmé précédemment qu’il est possible de regarder dans le passé. Un exemple vous aidera à le comprendre. Prenons la galaxie d’Andromède. Par nuit claire, on voit sa lumière à l’œil nu. Or, compte tenu de la distance qui nous sépare de cet univers-île et sachant que la lumière voyage à la vitesse de 300 000 kilomètres à la seconde, on a calculé que la lumière qui nous parvient d’Andromède est vieille de 1,5 million d’années. Voilà comment l’observation des étoiles nous permet de voir dans le passé.
Grâce aux télescopes ultramodernes du Mauna Kea, l’homme a aujourd’hui la possibilité de remonter encore plus loin dans le temps et de s’enfoncer plus avant dans l’espace, et ce parce que les instruments dont il dispose sont beaucoup plus puissants que l’œil. Les astronomes estiment en effet qu’ils sont actuellement en mesure de voir la lumière émise par des étoiles il y a huit milliards d’années. Ils espèrent que le fruit de leurs observations les aidera à mieux comprendre comment les étoiles sont nées et comment l’univers s’est étendu.
Nous venons de passer une journée exceptionnelle, et nous ne sommes pas prêts d’oublier ce que nous avons vu. Ces merveilles de la création qu’observent, et observeront encore, les astronomes forcent notre admiration. Plus jamais nous ne regarderons les cieux étoilés de la même façon. Toujours nous repenserons à cette journée et à la beauté de ce site montagneux.
Puissent des moments comme ceux-ci accroître notre reconnaissance envers Celui qui a créé l’univers pour notre plus grand émerveillement! — Ésaïe 40:26; 42:5.
[Crédit photographique, page 25]
Association californienne de recherche astronomique