Coup d’œil sur le monde
“Stratégie pour demain”
C’est là le titre d’un ouvrage publié dernièrement par deux membres du club de Rome, — groupe de savants et d’intellectuels fondé pour alerter les hommes en général et les dirigeants en particulier des dangers que court actuellement l’humanité. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, cet ouvrage montre que les crises actuelles sont le résultat même des “progrès” scientifiques. En effet, alors que dans le passé les souffrances humaines avaient pour causes principales la guerre et les fléaux naturels, aujourd’hui elles sont dans une large mesure attribuables à la “victoire” de l’homme sur la nature, à l’exploitation effrénée des ressources de la terre, à l’accroissement de la natalité et à la prolongation de la durée de la vie. Commentant ce livre, Pierre Drouin a écrit dans Le Monde : “Il secoue tous ceux qui auraient tendance à s’assoupir sur les lauriers de la croissance. Parlant au nom de l’espèce, il dénonce en somme ce ‘pacte avec le diable’ en vertu duquel l’expansion continue à se nourrir du pillage de la nature et du renforcement des inégalités entre le nord et le sud de la planète. Cette démarche ‘faustienne’ finirait, si l’on n’y prenait garde, par pétrifier la Terre (...).” Et le commentateur de poser cette question : “Les crises en chaîne que nous connaissons aideront-elles les gouvernements à mieux ‘programmer’ le développement et à éviter la catastrophe finale ?”
“Le monde a besoin d’une pensée”
Écrivant dans Le Monde du 10 décembre 1974, Monsieur André Piettre, membre de l’Institut de France, a écrit : “Est-ce vraiment la fin ? Non seulement la fin d’une croissance exceptionnelle, mais encore le terme d’une ère de progrès commencée il y a deux siècles ? Entrons-nous dans une crise mondiale qui remettrait en cause, bien au-delà de l’économie, les assises mêmes de la ‘civilisation moderne’ ? Oui, le monde a besoin d’une pensée. Il a soif d’un grand dessein qui donnerait un sens à ses progrès et une issue à ses tourments. Trop longtemps on a cru aux bienfaits spontanés de la science et des techniques. (...) Triste triomphe d’une science prodigieuse qui conquiert la Lune avant de conquérir la Terre (...). Triste record d’une croissance sans précédent où la progression des inadaptés sociaux est plus rapide encore. Et, par-dessus tout, politique suicidaire qui peuple les mers d’un arsenal suffisant pour faire sauter la Terre, mais laisse, faute de secours, des masses humaines mourir de faim... (...). Et qu’espérer d’une Église désemparée en état virtuel de schisme ? Les universitaires ? La plupart sont sortis de 1968 comme frappés d’hémiplégie : les uns abaissent leur savoir au service d’une idéologie ; les autres mettent d’admirables vertus au service d’une érudition close (...). Il faut le dire nettement : le porno-capitalisme, qui fait la honte de nos sociétés permissives, n’est pas son œuvre [celle de la jeunesse] et ne fait pas spécialement ses délices. La liberté que veulent les meilleurs des jeunes n’est pas la licence, mais celle de s’engager dans une œuvre qui le mérite.”
Les jésuites rappelés à l’ordre
À l’occasion de la trente-deuxième Congrégation générale des jésuites, tenue en décembre et janvier derniers à Rome, le pape Paul VI a profité de l’occasion pour adresser aux membres de la Compagnie de Jésus un sérieux rappel à l’ordre. Il leur a posé trois questions : “D’où venez-vous ? Qui êtes-vous ? Où allez-vous ?” Il leur a rappelé qu’ils sont ‘membres d’un ordre religieux, apostolique, sacerdotal, unis au souverain pontife avec un lien spécial d’amour et de service’. Autrement dit, ils lui doivent une obéissance absolue. Le pape a critiqué chez les jésuites “le doute systématique, la critique de sa propre identité, le désir de changer, l’indépendance et l’individualisme”. Évoquant “quelques faits douloureux” qui se sont produits chez des jésuites peu conformistes, Paul VI a déclaré : “Ils exercent une triste influence sur le clergé, les autres religieux et le laïcat catholique.” Il a précisé que l’image originelle de l’ordre des jésuites “ne doit être ni altérée ni défigurée”.
Les évêques espagnols et la liberté
À l’occasion de la vingt et unième assemblée de la Conférence épiscopale espagnole, les évêques d’Espagne ont adopté une résolution qui demande au gouvernement de garantir “les droits fondamentaux des citoyens, tels ceux d’association, de réunion et d’expression”. Précisons, pour qui s’étonnerait de ce souci inhabituel de liberté chez les prélats espagnols, qu’il s’agit dans leur esprit davantage de la liberté politique que de la liberté religieuse. En effet, le nombre de prêtres sanctionnés par les autorités civiles à cause de leur ingérence dans les affaires politiques du pays ne cesse d’augmenter. Or, aux termes du concordat de 1953, aucun prêtre ne peut être poursuivi en justice sans autorisation de son évêque. La Conférence épiscopale espagnole vient de décider de demander aux évêques des diocèses de n’autoriser l’inculpation d’aucun prêtre pour “propagande illégale”. Les évêques ont déclaré : “Nous invitons les dirigeants à réviser la situation pénale de ceux qui sont détenus du fait de la restriction de droits qui tentent maintenant à être reconnus. Nous demandons un geste généreux de clémence par égard pour le message de l’Année sainte.” Il est curieux d’entendre la hiérarchie de l’Église catholique d’Espagne s’émouvoir à cause de l’incarcération d’activistes politiques, alors que pendant des années elle n’a rien fait pour des centaines de jeunes chrétiens détenus pour des raisons strictement religieuses !
Progrès chirurgicaux
Aux États-Unis, un nombre croissant d’hôpitaux se rendent compte des avantages de la chirurgie sans transfusion sanguine. Par exemple, l’hôpital général du Massachusetts a publié un rapport sur ses efforts pour remplacer le sang par des succédanés. Ce rapport dit qu’“en évitant d’administrer du sang aux malades”, les techniques opératoires utilisées diminuent les “risques de transmettre l’hépatite et présentent souvent d’autres avantages chirurgicaux”. Ces techniques, “conçues à l’origine (...) pour respecter les croyances des témoins de Jéhovah”, ont si bien réussi qu’elles “pourront éliminer entièrement la nécessité de transfusions” dans certains types d’opération.
Sondes envoyées vers le Soleil, Jupiter et Saturne
Les techniciens de la NASA ont récemment envoyé une sonde ouest-allemande baptisée Hélios vers le Soleil. Cette sonde, qui pèse 355 kilogrammes, doit passer vers le milieu du mois de mars à 45 millions de kilomètres de l’astre du jour, avant de revenir vers la Terre. Elle abrite huit appareils de mesure ouest-allemands et trois appareils américains destinés à observer le flux des particules (protons et électrons) éjectées par le Soleil dans l’espace. Pendant son voyage, la sonde Hélios sera soumise à une irradiation seize fois supérieure à celle qui atteint la surface de la Terre. D’autre part, après un voyage de dix-huit mois dans l’espace interplanétaire, la sonde américaine Pioneer-11 est passée dernièrement à proximité de la planète Jupiter et a pu la photographier. Pioneer-11 est passée à seulement 41 800 kilomètres de Jupiter, ce qui lui a fait traverser des ceintures de radiations plusieurs milliers de fois plus intenses que sur la Terre. La sonde a reçu une forte décharge de 4 000 volts et elle a subi un bombardement d’électrons, mais elle a survécu. À présent, elle continue sa route vers la planète Saturne, que, selon la NASA, elle doit atteindre en 1979.
Preuves ou théories ?
Depuis une dizaine d’années plus de cent hommes de science travaillent frénétiquement en Afrique orientale à la recherche de “preuves” de la théorie de l’évolution. À ce sujet, le journal parisien Le Figaro a écrit dernièrement sous le titre “La course aux origines de l’homme” : “Tout semble vraiment commencer, en Afrique, il y a une vingtaine de millions d’années. Louis Leakey a en effet trouvé des restes — datés de 20 et 14 millions d’années — d’un être, le Kenyapithèque (...). Le plus troublant, c’est qu’associé au Kenyapithèque de 14 millions d’années, on trouve déjà l’outil au premier degré, c’est-à-dire non pas fabriqué, mais utilisé. (...) Il existe ensuite, pour les paléontologistes, un vide assez angoissant entre 14 et 16 millions d’années en Afrique de l’Est. (...) À partir de 6 millions d’années, les choses se précisent. À Kerio, au sud-ouest du lac Rodolphe, on a découvert une mandibule qui est celle du plus ancien Australopithèque connu (...). Et puis, mais cela reste à prouver, il semble que de mutation en mutation, voici plus de deux millions d’années, soit apparu, en Afrique ‘Homo erectus’ (800 à 1 200 cm3 de capacité cérébrale), l’‘Homo’ qui se tenait droit. (...) À partir de ces groupes d’‘Homo erectus’, serait apparu l’‘Homo sapiens’, un peu partout, simultanément à la surface du globe. C’est ce que l’on nomme le ‘monophilétisme polygénique’. Cette mutation multiple se serait produite voici 100 000 à 250 000 ans, selon les uns ; 600 000 ans, selon Louis Leakey (...). Une naissance multiple mais simultanée, voilà encore de quoi faire réfléchir.” En effet, croire que de multiples mutations, — que tous les scientifiques sérieux admettent être nuisibles, — aient pu se produire simultanément pour qu’apparaisse subitement l’homme tel que nous le connaissons, demande une foi mystique. Pour comble de malheur pour les évolutionnistes, Richard, fils de Louis Leakey, vient d’avouer que de récentes découvertes paléontologiques en Éthiopie allaient “nécessiter l’abandon de la théorie de l’évolution humaine telle qu’elle est communément admise actuellement. (...) L’Homo sapiens n’a pas évolué à partir de l’Australopithèque”. De son côté, l’anthropologiste David Brose a déclaré que ces découvertes “fourniront probablement matière à discussion pendant des années”, et que “ce débat relèvera davantage de philosophies individuelles que de preuves réelles”.