Coup d’œil sur le monde
L’individu et l’État
Le vingt-cinquième anniversaire de la Convention européenne des droits de l’homme a été célébré dernièrement à Rome, où ce document fut signé le 4 novembre 1950. Dix-huit pays européens sont signataires de cette charte des droits de l’homme, la France et la Suisse étant parmi les derniers pays à la ratifier. La convention garantit une bonne administration de la justice, le respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance, la liberté de pensée, de conscience, de religion, d’expression, d’opinion, de réunion et d’association. Normalement, cette charte donne à chaque citoyen la possibilité de présenter un recours en justice dans son pays et même devant la Cour européenne des droits de l’homme. Mais seuls onze États (Autriche, Belgique, Danemark, Irlande, Islande, Luxembourg, Pays-Bas, Norvège, RFA, Suède et Royaume-Uni) reconnaissent ce droit de recours individuel. Les autres refusent encore que les particuliers puissent agir directement contre l’État. Du reste, ces États n’ont pas grand-chose à craindre de cette convention, puisque la seule sanction prévue pour une violation de ce texte par un État est la publication des conclusions de la Commission européenne. En fait, parmi les requêtes individuelles reçues par cet organisme depuis sa création, 90 pour cent ont été déclarées irrecevables, et 5 pour cent ont été rejetées ensuite. D’ailleurs aucun des gouvernements signataires (en dehors de l’Italie, pays hôte) n’a envoyé de délégation officielle à cette célébration du vingt-cinquième anniversaire de la Convention européenne des droits de l’homme. Seuls des experts y étaient conviés. Autant dire que cette charte des libertés individuelles face à l’État ne semble susciter ni l’enthousiasme ni la crainte de “César”.
Le concordat entre le Vatican et l’Allemagne
En 1933, le Vatican signa un concordat avec l’Allemagne nazie de Hitler. Les termes de ce concordat accordaient certains privilèges à l’Église catholique d’Allemagne. Or, ce concordat, qui est toujours en vigueur, s’applique à tout le territoire d’Allemagne d’avant-guerre, alors qu’actuellement, ce pays est divisé en deux États différents : la République fédérale d’Allemagne et la République démocratique allemande, sans parler de Berlin, dont le statut est encore différent. Le 26 mars 1957, la Cour suprême d’Allemagne occidentale reconnut la validité du concordat pour la RFA. Hormis donc une modification apportée dans le domaine scolaire, le concordat de 1933 est toujours en vigueur en Allemagne de l’Ouest. Quant à la République démocratique allemande, dont le gouvernement communiste se déclare dégagé des accords conclus par Hitler, elle demande au Vatican la reconnaissance de la frontière actuelle comme limite des diocèses, la création d’une conférence épiscopale indépendante de celle de l’Allemagne de l’Ouest, et l’établissement de relations diplomatiques entre le Saint-Siège et l’Allemagne de l’Est. Certes, le Vatican nie que, lors de sa récente visite à Berlin-Est et à Bonn, Mgr Casaroli, secrétaire du Conseil pour les affaires publiques de l’Église, ait abordé la question d’une éventuelle révision du concordat de 1933. Toujours est-il qu’en désignant un nouveau nonce apostolique à Bonn, le Vatican lui a donné le titre non plus de “nonce en Allemagne” (comme son prédécesseur), mais de “nonce en République d’Allemagne”. Il semble donc que le Vatican soit disposé à composer avec l’Allemagne de l’Est, tout comme, voilà quarante ans, il composa avec l’Allemagne de Hitler.
L’arme “idéale”
À l’époque des fusées intercontinentales et des missiles sol-air à tête chercheuse, on sait que le moyen le plus sûr de pénétrer en territoire ennemi serait le vol à grande vitesse et à très basse altitude, ce qui rendrait difficiles la détection au radar et l’action des fusées antiaériennes. Plusieurs avions de combat ont été conçus en fonction de ces données, mais ils sont extrêmement coûteux et les pertes de ces appareils risqueraient d’être considérables. Or, les Américains sont en train de développer un nouveau type de missile, appelé Cruise. Dans sa version stratégique, ce missile, qui ne mesure que six mètres de long et 50 centimètres de diamètre, sera doté d’une tête nucléaire. Ses dimensions lui permettront d’être lancé d’un simple tube lance-torpilles. Son rayon d’action serait de 2 700 kilomètres. Muni d’un radar qui mesure continuellement son altitude, il vole très bas, à moins de 200 mètres du sol, en suivant la configuration du terrain. Après un trajet de 2 700 kilomètres, la précision de son tir serait de l’ordre de 200 à 60 mètres. Son système de guidage a déjà été essayé en vol. Cet engin ne coûterait que 500 000 dollars pièce, alors que le nouveau bombardier B-1 américain coûterait 18,5 millions de dollars. Il paraît que cette nouvelle arme inquiète les Soviétiques. Est-ce à elle, entre autres, que pensait M. Malik, représentant soviétique aux Nations unies, lorsqu’il a proposé “un traité portant interdiction de la mise au point et de la fabrication de nouveaux types d’armes” ? Toujours est-il qu’il a ajouté : “Il y a toutes les raisons de croire que l’humanité est aujourd’hui au seuil de découvertes scientifiques majeures susceptibles d’être utilisées pour la fabrication de nouvelles armes monstrueuses de destruction massive, comme elle était, il y a quarante ans, au seuil de l’ère nucléaire.”
“Journée mondiale de la paix”
À l’occasion de la neuvième Journée mondiale de la paix, célébrée le 1er janvier 1976, le pape a publié un message qui disait notamment : “Pauvre paix ! Quelles sont tes armes ? La peur de conflagrations inouïes et fatales qui pourraient décimer, voire anéantir l’humanité ? La résignation à un certain état de domination subie, comme le colonialisme, l’impérialisme ou la révolution (...) ? Les armements préventifs et secrets ? Une organisation capitaliste, c’est-à-dire, égoïste, du monde économique, obligé par la faim à se contenir dans la soumission et la tranquillité ?” Pour Paul VI, les ennemis les plus dangereux de la paix sont le nationalisme, la course aux armements et les idéologies qui divisent les peuples. D’après lui, les vraies armes de la paix sont le respect des traités, un désarmement commun et général, et l’amour des hommes. Affirmant que l’humanité a aujourd’hui des raisons d’espérer, il a déclaré : “La conférence d’Helsinki, en juillet-août 1975, est un événement qui donne des espoirs.” À cette occasion, le pape a lancé ce slogan : “Donner à la paix d’autres armes que celles destinées à tuer et à exterminer.” En dehors de quelques truismes et vœux pieux, on ne trouve dans ce message pontifical aucune allusion quelconque au Royaume de Dieu comme espérance pour les hommes.
Le record des clippers est battu
Au siècle dernier, les clippers étaient de grands voiliers rapides qui faisaient le voyage d’Amérique, de Chine et d’Australie. D’ordinaire, les clippers reliaient l’Australie à l’Angleterre en 100 jours, en passant par le cap de Bonne-Espérance à l’aller et par le cap Horn au retour. Mais en fin 1869-début 1870, le clipper “Patriarch” fit le voyage Londres-Sydney en 69 jours 1 heure 30 minutes, à la vitesse moyenne d’environ 370 kilomètres par jour. À plusieurs reprises, ce trois-mâts dépassa les 500 kilomètres en vingt-quatre heures. Depuis plus de cent ans, ce record n’avait jamais été battu. Or, cet hiver, deux grands ketches, le britannique Great Britain II et le français Kriter se sont livrés un combat acharné et se sont aussi attaqué au record de “Patriarch”. La course a été gagnée par le bateau anglais, qui a relié Londres à Sydney sans escale en 67 jours 7 heures 19 minutes. Mais le yacht français n’a mis que 6 heures 28 minutes de plus, et a même gagné la course au handicap. Les deux voiliers ont ainsi battu de près de deux jours le record du clipper “Patriarch”.
Le pape et l’Église portugaise
À l’occasion d’une récente visite à Rome, le chef de l’État portugais a eu un entretien avec Paul VI, au cours duquel il a affirmé l’intention du Portugal de maintenir de bonnes relations avec le Vatican sur la base du concordat de 1940, qui accorde certains privilèges à l’Église catholique. Ce concordat a déjà été modifié il y a un an pour permettre aux Portugais mariés à l’Église de demander le divorce. Dans sa réponse, prononcée en portugais, le pape a notamment déclaré : “Nous désirons vivement que l’avenir de ce pays si cher soit fait de sérénité, de concorde, d’évolution et de progrès dans la paix et la justice.” Il a dit que l’Église portugaise collaborerait à cette œuvre “dans un esprit de respect et de loyauté”. Affirmant que l’Église catholique au Portugal ne cherchait pas des privilèges spéciaux, Paul VI a néanmoins précisé qu’elle “souhaite exercer librement sa mission, qui est d’annoncer l’Évangile”. Nul doute que si l’Église catholique se bornait à remplir cette mission, elle aurait bien moins d’ennuis, non seulement au Portugal, mais dans bien d’autres pays encore.
L’Église craint le communisme à Rome
En prévision des élections municipales qui doivent se tenir ce printemps à Rome, le cardinal Ugo Poletti, vicaire de Rome, a adressé la mise en garde suivante aux curés du diocèse : “Dans quelques mois, peut-être par notre faute, la ville de Rome pourrait être confiée de manière irresponsable à une administration marxiste, avec toutes les conséquences qui en découleraient.” Le cardinal-vicaire, qui est le délégué du pape dans le diocèse de Rome, s’inquiète de la “résignation” de l’électorat catholique (démocrate chrétien) et de sa tendance à voir comme une fatalité l’arrivée au pouvoir des communistes à Rome. Selon lui, le parti communiste “a très bien compris qu’arriver au Capitole veut dire non seulement conquérir une cité prestigieuse, mais se trouver aussi confronté avec l’Église catholique dans son propre siège de capitale spirituelle du monde”. Ces déclarations sont d’autant plus intéressantes que le cardinal Poletti figure parmi les “papabili” (futurs papes possibles) et que Paul VI approuva publiquement sa mise en garde contre la montée du communisme à Rome. En revanche, le parti communiste exprima sa “surprise” devant l’avertissement du cardinal Poletti, tandis qu’un dirigeant du parti républicain invita ce prélat “à rester dans sa sphère de compétences”, et qu’un porte-parole du parti socialiste déclara : “Depuis des années, on n’avait pas enregistré une telle ingérence de la hiérarchie ecclésiastique dans la situation italienne.”