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La religion perd du terrain dans le Sud des États-UnisRéveillez-vous ! 1973 | 8 juillet
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La religion perd du terrain dans le Sud des États-Unis
DEPUIS plus de deux siècles, le Sud des États-Unis était le bastion de la pensée protestante conservatrice. Les baptistes, les méthodistes et d’autres groupements religieux “fondamentalistes” ont eu une telle influence dans cette région qu’elle a été appelée le “Bible Belt” (c’est-à-dire la “Ceinture biblique”).
Mais actuellement, le front solide que formaient les Églises du Sud semble se disloquer. En 1971, seule l’Église baptiste connut un certain accroissement, c’est-à-dire 1,2 pour cent. Cela représente une augmentation de seulement un dixième de un pour cent par rapport à l’accroissement de la population. L’augmentation en 1972 fut un peu plus importante.
Cependant, ces Églises doivent faire face à bien d’autres problèmes. Lors d’une conférence évangélique, un ancien président du Conseil des baptistes du Sud déclara qu’une “marée de paganisme, d’hédonisme et d’athéisme (...) menaçait l’Église”. Le Statesman d’Austin (Texas) cita ses propos, disant : “Alors que l’Église doit faire face aux épreuves les plus graves qu’elle ait connues, elle se trouve elle-même particulièrement malade et faible. (...) Nous serons bientôt témoins de la disparition de l’Église [baptiste].”
On entend des déclarations semblables concernant d’autres groupements religieux. Certains ont le sentiment qu’il est impossible de ranimer l’Église ‘agonisante’. Les prêtres eux-mêmes se sentent frustrés par l’effondrement de la religion dans le Sud. Ken Forshee, de l’Église chrétienne de Highland Hills, à Oklahoma City, a interrogé des prêtres de vingt-cinq églises des environs. Voici ses conclusions :
“Pour chaque homme qui retire satisfaction de son ministère, trois l’abandonneraient volontiers s’ils avaient la moindre idée de ce qu’ils pourraient faire d’autre. Cela représente un des problèmes les plus critiques de l’Église d’aujourd’hui.”
Rex Vaughan, un confrère de Forshee, parle “d’un grand désespoir tant parmi le clergé que parmi les laïques, d’un manque de vision concrète et de moyens”.
Mais pourquoi ce “manque de vision concrète” ou de “satisfaction” et ce sentiment de “désespoir” dans cette partie des États-Unis que l’on considérait comme un bastion de la religion “fondamentaliste” ? Parce que dans cette région en particulier, les Églises doivent affronter de graves problèmes. Citons notamment les divers changements résultant de l’intégration raciale. Pour comprendre les effets de cette dernière, faisons un bref retour en arrière dans l’histoire du Sud des États-Unis.
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La question raciale ébranle les Églises du Sud des États-UnisRéveillez-vous ! 1973 | 8 juillet
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La question raciale ébranle les Églises du Sud des États-Unis
AU DÉBUT du dix-neuvième siècle, les mêmes Églises s’établirent aussi bien dans le Nord que dans le Sud. L’esclavage également apparut dans les deux parties du pays. Toutefois, dans le Nord, l’esclavage des Noirs n’eut guère de succès, car on mettait surtout l’accent sur le commerce, l’industrie et l’expansion vers l’Ouest. Par contre, dans le Sud, où le coton était la base de l’économie, l’esclavage permettait de bénéficier d’une main d’œuvre bon marché.
Si le pays était divisé politiquement sur la question de l’esclavage, il l’était également du point de vue religieux. Les Églises du Nord condamnaient l’esclavage comme ‘impie’, alors que les Églises du Sud estimaient qu’il était ‘saint’. Elles citaient des passages bibliques isolés de leur contexte pour justifier l’esclavage des Noirs. En 1844, cette question produisit une scission entre l’Église méthodiste du Nord et celle du Sud ; un an plus tard, l’Église baptiste connut la même séparation. Puis, en 1861, quand commença la guerre de Sécession, les presbytériens furent divisés par la ligne de démarcation politique, dite ligne Mason-Dixon, entre le Nord et le Sud.
S’il faut en croire E. M. Poteat Jr, ministre de l’église baptiste Pullen Memorial de Raleigh, en Caroline du Nord, les Églises du Sud participèrent elles-mêmes au commerce des esclaves. Il dit : “Non seulement des chrétiens possédaient des esclaves pour la gloire de Dieu, mais les Églises elles-mêmes faisaient progresser le Royaume des cieux en louant des esclaves qui étaient devenus la propriété personnelle de la Maison de Dieu.”
L’esclavagisme prit donc fortement racine dans les États du Sud. Toutefois, n’oublions pas que si l’esclavage des Noirs avait été un succès économique dans le Nord, les Églises de cette région l’auraient sans doute soutenu avec autant de passion que l’on fait celles du Sud.
Préventions raciales après la guerre de Sécession
Après la guerre de Sécession et la défaite des États du Sud en 1865, le clergé s’attacha à ce qui lui appartenait en propre : le protestantisme du Sud. “Si nous ne pouvons pas avoir notre indépendance politique, établissons au moins notre indépendance intellectuelle”, proclamait avec instance un prédicateur méthodiste du Mississippi, quand eut pris fin la Confédération sudiste. Dans son livre Le protestantisme blanc dans le Sud
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