Une affreuse injustice
QUAND ceux que vous aimez ou vous-même êtes victimes d’une injustice, n’en souffrez-vous pas très profondément? Nous devrions même nous sentir concernés quand d’autres personnes sont traitées d’une manière injuste. Un exemple d’injustice peut ébranler toute la civilisation d’un pays.
Il s’est produit une affreuse injustice dans une île italienne, la Sardaigne. Giuseppe et Consiglia Oneda, un jeune couple, ont été accusés d’être responsables de la mort de leur fille bien-aimée. À l’heure actuelle, ils sont en prison. Comme ils ont été plus mal traités que des terroristes, leur cas a attiré l’attention internationale. Au fur et à mesure que vous prendrez connaissance des faits, vous vous apercevrez que l’on s’est attaqué aux droits des minorités, au droit de choisir son traitement médical chez le médecin ou à l’hôpital, ainsi qu’au droit pour les parents de prendre correctement soin de leurs enfants.
La famille Oneda
Les Oneda habitent à Sarroch, une petite ville de Sardaigne. Vous pouvez imaginer quelle fut leur joie quand, le 23 décembre 1977, naquit Isabella, leur premier enfant qu’ils attendaient avec tant d’impatience. Malheureusement, ils connurent bientôt une grande tristesse. Pourquoi? Eh bien, au bout de six mois, ils avaient observé qu’Isabella était pâle et ne grandissait pas normalement. Quand ils consultèrent les médecins, ceux-ci leur apprirent que le bébé était atteint d’une anémie très grave. Les médecins commencèrent à soigner l’enfant en lui administrant des transfusions sanguines. Cependant, la maladie ne faisait que s’aggraver.
À cette époque-là, les Oneda se mirent à étudier la Bible avec les Témoins de Jéhovah et furent un peu réconfortés en apprenant qu’un jour Dieu mettrait fin à la souffrance et à la mort (Révélation 21:4). Comme ils ont un profond respect pour la vie, les Témoins de Jéhovah acceptent les traitements médicaux modernes et il y a de nombreux médecins parmi eux. Cependant, ils sont convaincus que les transfusions sanguines leur sont interdites par des passages bibliques tels que celui-ci: “Seulement la chair avec son âme — son sang — vous ne devrez pas la manger.” (Genèse 9:3, 4). De plus, ils savent que le premier concile apostolique ordonna aux chrétiens ‘de s’abstenir de la fornication et du sang’. — Actes 15:19, 20.
En étudiant la Bible, les Oneda comprirent encore mieux que les parents devaient s’occuper avec amour de leurs enfants. Ils en étaient tellement conscients qu’ils sautaient certains repas pour économiser de l’argent afin d’acheter de meilleurs aliments et des médicaments pour la petite Isabella.
De quelle maladie Isabella souffrait-elle?
Isabella souffrait d’une cruelle maladie du sang, la thalassémie dans sa forme la plus grave (également appelée maladie de Cooley). C’est un mal héréditaire très répandu dans le bassin méditerranéen. On prescrit souvent des transfusions sanguines, mais ce n’est qu’un traitement temporaire, car c’est malheureusement une maladie incurable. La plupart de ceux qui en sont atteints meurent dans l’enfance. Une publication traitant des maladies du sang explique que, lorsque le mal se manifeste chez les nouveau-nés — ce qui était le cas d’Isabella — l’enfant meurt généralement “au cours des deux premières années de son existence”. — Trattato di Patologia Medica (Traité de pathologie) de U. Teodori, Rome, 1976.
Comment se conduisirent les parents?
Tout au long de l’année 1978 et au début de 1979, les Oneda emmenèrent à maintes reprises Isabella à la clinique de l’université de Cagliari, bien qu’il fût impossible de la guérir. Pour finir, en juin 1979, ils prirent une décision fondée sur la Bible. Ils dirent aux médecins qu’ils n’amèneraient plus Isabella pour lui faire faire des transfusions, mais ils précisèrent qu’ils accepteraient toute autre thérapeutique. Les Oneda continuèrent à prendre le plus grand soin de la santé d’Isabella. Ils demandèrent même à des médecins du nord de l’Italie, de Suisse, d’Allemagne et de France de soigner leur enfant.
Le service social de la clinique de Cagliari fit appel auprès du tribunal pour enfants qui la chargea de s’adresser aux autorités civiles afin qu’elles veillent à ce que l’enfant soit amenée à la clinique. Plusieurs fois, la clinique contacta les autorités de Sarroch et un policier local vint chercher la fillette. C’est ainsi que l’on administra de force des transfusions sanguines à la petite Isabella.
Cependant, depuis la mi-mars jusqu’au 2 juillet 1980, la clinique négligea de faire venir Isabella pour qu’elle subisse des transfusions. Pendant cette période, les Oneda connurent le bonheur d’avoir un deuxième enfant, une fille en bonne santé à qui ils donnèrent amour et soin comme à la première fillette. Puis, le 2 juillet 1980, la police vint rechercher Isabella pour l’emmener à la clinique où elle mourut pendant qu’on lui faisait une transfusion.
Une atroce injustice
Vous pensez peut-être que cette histoire se termine ainsi, tristement. Pourtant, c’est alors qu’une atroce injustice a commencé à se produire. Le 5 juillet 1980, les Oneda furent arrêtés et inculpés d’homicide volontaire — de meurtre! C’était incroyable. Ce couple de chrétiens qui étaient déjà profondément affligés par la perte de leur première fillette devaient maintenant supporter d’être accusés d’avoir désiré la mort de leur enfant.
Ils passèrent vingt mois en détention préventive. Malgré un certificat du médecin disant que Giuseppe Oneda était malade, on refusa de les laisser en liberté provisoire en attendant le procès. Cette mesure cruelle les empêcha de prendre soin de leur seconde fille. Le jugement eut enfin lieu. Le 10 mars 1982, les Oneda furent déclarés coupables et condamnés à quatorze ans de prison ferme suivis de trois années de liberté surveillée. Vous vous rendez compte: une condamnation plus dure que celle qui frappe bien des terroristes!
Les faits révèlent l’injustice
Tous ceux qui tiennent à ce que la liberté et les droits de l’homme soient respectés devraient réfléchir sérieusement à ce qui s’est passé dans ce cas.
Dans son mémoire adressé au juge d’instruction, le directeur de la clinique déclarait: “La clinique a diagnostiqué de nombreux cas de thalassémie très grave (près de 700). Nombre d’enfants ne sont jamais revenus dans ce centre de soins ou y reviennent de manière sporadique. La clinique ne dispose pas d’assez de personnel pour porter seulement assistance aux malades.” Si cette clinique laisse sortir des centaines de petits enfants atteints de cette maladie sans les soigner et, en plus, ne suit pas exactement les instructions données par le tribunal au sujet d’Isabella, comment les Oneda pourraient-ils être tenus pour responsables de la mort de la fillette? Laissez répondre votre sens de l’humanité et de la justice.
Au cours du jugement de nombreux détails intéressants furent révélés. Les experts médicaux désignés par les magistrats montrèrent que 1) “l’état clinique” de la maladie d’Isabella “en était au stade terminal”, c’est-à-dire qu’elle était sur le point de mourir; 2) même les transfusions pratiquées pendant les semaines ou les mois qui ont précédé sa mort “n’auraient pu avoir aucune utilité sur le plan clinique, ni aucun rôle médico-légal dans la modification de l’évolution fatale de la maladie”.
Vous savez peut-être que les médecins admettent également que nombreuses sont les preuves montrant que les transfusions sanguines ont souvent des conséquences graves et même mortelles. Pour nombre de patients très anémiés, le fer s’accumule dans le corps, phénomène dangereux qui peut être aggravé par les transfusions.
Le professeur Edoardo Storti (directeur de l’Institut d’hématologie de l’université de Pavie) tira les conclusions suivantes du rapport d’autopsie d’Isabella: “La mort a été causée par la réunion de plusieurs facteurs: a) anémie grave; b) important dépôt de fer dans le tissu des organes vitaux, en particulier dans le myocarde. (...) J’estime également que l’on peut douter qu’une thérapie, même la plus vigoureuse et la plus moderne, aurait pu modifier sensiblement l’évolution de la maladie.”
Qui plus est, lorsqu’un patient a un taux d’hémoglobine inférieur à cinq grammes par litre et des problèmes cardiaques, comme c’était le cas pour Isabella, les transfusions sanguines sont généralement déconseillées, car elles produisent souvent un œdème aigu du poumon qui peut être fatal. L’autopsie d’Isabella a révélé qu’elle était atteinte d’un œdème pulmonaire.
Vu ces faits, pourquoi les Oneda ont-ils été accusés d’homicide? Le professeur Angelo Fiori (directeur de l’Institut de médecine légale de l’Université catholique du Sacré-Cœur, à Rome) souligna ceci: “Affirmer que l’évolution défavorable est liée à la conduite des parents (...) est sans aucun doute dépourvu de fondement et risqué.”
Un autre expert médico-légal déclara que l’affirmation selon laquelle Isabella était morte parce qu’elle n’avait pas reçu de transfusions était “aussi absurde que de dire qu’une personne atteinte d’une tumeur, et franchissant le stade terminal de sa maladie, était morte parce qu’on ne lui avait pas donné de vitamines”.
Réactions publiques
Bien qu’ils aient fait appel, les parents restent derrière les barreaux. Cependant, de nombreuses personnes ont exprimé leur inquiétude à propos de cette injustice.
Dans le numéro du 11 mars 1982 du journal Il Tempo, on pouvait lire: “D’après ce qu’il a entendu dire au tribunal, le docteur Alessandro Bucarelli, médecin légiste, a déclaré qu’il n’était pas possible, dans l’état actuel de l’enquête, d’établir un lien de cause à effet entre le manque de transfusions et la mort de la fillette atteinte de thalassémie.” Ensuite, l’article faisait cette remarque: “Normalement, quand il y a un doute, on acquitte la personne ou on demande un supplément d’enquête. Cette fois-ci, les accusés ont été condamnés malgré l’existence d’un doute.” Pourquoi?
Les personnes impartiales qui sont au courant des faits se demandent pourquoi les doutes exprimés par les experts cités comme témoins par la cour elle-même n’ont pas été pris en considération. Pourquoi la cour a-t-elle refusé d’envisager une autre hypothèse en ce qui concerne la cause de la mort? Pourquoi n’a-t-elle pas voulu écouter les experts cités par la défense? Pourquoi la cour a-t-elle concentré son attention sur les parents qui n’avaient fait que rechercher en toute bonne foi un traitement compatible avec leurs croyances religieuses? Oui, POURQUOI?
Il tempo cita les propos d’un homme de loi canadien qui a assisté au jugement: “Autrefois, c’était l’Inquisition qui persécutait ceux qui n’appartenaient pas à l’Église. Maintenant, les persécutions sont un peu dissimulées, mais en réalité c’est toujours pareil. En Sardaigne, des centaines d’enfants meurent avec ou sans transfusions sanguines. Les traités de médecine montrent qu’il n’existe pas de remède efficace pour cette maladie. Or le procureur de la République a prétendu nous indiquer un remède, mais ce n’était qu’un prétexte pour condamner ce couple respectueux qui était seulement responsable d’avoir eu un enfant atteint d’une maladie que personne ne peut guérir. En fait, la fillette est morte alors qu’on lui faisait une transfusion sanguine sans l’autorisation des parents.”
Un journal de Turin, Stampa Sera, déclara: “Ce qu’on espère maintenant, c’est qu’en appel la sentence sera annulée. En fait, la loi ne prévoit même pas de condamnation à quatorze ans de prison pour les terroristes, (...) qui portent sur leurs épaules la responsabilité de sept meurtres. On se pose cette question: Pourquoi la cour d’assises de Cagliari a-t-elle été si dure pour les Oneda? Car, tous les ans, en Sardaigne, des dizaines et des dizaines d’enfants meurent de thalassémie, avec ou sans transfusions. (...) Enfin, il est grotesque que les autorités civiles chargées par le juge de veiller à ce que la petite Isabella reçoive des transfusions n’aient été poursuivies d’aucune manière.”
Dans d’autres pays, la presse s’est aussi demandé si justice avait été faite. Un journal espagnol de Madrid, El País, observa qu’il s’agissait d’une “maladie incurable: la thalassémie” et que la vie de l’enfant qui en était atteint “peut être prolongée, mais pour peu de temps seulement, par maintes transfusions sanguines”. Il ajoutait: “Ce que personne n’a pardonné, c’est que les juges ont été sans pitié pour les parents, (...) comme s’ils avaient tué Isabella avec une arme à feu par un meurtre pleinement prémédité. On ne leur a pas accordé la moindre circonstance atténuante, chose qui est attribuée même aux plus féroces criminels dans ce pays.” — 12 mars 1982.
Vos droits sont menacés
La loi de votre pays, comme celle d’Italie, dit certainement que vous avez le droit de décider si vous accepterez ou non un traitement médical. C’est compréhensible. Prenons l’exemple de l’avortement. Quelle que soit votre opinion sur cet acte, que penseriez-vous si des médecins vous faisaient envoyer un policier pour vous forcer à subir un avortement contre votre volonté?
Il est également admis dans le monde entier que les parents devraient avoir leur mot à dire sur la manière dont on s’occupe de leurs enfants. Si les parents savent que l’enfant souffre d’une maladie incurable et qu’un certain traitement pourrait causer prématurément sa mort, devrait-on forcer les parents à accepter ce traitement en leur envoyant les agents de police?
En Écosse, A. Farr, maître de conférences et spécialiste des techniques de transfusions, écrivit à propos des transfusions forcées:
“L’État s’empare graduellement du droit pour l’individu de prendre ses décisions. C’est de cette manière que les pays libres cessent de l’être et deviennent des États totalitaires. (...) Ce n’est pas une spéculation extravagante: La liberté est un bien précieux et rare qu’il faut protéger dans les pays où elle existe.”
La constitution italienne garantit la liberté, sans doute comme la constitution de votre pays. Mais quand la liberté religieuse et les droits des parents sont bafoués, c’est que la liberté et les droits de tous les citoyens risquent d’être menacés. C’est ce qui est arrivé en Sardaigne. Des parents chrétiens aimants sont tous deux en prison et sont plus mal traités que nombre de gens qui ont commis des meurtres avec préméditation. Tous ceux qui aiment la liberté devraient être consternés en apprenant cette affreuse injustice et devraient s’intéresser aux résultats de l’appel qui a été introduit. Le périodique Réveillez-vous! vous tiendra au courant de l’évolution de cette affaire importante.