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Les juristes essuient le feu des critiquesRéveillez-vous ! 1979 | 8 juillet
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Grande-Bretagne, que seuls les très pauvres ou les très riches ont accès aux tribunaux. Quant aux gens normaux, n’ayant pas droit à l’aide judiciaire, ils découvrent rapidement que les services juridiques sont au-dessus de leurs moyens.
La lenteur et la complexité des procédures judiciaires
Devant la multiplication des lois dans une société de plus en plus complexe, les problèmes s’accumulent, et les instances judiciaires sont sollicitées comme jamais elles ne l’ont été. Les lenteurs de l’appareil judiciaire découragent ses utilisateurs, à tel point que Warren Burger, président de la Cour suprême des États-Unis, a dit: Tout comme les gens qui souffrent, ceux qui rencontrent des problèmes veulent être soulagés le plus vite et le moins cher possible.” Mais cet objectif est rarement atteint, ce qui ne fait qu’ajouter aux critiques de la loi et des institutions juridiques.
Un avocat qui fut autrefois conseiller à la Maison Blanche, Fred Dutton, attira l’attention sur un autre motif de plainte reproduit en ces termes dans la revue Time: “Les avocats sont payés pour compliquer et entretenir les litiges, pour tout ramener à des questions techniques.” L’article citait l’exemple d’un procès portant sur une question d’étiquetage de beurre de cacahuète, procès qui s’était prolongé douze ans et qui représentait 75 000 pages de documents et 24 000 pages de compte rendu dactylographié. Si tous les avocats n’usent pas de cette tactique, il y a tout de même suffisamment d’abus graves pour faire naître un malaise qui nuit à toute la profession.
Certains avocats prennent trop de cas en même temps; aussi n’entreprennent-ils de démarches que lorsque le client réclame parce qu’il ne voit pas avancer son affaire. De l’aveu même d’un membre du barreau, “si le client harcèle son avocat, le temps gagné peut s’élever à plusieurs mois”. Si votre avocat tombe dans la catégorie décrite ci-dessus et que vous souhaitiez faire instruire rapidement votre affaire, il vous faudra donc peut-être harceler votre défenseur. Mais, d’un autre côté, il se peut également que celui-ci réclame une meilleure collaboration de votre part pour expédier plus rapidement votre cas. Lui avez-vous fourni tous les renseignements utiles? Réglez-vous ses honoraires aux échéances prévues?
Un avocat honnête et qui pratique des tarifs raisonnables tout en défendant avec efficacité ses clients fait honneur à sa profession. En outre, ses clients peuvent se reposer entièrement sur lui. Toutefois, même un tel homme doit opérer dans le cadre d’un système juridique imparfait qui, par sa nature même, peut être à l’origine d’injustices parfaitement légales.
La confrontation des parties adverses: un système qui entrave la justice
Avez-vous jamais ressenti une impression de dépit à la nouvelle qu’un tribunal avait certainement commis une erreur judiciaire? L’un des facteurs qui y contribuent dans le droit anglo-américain est certainement le principe de la confrontation des parties adverses. [Au cours du procès, chaque partie formule ses arguments et possède le droit de procéder directement au contre-interrogatoire des témoins de la partie adverse. Chacun des plaideurs s’efforce de fournir les preuves qui parlent dans son sens et de réfuter celles de la partie adverse.] Ce système part de l’idée que la vérité et la justice se dégageront de la confrontation des points de vue opposés. Mais voici ce qu’en dit un avocat new-yorkais, Abraham Pomerantz:
“Ce système dont nous sommes si fiers est en réalité extrêmement pernicieux, car il est conçu non pour dévoiler, mais pour contrecarrer la vérité. Comme chacun des plaideurs ne mentionne que les arguments qui l’arrangent et passe sous silence les autres, il s’ensuit que les faits sont tellement dénaturés qu’on y perd son latin et que c’est le plus malin qui gagne.”
Chaque partie à l’instance est défendue par un avocat. Mais, dans la plupart des cas, personne n’a entièrement tort ni entièrement raison. Or, ce principe de la confrontation des parties adverses tend à escamoter tout aspect moral d’un procès et il incite les avocats à plaider pour quiconque règle leurs honoraires.
“Ainsi, écrit J. Auerbach, professeur de droit à l’université Wellesley, alors que les avocats font partie d’une profession publique revêtue de lourdes responsabilités dans notre société, ils proclament que leur obligation suprême est de servir les intérêts de leur client, bien qu’en fait ils s’intéressent surtout aux émoluments versés par ce client.” Ce professeur ajoute que là où le bât blesse dans ce système de défense, c’est qu’il n’est “pas conçu pour envisager le bien de la société, hormis cette idée implicite que tout procès gagné est bon pour elle”.
Ceci explique pourquoi certaines décisions judiciaires peuvent sembler absurdes au profane. Tous les moyens qui permettent à un prévenu de défendre ses chances jusqu’au bout procèdent d’un noble idéal. Mais un avocat habile peut les détourner pour plaider en faveur de coupables et de gens malhonnêtes. On ne saurait tenir les juristes entièrement responsables de ce paradoxe qui apparaît dans les systèmes juridiques élaborés par l’homme. Partant d’un idéal de justice, on aboutit souvent dans la réalité à la négation du principe du bien et du mal au profit de ce qui est “légal” ou pas. Voici la suite du constat dressé par le professeur Auerbach sur ce qu’il voit autour de lui:
“Chaque année, près de 100 000 étudiants [américains] apprennent à penser en avocats. Enseigner à un individu qui a réfléchi pendant 21 ans comme un être humain à penser comme un avocat n’est pas une mince affaire. Cela implique que l’on efface toute conviction que le bien et le mal ont un sens plus large que celui qui est défini par la procédure et le code juridiques.”
Un dilemme pour les avocats
Pareille attitude sur les valeurs morales ne manque pas de poser un cas de conscience aux étudiants qui reçoivent une telle formation juridique. “Je suis étonné que [la faculté de droit] de Harvard n’accorde qu’une place si minime aux principes éthiques dans l’enseignement des futurs juristes”, écrivit un étudiant en droit dans un essai publié dans le New York Times. Il ajoutait: “Aussi bien dans la déontologie de notre profession qu’en ce qui concerne notre morale personnelle, nous sommes laissés au jugement de notre instinct. Pour ma part, j’avoue ne pas avoir consacré beaucoup d’attention à cet instinct.”
Un autre aspect de ce dilemme ressort des propos tenus par S. Wishman, un avocat new-yorkais: “Aussi loin que l’on remonte dans le temps, la tradition de la profession est qu’il faut plaider le plus énergiquement et le plus habilement possible pour gagner la cause de son client. Moins celui-ci en vaut la peine, plus noble est l’effort.”
Les avocats qui souscrivent à de tels principes défendront peut-être des gens dont ils savent pertinemment que ce sont des criminels de la pire espèce, ou bien ils plaideront une affaire ou défendront les intérêts de clients véreux qui poursuivent des objectifs plus que douteux. “Beaucoup de mes clients sont des monstres qui ont commis des atrocités, reconnut Maître Wishman. Bien qu’ils ne soient pas coupables du délit dont on les accuse, presque tous mes clients ont quelque chose à se reprocher.” Mais, parce qu’ils ont bénéficié d’un “bon” avocat, nombre de ces malfaiteurs sont libres d’exercer leurs coupables activités.
Faisant allusion à l’un de ces brillants avocats, un procureur du Texas déclara: “Pour être excellent, il l’est. Mais c’est grâce à lui qu’il y a dans notre État une bonne vingtaine de malfaiteurs qui courent en liberté, de ces gens qui vous abattent un homme sans sourciller. Cet homme est un véritable danger public.”
L’avocat mis en cause par ces propos eut une réponse qui illustre la faiblesse morale et l’imperfection des systèmes juridiques actuels. “Je dors sur mes deux oreilles, déclara-t-il. Mon travail ne consiste pas à être juge et juré, mais à défendre de mon mieux un inculpé.” Cependant, tous les avocats n’esquivent pas aussi légèrement un cas de conscience aussi grave.
Néanmoins, nombreux sont ceux qui se comportent comme si la meilleure solution consistait à éviter de porter tout jugement de valeur sur les affaires qu’ils traitent, en laissant à la procédure juridique le soin de définir en dernier ressort ce qui est bien et ce qui est mal. L’un des cas de conscience qui se présentent dans la profession est de savoir si, avec la connaissance qu’un avocat possède du dossier de son client, il devrait prendre quand même sa défense, alors qu’il le sait dans son tort.
Chez certains juristes on observe une tendance qui consiste à recourir à tous les moyens dilatoires qu’il est possible d’invoquer en faveur d’un client, peu importe que celui-ci soit coupable ou non. À ceci un avocat répliquera peut-être: “Pourquoi nous jeter la pierre, alors que nous ne faisons que tirer parti des procédures prévues par la loi?” Une fois de plus, nous sommes renvoyés au cas de conscience qui se pose à tout membre d’une profession juridique.
Ajoutons, pour être honnêtes, que ces règles de forme ont indéniablement épargné une erreur judiciaire à beaucoup d’innocents. Parfois, c’est uniquement parce qu’un avocat était pleinement convaincu de l’innocence de son client qu’il a recouru à tous les artifices juridiques pour le défendre. S’il s’en était abstenu, peut-être le défendeur innocent aurait-il subi une condamnation.
Il n’en reste pas moins vrai que la balance de la justice est telle que l’a décrite Harry Blackmun, l’un des magistrats de la Cour suprême des États-Unis: “L’équilibre n’est pas parfait. L’instrument va de travers.” Ce magistrat invita instamment tous les membres d’une profession juridique à s’engager de nouveau à travailler à “ce qui est juste et moral autant qu’à ce qui est légal, sans plus”.
Dans le même temps, certains ont peut-être dû recourir aux multiples services rendus par la loi et les juristes. Comment tirer le meilleur parti des dispositions légales? C’est ce que nous allons examiner à présent.
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“Il faut que je trouve un avocat!”Réveillez-vous ! 1979 | 8 juillet
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“Il faut que je trouve un avocat!”
SUPPOSONS qu’un jour vous butiez sur un problème juridique. Quelle serait alors votre réaction? Sans doute ne mettriez-vous pas longtemps à comprendre qu’il vous faut l’aide d’un spécialiste. Prenons le cas d’une voiture volée que l’on retrouve plus tard accidentée. Le voleur est en prison, mais qui va payer le garagiste? Si le propriétaire du véhicule a dû louer une voiture dans l’intervalle, à qui vont également incomber ces frais?
Un autre cas: Votre fils est arrêté par erreur. Comment éviter une procédure d’enquête? Et comment démontrer qu’il n’est pas coupable?
Il y a aussi le cas d’une femme abandonnée par son conjoint. Comment peut-elle obtenir une pension alimentaire pour elle et pour ses enfants? Si le divorce est en cours, comment va-t-elle s’assurer que le patrimoine familial, y compris le domicile, sera équitablement réparti?
Dernier exemple: Un homme meurt, laissant derrière lui une femme et trois enfants. La petite affaire qu’il dirigeait est reprise par l’ancien contremaître, mais elle ne tarde pas à devenir déficitaire. Que doit faire le conjoint survivant pour éviter que l’affaire ainsi que les biens de succession du mari ne soient engloutis par les dettes?
Voilà des problèmes qui n’en finissent plus, qu’on l’ait cherché ou non. Celui qui n’a pas su s’entourer de précautions risque d’être acculé à une situation dramatique. Or, à tous les cas que nous venons d’évoquer, un avocat compétent trouvera une solution, de même qu’à bien d’autres problèmes juridiques auxquels on peut se trouver confronté à cause de la complexité du monde actuel.
L’utilité d’un avocat
Après avoir passé plusieurs années en faculté de droit à se familiariser avec le système juridique, un avocat
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