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‘Je n’ai consulté ni la chair ni le sang’La Tour de Garde 1974 | 1er janvier
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comprend mieux son entière dépendance de Jéhovah et la nécessité de s’appuyer régulièrement sur lui, ce que j’ai fait. Je recherchais ses conseils dans la prière, et je ne lui ai jamais demandé son aide en vain.
Comme je n’avais pas le permis de travail exigé par les autorités allemandes, je courais le risque d’être déporté en Allemagne pour y accomplir un travail forcé. Toutefois, une indication sur ma carte d’identité m’a permis plus d’une fois de me sortir de cette mauvaise passe. Ma profession indiquée était “missionnaire”. Un jour, lors d’un contrôle effectué par des militaires, je fus interpellé alors que je transportais des publications bibliques interdites ; un soldat m’a demandé mon permis. Je lui ai répondu qu’en ma qualité de missionnaire j’étais dispensé de cette autorisation. Un autre soldat a convenu que je n’en avais pas besoin. Alors il m’a demandé ce que je transportais. C’était le manuel biblique “Enfants”, imprimé dans la clandestinité à Bruxelles. Je lui ai répondu qu’il s’agissait d’un livre religieux tout en attirant son attention sur les citations bibliques ; il a été satisfait.
Je ne pouvais obtenir des autorités les tickets de ravitaillement parce que je ne pouvais prendre le risque de me faire inscrire à la mairie en Belgique. Toutefois, je ne mourais pas de faim, car l’amour de mes frères chrétiens était remarquable. Bien qu’ils n’eussent eux-mêmes que le strict nécessaire, ils faisaient le sacrifice de quelques tickets, les remettaient aux témoins chargés de les rassembler pour le compte de leurs frères dans la foi, qui se cachaient pour échapper à la Gestapo. Pour dîner, une bonne carotte et un morceau de pain me rendaient heureux. J’avais cultivé l’attitude d’esprit exprimée par l’apôtre Paul : “J’ai appris à me suffire à moi-même, en quelque situation que je sois.” (Phil. 4:11). Je ne logeais pas toujours au même endroit ; parfois je dormais dans le foin, sur une paillasse posée sur le sol ou sur un banc dans une gare.
Ma bicyclette a toujours été le plus sûr des moyens de transport parce qu’elle me permettait d’éviter plus facilement la foule et d’échapper aux recherches. Évidemment, ce n’était pas toujours facile de parcourir ainsi cent kilomètres ou plus, surtout dans les Ardennes durant les hivers rigoureux, sur des routes enneigées ou verglacées. Mais nous étions très heureux de porter la nourriture spirituelle à nos frères dans la foi, et leur reconnaissance nous récompensait largement des difficultés et des risques auxquels nous étions exposés. Jéhovah a béni les efforts de son peuple. En effet, de cent que nous étions en Belgique en 1940, nous étions déjà passés à plus de 600 à la fin de la guerre.
Fin de la clandestinité
Après la fin de l’occupation j’ai été chargé d’aider à réorganiser les congrégations du peuple de Jéhovah. Cette œuvre achevée, j’ai été invité à choisir une région où il n’y avait pas de prédicateurs pour y servir en qualité de pionnier spécial. J’ai choisi la ville d’Arlon, forteresse jésuite, au sud des Ardennes. Je m’y suis rendu rien qu’avec ma bicyclette, deux valises et un phonographe portatif pour faire entendre les disques sur lesquels étaient enregistrés des discours bibliques.
J’ai commencé à visiter les habitants. Juste à ce moment, le périodique Consolation (aujourd’hui Réveillez-vous !) faisait paraître des articles démasquant le clergé. Inutile de dire que mes activités ont mis la ville en effervescence ; mais les années de guerre m’avaient endurci ; aussi étais-je déterminé à poursuivre la prédication. Des progrès ont été réalisés, et finalement une famille s’intéressant au message a offert sa maison pour l’étude de La Tour de Garde en groupe.
De nombreuses femmes de la région ont manifesté leur intérêt pour la Bible en acceptant une étude biblique. C’est pourquoi j’ai demandé à une de mes sœurs dans la foi, veuve et prédicateur à plein temps, de m’aider à conduire ces études bibliques. Plus tard, nous nous sommes mariés, et elle m’a accompagné dans le ministère. À quarante-cinq ans, elle a appris à monter à bicyclette pour accomplir son service de pionnier. La bicyclette est restée notre moyen de transport jusqu’en 1958. Nous avons pu aider un grand nombre de personnes dans cette région, et aujourd’hui il y a une congrégation prospère dans cette ville et une autre un peu plus loin.
Plus tard, j’ai été chargé par la Société de visiter les congrégations en qualité de surveillant de circonscription. Outre trois provinces belges, je devais visiter le Grand-Duché de Luxembourg, où l’opposition était particulièrement violente. Les autorités nous rendaient la vie dure par de fréquentes arrestations. Chaque fois, elles confisquaient nos bicyclettes et nos serviettes avec nos livres. Nos frères dans la foi s’arrangeaient pour nous fournir un nouvel équipement, et nous repartions de plus belle. Finalement, l’affaire a été portée devant la cour suprême du Luxembourg, qui a rendu un jugement en notre faveur. Tous nos biens confisqués nous ont été rendus.
Plus tard, invités à choisir une autre région où le besoin en prédicateurs était plus grand, nous avons décidé d’aller à Marche-en-Famenne, également dans les Ardennes. Nous sommes partis, persuadés que nous trouverions un logement pour la nuit. Nous nous étions trompés. Nous retournions à la gare quand, soudain, une femme s’est avancée vers nous et nous a demandé si c’était nous qui étions en quête d’un logement ; elle avait justement ce qu’il nous fallait. Ce fut pour nous un nouveau départ.
À mesure que les années passaient, nous avons pu commencer des études bibliques ; mais que de persévérance il nous a fallu : huit années de dur travail avant que notre cuisine devienne trop petite pour nos réunions ! Cependant, le fondement avait été posé, et la congrégation s’est développée. Aussi, en 1967, avons-nous été envoyés dans un autre territoire, — Aywaille et ses environs, non loin de Liège.
Une fois encore, nous avons eu le privilège de contribuer à la formation d’une congrégation en partant de rien. Finalement, la congrégation est devenue assez prospère pour s’établir dans un local convenable en 1972.
Au début de 1971, la santé de ma femme a décliné subitement. Elle était atteinte d’un cancer, sans espoir de guérison. Elle avait été ma fidèle compagne pendant vingt-cinq ans, partageant avec moi les afflictions et les sacrifices, afin que la lumière de la vérité pût briller au Luxembourg.
À l’exemple de l’apôtre Paul, qui a connu de nombreuses difficultés, mais avait le sentiment d’être approuvé par Jéhovah, je suis heureux d’avoir été durant tant d’années dans le ministère à plein temps. Je n’ai aucun regret de n’avoir pas consulté la chair et le sang avant de prendre la décision de servir Jéhovah de toutes mes forces. Si c’était à refaire, prenant ma bicyclette, je partirais prêcher la Parole de Dieu, comme en 1936. Avec générosité, Jéhovah a pourvu à tous mes besoins. Mon désir est de rester fidèlement attaché à la tâche qu’il m’a confiée.
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Questions de lecteursLa Tour de Garde 1974 | 1er janvier
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Questions de lecteurs
● Que signifie le mot “inconduite” que l’on trouve dans Galates 5:19 (NW) ?
Certains pourraient prétendre que ce terme (qui vient du grec asélgéïa) désigne une conduite immorale, mais pas très grave. Cependant, à en juger par les Écritures et les anciens écrits grecs profanes dans lesquels on trouve ce mot, ce n’est pas le cas. L’emploi de ce terme ne se limite pas à des actes d’impureté sexuelle. Plutôt que de désigner une mauvaise conduite mineure, il concerne en fait des actes reflétant une attitude effrontée qui dédaigne, voire méprise, les principes, les lois et l’autorité. L’inconduite ne résulte donc pas essentiellement d’une faiblesse, mais d’un manque de respect, d’une attitude insolente ou impudique.
Cette pensée est soutenue par les lexiques grecs, qui définissent asélgéïa (et d’autres formes de ce
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