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La montée du nazismeRéveillez-vous ! 1985 | 8 août
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par le traité de Versailles étaient à la fois écrasantes et injustes. De plus, leur gouvernement semblait manquer de poigne. La conjoncture économique empirait de semaine en semaine. Le contrecoup de la dépression mondiale avait jeté à la rue des millions de chômeurs. Une atmosphère lourde de désespoir et d’insécurité avait étouffé toute joie de vivre.
Par une habile campagne de propagande, le parti nazi a réussi à transformer les masses en un instrument disposé à exécuter ses projets politiques. Ses promesses alléchantes séduisaient la nation. Le national-socialisme exploitait pour son propre compte la crainte du communisme qui prévalait au sein du peuple. Il fournissait un nouvel exutoire au militarisme prussien. Qui plus est, il offrait aux jeunes camaraderie, émotions, aventures, sans parler de l’ivresse de contribuer à la reconstruction d’une Allemagne forte.
Le 28 avril 1939, six ans seulement après son arrivée au pouvoir, Hitler a évoqué ses succès dans un discours. Entre autres choses, il se vantait d’avoir rétabli l’ordre, relancé la production, résorbé le chômage et secoué les contraintes du traité de Versailles. Ce à quoi il ajoutait: “Les provinces qui nous ont été volées en 1919, je les ai rendues au Reich (...). J’ai restauré l’unité millénaire du peuple allemand (...). Je l’ai fait sans verser le sang et, partant, sans soumettre mon peuple, ni aucun autre, aux malheurs de la guerre.”
Dans son livre Anmerkungen zu Hitler (Remarques sur Hitler), Sebastian Haffner expliquait que pour les Allemands “Hitler était un véritable prodige, ‘un envoyé de Dieu’”. Grâce aux succès de Hitler et à une propagande astucieuse, l’emprise que le parti nazi exerçait sur le peuple a grandi au point de se charger d’un accent religieux. Le soutien des visées du parti n’allait pas tarder à devenir un devoir “sacré”.
Voilà qui nous aide à mieux comprendre ce que William Shirer écrivait dans son livre Le cauchemar (angl.). “La frénésie des masses m’avait déjà fasciné, dit-il, avant même que j’aie aperçu le dictateur pour la première fois (...). Quand il est apparu au balcon pour saluer, les gens sont devenus comme fous. Plusieurs femmes se sont évanouies. Des hommes et des femmes ont été piétinés par la foule, qui se pressait pour voir de plus près son messie. Car c’est bien ce qu’il semblait être pour eux tous.”
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Un retour est-il à craindre?Réveillez-vous ! 1985 | 8 août
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Un retour est-il à craindre?
IL EST difficile de déterminer avec précision le nombre total des néo-nazis en Allemagne. Cependant, d’après un organisme qui surveille les activités des mouvements extrémistes en République fédérale, les organisations d’extrême droite pourraient réunir plus de 20 000 adhérents dans ce pays. Tous ces militants sont divisés en une multitude de groupuscules qui, dans leur immense majorité, ne dépassent pas quelques centaines de membres.
Voilà qui semble démentir l’idée d’une réapparition en force du nazisme. En effet, qu’aurait été le nazisme sans un chef de la carrure de Hitler, un homme capable de tenir toutes les factions à sa botte? Jusqu’ici, aucun messie politique n’a eu assez d’envergure pour jouer ce rôle, pas même Michael Kühnen, l’un des principaux néo-nazis allemands. Pourtant, un disciple de Kühnen le présentait comme “le bras droit du Führer Adolf Hitler sur la terre”. À propos de Hitler il déclarait encore: “Le Führer est aussi saint pour nous que Jésus l’est pour les chrétiens.”
Il faut dire aussi que la situation de l’Allemagne est très différente aujourd’hui de ce qu’elle était avant l’avènement de Hitler. Le chômage est toujours là, mais il est loin d’atteindre les proportions du début des années trente, où il touchait jusqu’à 30 pour cent de la population active. À présent, le taux d’inflation paraît raisonnable en regard de celui des années vingt, où en deux ans un article pouvait passer de 35 marks à 1 200 milliards de marks. Quant au patriotisme et au militarisme, ils sont pour ainsi dire inexistants. En outre, la constitution allemande offre maintenant des garanties contre le rétablissement d’une dictature.
Malgré tout, beaucoup sont d’avis qu’il ne faut pas sous-estimer le danger que représentent les mouvements néo-nazis. Ainsi, Karl-Dietrich Bracher, professeur d’histoire à l’université de Bonn, rappelait: “Dans les années vingt aussi il n’y avait que des groupuscules, et pas d’organisation importante.” Par ailleurs, comme en témoignent les actes de terrorisme perpétrés dans de nombreux pays, une poignée d’individus voués corps et âme à une cause sont en mesure de provoquer des ravages tout à fait disproportionnés à leur nombre.
Le péril nazi dans le monde
Au début de l’année, Michael Kühnen a été condamné à plus de trois ans de prison
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