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Hitler: disparu, mais pas oubliéRéveillez-vous ! 1985 | 8 août
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Hitler: disparu, mais pas oublié
VENDREDI 26 septembre 1980, 22 h 15. À Munich, dans le sud de l’Allemagne, une journée chaude et ensoleillée a cédé la place à la fraîcheur du soir. La foule se presse vers les sorties des gigantesques chapiteaux dressés pour la grande fête de la bière. Soudain, un éclair aveuglant jaillit près d’une des portes principales, suivi d’une violente déflagration. Bilan: 13 morts et plus de 200 blessés.
L’enquête révélera que l’auteur de l’attentat fréquentait les milieux néo-nazis. À peine huit semaines auparavant, le terrorisme d’extrême droite avait tué plus de 80 personnes dans la gare de Bologne, en Italie. Parallèlement à cela, la France était secouée par la plus sanglante vague d’antisémitisme qu’elle avait connue depuis la guerre.
Dans l’esprit de l’homme de la rue, les termes nazisme et néo-nazisme évoquent presque toujours le visage d’Adolf Hitler. Par voie de conséquence, les drames que nous venons de rappeler ont maintenu ce personnage en vie à travers les années, du moins dans les médias. Qui plus est, ces nouvelles atrocités ont été perpétrées avant que les premières aient eu le temps de se faire oublier. Ainsi, le journal allemand Nürnberger Nachrichten expliquait qu’en décembre 1983, 35 personnes, dont 10 juges et procureurs, s’employaient encore “à rassembler, à collationner, à expertiser et à produire en justice tous les documents qu’ils pouvaient trouver sur les crimes nazis [commis du temps de Hitler]”. Plus de 1 700 procès étaient en instance et 129 en attente.
Même si ces activités échappent à l’attention de la plupart des gens, d’autres événements ont réussi à déterrer des souvenirs dont des millions d’hommes et de femmes se seraient bien passés. Songeons à la série Holocauste, qui a été diffusée à la télévision il y a quelques années, ou à la prétendue découverte des carnets intimes de Hitler par une grande revue allemande en 1983. Cette dernière nouvelle, que certains avaient accueillie avec scepticisme, s’est surtout répandue lorsqu’on s’est aperçu que les carnets en question étaient des faux. Écœuré autant que déçu, un Allemand s’est exclamé: “Hitler ne cessera-t-il jamais de nous ridiculiser?”
Rien d’étonnant donc à ce que le journal canadien Toronto Star ait fait cette remarque: “Nous sommes toujours horrifiés, et cependant fascinés, pour ne pas dire hypnotisés, par la personne du Führer et par l’État dont il était le chef.” Selon un journal allemand, “le flot d’écrits consacrés au IIIe Reich semble grossir à mesure que le temps passe. Plus de 20 000 ouvrages ont d’ores et déjà été publiés sur ce sujet, et les experts eux-mêmes sont loin de les connaître tous”.
Pourquoi le monde est-il ainsi subjugué par Hitler et par le IIIe Reich? Ce phénomène qui, à en croire la revue Der Spiegel, s’allie à un “regain d’activité” des groupes néo-nazis, serait-il le présage d’une nouvelle répétition de l’Histoire? Dans certains de leurs organes, les néo-nazis se targuent de ne pas être “les vestiges d’hier, mais l’avant-garde de demain”. Ce n’est donc pas sans raison que plus d’un s’interroge sur l’éventualité d’un retour du nazisme.
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La montée du nazismeRéveillez-vous ! 1985 | 8 août
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La montée du nazisme
“COMMENT un régime aussi barbare que le IIIe Reich a-t-il pu s’installer dans un des pays à l’économie la plus évoluée et à la culture la plus riche du monde?” Cette question troublante, c’est un historien, J. Noakes, qui la soulevait dans la revue History Today. Pour y répondre, il est nécessaire de se replacer dans le contexte.
Le parti nazi n’a pas été créé par Adolf Hitler. En 1919, Anton Drexler, un serrurier munichois, fonde le Deutsche Arbeiterpartei (Parti ouvrier allemand). Un an plus tard, son mouvement change de nom pour devenir le Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei (Parti national-socialiste des travailleurs allemands). En 1921, Hitler prendra la tête de cette formation. Plus tard, Drexler se retirera pour exprimer son désaccord avec lui. C’est une abréviation du premier mot de l’appellation allemande du parti qui donnera le terme “nazi”.
En 1923, Hitler tente un coup d’État contre le gouvernement, mais il échoue. Cela lui vaudra d’être incarcéré. En prison, il écrira Mein Kampf (Mon combat), le livre dans lequel il définira la doctrine et les objectifs fondamentaux du parti national-socialiste. Son ultime ambition est, dit-il, “la nationalisation des masses”. Pour atteindre ce but, “aucun sacrifice social n’est trop lourd”. Qui plus est, d’après lui l’État se doit d’être “le gardien des mille ans à venir”.
Au début, Hitler et son parti ne sont pas pris au sérieux. Les discours grandiloquents du Führer amèneront même un écrivain allemand, Kurt Tucholsky, à déclarer: “L’homme n’existe pas: il n’est que par le bruit qu’il fait.” Cette observation traduisait sans doute la pensée générale. Pourtant, l’homme existait bel et bien, et il n’allait pas se contenter de faire du bruit.
Les facteurs qui ont conduit le nazisme au pouvoir
Les Allemands étaient désabusés par la défaite qu’ils avaient essuyée lors de la Première Guerre mondiale. À leurs yeux, les sanctions qui leur avaient été infligées par le traité de Versailles étaient à la fois écrasantes et injustes. De plus, leur gouvernement semblait manquer de poigne. La conjoncture économique empirait de semaine en semaine. Le contrecoup de la dépression mondiale avait jeté à la rue des millions de chômeurs. Une atmosphère lourde de désespoir et d’insécurité avait étouffé toute joie de vivre.
Par une habile campagne de propagande, le parti nazi a réussi à transformer les masses en un instrument disposé à exécuter ses projets politiques. Ses promesses alléchantes séduisaient la nation. Le national-socialisme exploitait pour son propre compte la crainte du communisme qui prévalait au sein du peuple. Il fournissait un nouvel exutoire au militarisme prussien. Qui plus est, il offrait aux jeunes camaraderie, émotions, aventures, sans parler de l’ivresse de contribuer à la reconstruction d’une Allemagne forte.
Le 28 avril 1939, six ans seulement après son arrivée au pouvoir, Hitler a évoqué ses succès dans un discours. Entre autres choses, il se vantait d’avoir rétabli l’ordre, relancé la production, résorbé le chômage et secoué les contraintes du traité de Versailles. Ce à quoi il ajoutait: “Les provinces qui nous ont été volées en 1919, je les ai rendues au Reich (...). J’ai restauré l’unité millénaire du peuple allemand (...). Je l’ai fait sans verser le sang et, partant, sans soumettre mon peuple, ni aucun autre, aux malheurs de la guerre.”
Dans son livre Anmerkungen zu Hitler (Remarques sur Hitler), Sebastian Haffner expliquait que pour les Allemands “Hitler était un véritable prodige, ‘un envoyé de Dieu’”. Grâce aux succès de Hitler et à une propagande astucieuse, l’emprise que le parti nazi exerçait sur le peuple a grandi au point de se charger d’un accent religieux. Le soutien des visées du parti n’allait pas tarder à devenir un devoir “sacré”.
Voilà qui nous aide à mieux comprendre ce que William Shirer écrivait dans son livre Le cauchemar (angl.). “La frénésie des masses m’avait déjà fasciné, dit-il, avant même que j’aie aperçu le dictateur pour la première fois (...). Quand il est apparu au balcon pour saluer, les gens sont devenus comme fous. Plusieurs femmes se sont évanouies. Des hommes et des femmes ont été piétinés par la foule, qui se pressait pour voir de plus près son messie. Car c’est bien ce qu’il semblait être pour eux tous.”
[Entrefilet, page 5]
Le parti nazi a su transformer les masses en un instrument disposé à exécuter ses projets.
[Illustration, page 5]
Au dire d’un écrivain, Hitler était ‘un envoyé de Dieu’.
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Un retour est-il à craindre?Réveillez-vous ! 1985 | 8 août
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Un retour est-il à craindre?
IL EST difficile de déterminer avec précision le nombre total des néo-nazis en Allemagne. Cependant, d’après un organisme qui surveille les activités des mouvements extrémistes en République fédérale, les organisations d’extrême droite pourraient réunir plus de 20 000 adhérents dans ce pays. Tous ces militants sont divisés en une multitude de groupuscules qui, dans leur immense majorité, ne dépassent pas quelques centaines de membres.
Voilà qui semble démentir l’idée d’une réapparition en force du nazisme. En effet, qu’aurait été le nazisme sans un chef de la carrure de Hitler, un homme capable de tenir toutes les factions à sa botte? Jusqu’ici, aucun messie politique n’a eu assez d’envergure pour jouer ce rôle, pas même Michael Kühnen, l’un des principaux néo-nazis allemands. Pourtant, un disciple de Kühnen le présentait comme “le bras droit du Führer Adolf Hitler sur la terre”. À propos de Hitler il déclarait encore: “Le Führer est aussi saint pour nous que Jésus l’est pour les chrétiens.”
Il faut dire aussi que la situation de l’Allemagne est très différente aujourd’hui de ce qu’elle était avant l’avènement de Hitler. Le chômage est toujours là, mais il est loin d’atteindre les proportions du début des années trente, où il touchait jusqu’à 30 pour cent de la population active. À présent, le taux d’inflation paraît raisonnable en regard de celui des années vingt, où en deux ans un article pouvait passer de 35 marks à 1 200 milliards de marks. Quant au patriotisme et au militarisme, ils sont pour ainsi dire inexistants. En outre, la constitution allemande offre maintenant des garanties contre le rétablissement d’une dictature.
Malgré tout, beaucoup sont d’avis qu’il ne faut pas sous-estimer le danger que représentent les mouvements néo-nazis. Ainsi, Karl-Dietrich Bracher, professeur d’histoire à l’université de Bonn, rappelait: “Dans les années vingt aussi il n’y avait que des groupuscules, et pas d’organisation importante.” Par ailleurs, comme en témoignent les actes de terrorisme perpétrés dans de nombreux pays, une poignée d’individus voués corps et âme à une cause sont en mesure de provoquer des ravages tout à fait disproportionnés à leur nombre.
Le péril nazi dans le monde
Au début de l’année, Michael Kühnen a été condamné à plus de trois ans de prison pour ses activités néo-nazies. Cependant, avant son arrestation il avait réussi à se réfugier en Suisse pour y “parfaire l’éducation de la droite radicale”. Un journal suisse faisait cette remarque: “Il a eu la joie de constater que dans ce pays son idéologie ‘était brillamment défendue par plusieurs mouvements’.”
Les groupements néo-nazis sont également présents dans l’Autriche natale de Hitler, que le IIIe Reich avait annexée en mars 1938. Parmi les Autrichiens âgés, il en est qui repensent avec une certaine nostalgie à l’époque où les nazis étaient au pouvoir. Ils ne supportent pas les mœurs plus libres, la tenue négligée et l’usage de la drogue qui caractérisent une bonne partie de la jeunesse actuelle, et ils sont parfois enclins à rappeler qu’“on n’aurait jamais vu ça sous Hitler”. Ils vous parleront peut-être du temps du Führer “où l’on pouvait se promener la nuit sans crainte”. Certains fermeront les yeux sur les excès du régime et iront jusqu’à dire: “Ce qu’il nous faudrait à présent, c’est seulement un ‘petit’ Hitler.”
Par ailleurs, le néo-nazisme n’est pas circonscrit à l’Europe. Au dire du Frankfurter Rundschau, près de 10 000 nazis se sont enfuis dans divers pays d’Amérique latine à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Sont-ils encore dangereux? À propos des risques de réapparition du nazisme au Paraguay, le magazine ABC revista a publié une série d’interviews de personnages en vue, dont Jaime Edan, docteur en droit, qui déclarait: “Le nazisme est encore vivant, quoiqu’à l’état latent.” De son côté, un homme politique connu a également admis que le ‘national-socialisme n’était pas mort’.
Et aux États-Unis? George Lincoln Rockwell, le fondateur du parti nazi d’Amérique, a été assassiné en 1967. Cependant, son idéologie s’est perpétuée dans un certain nombre de groupes néo-nazis. Dix ans après la mort de Rockwell, voici ce qu’on pouvait lire dans la revue Time: “Bien que la secte nazie soit totalement impuissante sur le plan politique et que le nombre de ses fidèles ne cesse de décroître, son aptitude à attiser les haines et à susciter la violence demeure considérable.”
Le nazisme reviendra-t-il?
À propos de la recrudescence du néo-nazisme en Allemagne, le journal Süddeutsche Zeitung tirait cette conclusion: “Compte tenu de l’histoire de l’Allemagne et des crimes perpétrés par le régime nazi, les activités de l’extrême droite ne constituent peut-être pas un danger grave, mais elles n’en sont pas moins scandaleuses.” Le journal Die Zeit était plus catégorique: “L’idée d’une résurrection du mouvement nazi en Allemagne de l’Ouest est absurde, et ce essentiellement parce que les circonstances qui ont préparé la montée du nazisme n’existent plus.”
Ainsi, le risque de voir un nouveau Hitler, “petit” ou “grand”, rendre au nazisme la position qu’il a occupée, paraît assez limité. Un lycéen allemand de 17 ans déclarait: “Nous avons été assez avertis, et nous veillerons à ce que cela ne se reproduise jamais.”
Peut-être en sera-t-il ainsi. Malheureusement, le nazisme n’a pas le monopole de l’oppression, ni celui de la cruauté. Du reste, comme le temps l’a montré, Hitler n’a pas été le dernier dictateur du monde. Tant que les hommes continueront à expérimenter les gouvernements de leur choix, des régimes oppressifs apparaîtront fatalement. Comment pouvons-nous donc éviter d’en être les victimes? Pour le savoir, regardons d’un peu plus près ce qui se passait sous le IIIe Reich.
[Entrefilet, page 6]
Profession de foi d’un néo-nazi: “Hitler est aussi saint pour nous que Jésus l’est pour les chrétiens.”
[Entrefilet, page 7]
Le nazisme n’a pas le monopole de l’oppression.
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Le nazisme: qui lui a vraiment dit non?Réveillez-vous ! 1985 | 8 août
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Le nazisme: qui lui a vraiment dit non?
“HEIL Hitler!” Telle était la salutation de rigueur sous le IIIe Reich. Or, si l’on en croit le Frankfurter Allgemeine Zeitung, quantité de gens “rattachaient à la personne du Führer des conceptions mythiques, voire religieuses”. De ce fait, l’expression précitée s’est chargée d’une signification qui dépassait de beaucoup le respect qu’il convient normalement de témoigner à un dirigeant. — Voir Romains 13:7.
Qui plus est, Hitler affirmait que “le Reich national-socialiste durerait mille ans”. Il s’érigeait ainsi en rival du Messie de la Bible, Jésus Christ, lequel avait promis l’instauration d’un gouvernement qui exercerait son pouvoir sur la terre pendant mille ans. — Voir Révélation 20:4, 6.
Dans l’État policier de Hitler, il était dangereux d’exprimer publiquement son désaccord avec les vues du parti nazi. C’est seulement lorsque les abus du régime sont devenus évidents, et surtout lorsque la défaite n’a plus fait de doute, que le mécontentement s’est changé en hostilité.
L’opposition a atteint son paroxysme le 20 juillet 1944, avec un complot contre la vie du Führer. Parmi ceux qui y étaient mêlés, plusieurs avaient d’abord été des sympathisants ou des militants nazis. Le 20 juillet 1984, soit 40 ans plus tard jour pour jour, le chancelier d’Allemagne fédérale a pris la parole lors d’une cérémonie à la mémoire de ceux qui avaient été exécutés ou qui avaient subi des représailles à la suite de cet attentat manqué. Hitler défrayait à nouveau la chronique.
La position du clergé
Et les chefs religieux allemands? Se sont-ils opposés à Hitler et au nazisme? Par exemple, quelle a été l’attitude du clergé catholique? Au sujet de Konrad Graf Preysing, un évêque berlinois, le journaliste Klaus Scholder déclarait: “Graf Preysing, qui à l’époque était toujours évêque d’Eichstätt, a été l’un des rares qui, dès le début, aient reconnu dans le IIIe Reich un régime dangereux et criminel.” (C’est nous qui soulignons.) Son opposition au régime était ouverte. En revanche, d’autres membres de la Conférence épiscopale d’Allemagne, y compris son président, le cardinal Bertram, hésitaient à s’élever contre le nazisme. En définitive, ceux-là ont jugé préférable de lui accorder leur soutien. Scholder ajoutait: “Avec le recul, on peut juger cette soumission [à Hitler et au nazisme] inexplicable, pour ne pas dire inadmissible.”
Chez les protestants, le pasteur Martin Niemöller est souvent décrit comme un farouche adversaire du régime nazi. Cependant, l’écrivain H. Brebeck précisait que “la seule question sur laquelle il était en désaccord avec les objectifs de Hitler était la suivante: ‘Qui doit gouverner l’Église? L’Église elle-même ou bien le parti?’ Sur le plan politique, par contre, son adhésion était sans réserve”. À l’occasion de la mort de Niemöller, en 1984, le Frankfurter Allgemeine Zeitung faisait ce commentaire: “Comme la quasi-totalité des dignitaires protestants de ce pays, il a d’abord salué le renouveau tant attendu de l’Allemagne sous la bannière de Hitler.”
Citons encore le rapport éloquent que le Deutsches Allgemeines Sonntagsblatt a publié sur la Conférence de la Fédération baptiste d’Europe, qui s’est tenue en 1984 à Hambourg, en Allemagne. Voici ce qu’on y lisait: “Pour la première fois, des éclaircissements ont été apportés au sujet du comportement de l’Église baptiste sous le IIIe Reich. Jusqu’à présent, en effet, les paroisses avaient préféré éviter ce sujet délicat. Mais lors de ce congrès, le président de la section nationale a présenté la ‘confession’ suivante (...): ‘Nous n’avons pas participé officiellement à la lutte [contre le nazisme] (...) et, partant, nous ne nous sommes pas opposés clairement à la transgression des commandements de Dieu. Nous regrettons vivement que notre section allemande ait succombé à la tentation idéologique du moment et qu’elle n’ait pas eu le courage de combattre plus fermement pour la vérité et pour la justice.’”
Ainsi, l’histoire atteste que seule une infime minorité d’ecclésiastiques ont pris fait et cause contre le régime de Hitler. Du reste, même ceux qui s’y sont opposés l’ont généralement fait soit par déception, soit pour des raisons de politique ecclésiale, et non pour des motifs purement bibliques. Le fait est que dans l’esprit de la majeure partie d’entre eux il n’y avait apparemment rien d’anormal à confesser Jésus Christ comme le Messie tout en criant “Heil” à un faux messie politique et à son “règne de mille ans”. Leur exemple pitoyable, impie et contraire aux Écritures a été suivi par leurs ouailles, pour le malheur de tous. — Voir Matthieu 15:14.
Ceux qui ne se sont pas compromis
Il y avait toutefois en Allemagne un groupe de chrétiens qui continuait à défendre les principes des Écritures envers et contre tout. Il s’agissait des Témoins de Jéhovah. Contrairement au clergé et à son troupeau, ceux-ci se sont refusés à toute compromission avec Hitler et les nazis. Ils n’ont jamais accepté de violer les commandements de Dieu. Ils ont toujours observé une stricte neutralité chrétienne à l’égard des affaires politiques (voir Ésaïe 2:2-4; Jean 17:16; Jacques 4:4). Ils n’ont pas attribué le Heil, le salut, à Hitler, comme l’ont fait l’immense majorité des ecclésiastiques et de leurs fidèles.
À l’instar de l’apôtre Pierre, les Témoins de Jéhovah ont persisté à confesser ce qui suit au sujet de Jésus Christ: “Il n’y a de salut en personne d’autre, car il n’y a pas sous le ciel d’autre nom qui ait été donné parmi les hommes, par lequel nous devons être sauvés.” (Actes 4:12; voir aussi Psaumes 118:8, 9; 146:3). Aucun d’entre eux ne s’est sali les mains dans les campagnes militaires de Hitler, car tous ont refusé de servir dans ses armées. — Jean 13:35; I Jean 3:10-12.
Par suite de la position intransigeante qu’ils avaient prise à l’égard de Hitler et du nazisme, les Témoins de Jéhovah ont été persécutés et envoyés par milliers dans des camps de concentration. Leur foi puissante et leur intégrité en face de l’incroyable sauvagerie nazie sont bien décrites par Anna Pawełczyńska, une sociologue polonaise qui a survécu aux horreurs des camps de la mort. Dans son livre Valeurs et violence à Auschwitz (angl.), elle explique que les Témoins de Jéhovah “constituaient une puissante force idéologique, et [qu’]ils ont gagné leur bataille contre le nazisme”. Elle les dépeint comme un “îlot de résistance inébranlable au sein d’une nation terrorisée”. Ce à quoi elle ajoute: “Ils ont déployé le même courage dans le camp d’Auschwitz. Ils sont arrivés à gagner le respect des autres prisonniers (...), des détenus qui accomplissaient certaines tâches administratives et même des officiers SS. Tout le monde savait qu’aucun Témoin de Jéhovah n’exécuterait un ordre contraire à ses croyances et à ses convictions religieuses.” Elle conclut ainsi: “Les Témoins de Jéhovah ont choisi la voie de la résistance passive à cause de leurs croyances, qui condamnent toute forme de guerre et de violence.”
Effectivement, les Témoins de Jéhovah se sont gardés de toute compromission devant Hitler et le IIIe Reich. Ils n’ont pas mis leur confiance et leur espoir dans le nazisme, pas plus, d’ailleurs, que dans aucun autre système politique. Ils ont su rejeter la domination de l’homme parce qu’ils avaient trouvé mieux. C’est pour cela qu’à la différence du clergé et des Églises en général ils ne sont pas tombés au pouvoir du nazisme.
Leur espoir
Les Témoins de Jéhovah ne placent toujours pas leur confiance et leurs espoirs dans les idéologies politiques, quelles qu’elles soient. Ils leur préfèrent en effet l’avenir meilleur que Dieu leur a promis: un gouvernement conçu par lui, qui établira un nouveau système juste et capable de résoudre tous les problèmes du genre humain. Ce gouvernement, qui sera le seul à diriger la terre, n’est autre que le Royaume de Dieu, qui a déjà été instauré dans les cieux et confié au vrai Messie, Jésus Christ. — Matthieu 6:9, 10; II Pierre 3:13.
Le 1er février 1933, Hitler prononçait sa première allocution radiophonique. Après s’être fait fort de transformer radicalement l’Allemagne du tout au tout, il invitait ses auditeurs à lui donner, à lui et à son parti, le temps d’agir, puis à le juger sur les résultats. Douze ans plus tard, son règne, qui était censé durer mille ans, s’achevait dans la honte. Le couperet du jugement était tombé: La dictature de Hitler avait été catastrophique, car à la fin de la guerre elle laissait son peuple, son pays et le monde entier profondément meurtris, méconnaissables.
Quel contraste avec les mille ans de règne du Messie de la Bible, Jésus Christ! Au terme de cette période, l’homme et la terre n’auront plus rien à voir avec la condition lamentable dans laquelle ils se trouvent aujourd’hui. Voyez vous-même la description que la Bible en donne par avance en Révélation 21:4, 5, puis essayez de vous représenter une terre paradisiaque peuplée d’humains parfaits qui profitent de la vie au maximum, sans avoir à redouter d’attentat, de guerre ou d’autres méfaits résultant d’idéologies destructrices, sans que rien vienne ternir leur bonheur. Cet avenir merveilleux peut être le vôtre! — Ésaïe 35:1-7; 65:17-25; I Jean 2:17.
[Entrefilet, page 9]
La plupart des ecclésiastiques, catholiques et protestants, hésitaient à s’élever contre le nazisme.
[Entrefilet, page 12]
Le seul vrai règne de mille ans sera celui de Dieu.
[Illustrations, page 9]
Le clergé s’est sali les mains en accordant son soutien à Hitler.
[Illustrations, page 11]
À l’instar de Johannes Harms, dont la photo est reproduite ci-dessus, des milliers de Témoins de Jéhovah ont été envoyés dans des camps de concentration parce qu’ils refusaient de transiger avec le nazisme. Beaucoup y sont morts, comme en témoigne ce certificat.
Avocat général de la Cour militaire du Reich.
Johannes Harms (...) a été jugé le 11 juillet 1940 par la Cour militaire du Reich pour démoralisation des forces armées et condamné à mort (...). La sentence a été exécutée le 1er août 1941.
Tampon de la Cour militaire du Reich.
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Le nazisme et ses conséquencesRéveillez-vous ! 1985 | 8 août
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Le nazisme et ses conséquences
Dans son livre L’essor et la chute du IIIe Reich (angl.), William Shirer montre que pour les pays conquis le nazisme se traduisait avant tout par le pillage, l’exploitation et des forfaits plus scandaleux encore. Entre autres choses, il écrit: “Les Juifs et les Slaves étaient des Untermenschen, des sous-hommes. Selon la théorie de Hitler, ils n’avaient pas le droit à la vie. Tout au plus certains Slaves pouvaient-ils se rendre utiles par leur travail d’esclaves dans les champs et dans les mines (...). La culture des Russes, des Polonais et des autres Slaves était condamnée à disparaître. On devait leur refuser toute instruction digne de ce nom.”
Après avoir évoqué les richesses considérables dont les nazis se sont emparés dans les pays occupés, Shirer explique toutefois que le règne heureusement court du nazisme a plus marqué les mémoires ‘par le pillage des vies que par celui des biens’. “Dans ce domaine, dit-il, l’abjection des nazis est descendue à un niveau que l’homme avait rarement atteint jusque-là. Des millions d’hommes et de femmes honnêtes et innocents ont été réduits au travail forcé; des millions de gens ont été torturés et martyrisés dans des camps de concentration, tandis que des millions d’autres (...) étaient massacrés de sang-froid, quand on ne les laissait pas délibérément mourir de faim.” Shirer conclut: “Cette histoire dont l’horreur défie l’imagination ne serait pas croyable si elle n’avait été relatée et attestée avec force détails par ceux qui en étaient responsables.” Il va sans dire que les survivants, eux aussi, ont parlé.
C’est donc avec raison que la Bible fait cette observation au sujet des gouvernements humains: “L’homme domine l’homme à son détriment.” Et encore: “Il n’appartient pas à l’homme qui marche de diriger son pas. Corrige-moi, ô Jéhovah.” D’où l’importance de ce conseil: “Ne mettez pas votre confiance dans les nobles, ni dans le fils de l’homme terrestre, à qui n’appartient point le salut.” — Ecclésiaste 8:9; Jérémie 10:23, 24; Psaume 146:3.
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