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    Annuaire 1975 des Témoins de Jéhovah
    • serviteurs de Jéhovah aux États-Unis avaient souvent besoin de conseils, pour se défendre avec succès devant les tribunaux. Pour aider les proclamateurs du Royaume, la Société Watchtower créa un service juridique dans ses bureaux de Brooklyn.

      Robert Morgan se souvient des détails suivants : “Lors de nos réunions de service hebdomadaires, nous avons étudié la brochure Conseils pour les procès, publiée par la Société. Nous nous efforcions de nous préparer pour savoir parler à la police et aux juges qui ne cessaient de nous entraver dans notre service du champ. Nous apprenions comment répondre lorsque nous étions interpellés par la police, quels étaient nos droits de citoyen, et quelles mesures nous devions prendre sans faute si nous étions condamnés, afin de défendre la bonne nouvelle devant des cours d’appel.”

      Frère Ray Bopp précise de son côté : “Aux réunions de service, des démonstrations reproduisaient le déroulement des événements à partir du moment de l’arrestation jusqu’à la fin du procès et l’annonce du jugement. Des serviteurs dans la congrégation jouaient le rôle du procureur et de l’avocat, et certains de ces ‘procès’ fictifs s’étendaient sur plusieurs semaines.”

      ARRÊTÉS ET JETÉS EN PRISON

      Certes, les conseils juridiques donnés par la Société et l’excellente formation dispensée aux réunions de service aidèrent grandement les serviteurs de Dieu. Mais une fois qu’ils étaient derrière les barreaux, seul Jéhovah pouvait les fortifier. Comme l’écrivit Paul, “j’ai de la force pour tout grâce à celui qui me donne de la puissance”. — Phil. 4:13.

      Des centaines de témoins chrétiens de Jéhovah furent arrêtés et emprisonnés durant les années agitées après 1930 et après 1940. À propos des problèmes juridiques que les serviteurs de Jéhovah rencontrèrent dans une région, frère Homer Rogers déclare : “Dans la ville de La Grange [en Georgie] il y avait une ordonnance qui interdisait à quiconque d’aller de porte en porte pour proposer aux habitants de la ville quelque imprimé que ce soit. Cet arrêté visait les témoins de Jéhovah et ne fut appliqué qu’à eux.” Comment pouvait-​on le savoir ? Tout simplement parce que les habitants eux-​mêmes admettaient que tous les autres imprimés étaient distribués sans difficulté à La Grange.

      Le 17 mai 1936, 176 témoins furent arrêtés et détenus parce qu’ils avaient prêché à La Grange. Les femmes furent libérées le lendemain, mais 76 frères furent incarcérés pendant quatorze jours dans une prison située à quelques kilomètres de la ville. Les autres détenus étaient des forçats qui étaient littéralement enchaînés pendant qu’ils travaillaient à la construction d’une route depuis le lever du soleil jusqu’au soir. Frère Sillaway nous rapporte que les témoins furent jugés et condamnés à une amende de un dollar ou à trente jours de prison. Le procureur ayant interdit au greffier de signer le recours, les frères perdirent le droit de faire appel, si bien que le 28 mai 1937, 57 d’entre eux rentrèrent en prison pour purger leur peine de trente jours. Malgré leur innocence, ces témoins furent habillés comme des forçats, ne reçurent qu’une couverture pour deux malgré le froid qui sévissait, et durent accomplir des travaux pénibles sur les routes et ailleurs.

      Malgré leurs souffrances, ces frères emprisonnés eurent aussi l’occasion de faire du bien spirituellement. Frère Sillaway écrit : “Vers la fin de nos trente jours, douze hommes faisant partie de mon groupe et d’un autre durent travailler dans un cimetière réservé aux Noirs, presque à la campagne. Au milieu de la matinée, un cortège funèbre entra par la porte principale et s’arrêta. Un employé des pompes funèbres s’approcha de nous et nous expliqua que la famille du mort était trop pauvre pour payer le prêtre, si bien qu’il n’y aurait ni service religieux ni prière. Il nous demanda si l’un de nous accepterait de prononcer quelques paroles. Ainsi, j’eus le privilège d’expliquer à cette poignée de gens la vraie condition des morts et l’espérance de la résurrection. Ils ne firent pas attention à ma tenue de bagnard.”

      Sœur Theresa Drake dit qu’elle rencontra pour la première fois l’intolérance à l’égard du peuple de Dieu peu de temps après 1930, lorsqu’elle fut arrêtée à Bergenfield, dans le New Jersey. Elle écrit : “On me prit mes empreintes digitales pour la première fois à Plainfield, où je fus détenue toute une nuit avec 28 autres sœurs. Nous étions 29 dans une cellule minuscule, de sorte que personne ne pouvait s’allonger pour dormir. Finalement, on nous conduisit au gymnase et on nous donna des tapis pour nous permettre de nous étendre sur le sol. Je me souviens qu’un policier ouvrit une porte et, nous voyant, s’exclama : ‘Elles sont comme des moutons menés à la boucherie.’”

      Citant un autre exemple, sœur Drake écrit : “À Perth Amboy, on nous a arrêtés le matin à 10 heures et nous avons été détenus jusqu’à 20 heures. C’est alors que j’ai rencontré pour la première fois frère Rutherford. Il est venu se porter caution pour 150 d’entre nous qui avions été arrêtés. Nous étions tous réunis dans une grande salle du tribunal. À l’extérieur, la foule fouillait nos voitures et prenait nos livres et d’autres imprimés pour les jeter sur la pelouse devant le tribunal. Une demi-douzaine d’hommes se tenaient derrière le bâtiment, pour s’emparer de frère Rutherford. Ils l’ont menacé, mais ils n’ont pas pu l’atteindre, car en quittant le tribunal nous l’avons entouré, et il s’est engouffré dans une voiture qui l’attendait, mais qui n’était pas la sienne.”

      À propos des villes de l’Ohio et de la Virginie-Occidentale, sœur Edna Bauer a déclaré : “Bon nombre de frères furent arrêtés et emmenés en prison sur les voitures des pompiers qui faisaient marcher leurs sirènes pour attirer l’attention des passants.” Souvent, on jetait en prison des groupes de frères, sans tenir compte de leur âge. Par exemple, sœur Bennecoff se souvient qu’à Columbia, en Caroline du Sud, “on a jeté en prison 200 d’entre nous, dont le plus jeune n’avait que 6 semaines”.

      Les conditions en prison pouvaient être très pénibles. Frère Earl Dale, se rappelant son incarcération injuste en tant que chrétien à Somersworth, dans le New Hampshire, écrit : “J’essayais de dormir la nuit, mais la prison n’était pas d’une propreté exemplaire. La nuit, il y avait des petites bêtes qui se promenaient sur moi. Je ne les aimais pas, mais elles avaient l’air de me trouver à leur goût !” Parce qu’ils avaient annoncé la bonne nouvelle à Caruthersville, dans le Missouri, frère et sœur Adair furent mis en prison pendant soixante-dix-huit jours en 1941. Sœur Adair appelle le lieu de sa détention “le donjon”. Sa santé souffrit de son incarcération. Elle déclare : “Dormir pendant soixante-dix-huit jours sur du ciment avec simplement une couverture et un oreiller n’avait rien d’agréable. Mais ce qui m’importait, c’était de rester fidèle à Jéhovah.’

      Certes, les témoins de Jéhovah américains étaient souvent jetés en prison pour avoir prêché le message du Royaume, mais cela ne les fit pas taire. En tant que détenus, ils continuaient d’annoncer la bonne nouvelle. Par exemple, sœur Dora Wadams eut de nombreuses occasions de prêcher en prison. Elle se souvient qu’un jour, lorsqu’elle se trouvait en prison à Newark, dans le New Jersey, la nouvelle s’est répandue que les témoins allaient être libérés. Elle relate : “Une nuit, alors que nous étions déjà enfermés dans nos cellules, nous avons entendu d’autres détenus dire : ‘Les gens de la Bible vont nous quitter demain. La prison ne sera pas pareille. Ils sont comme des anges qui nous ont été envoyés du ciel.’”

      DEVANT LES TRIBUNAUX

      Les serviteurs de Jéhovah étaient prêts à se défendre et à défendre l’œuvre que Dieu leur avait confiée si, après avoir été arrêtés, ils étaient traduits devant les tribunaux. Parfois ils ne bénéficiaient pas de l’aide d’un avocat. Par exemple, en 1938, frère Roland Collier, membre de la congrégation d’Orange, dans le Massachusetts, obtint l’autorisation de se servir d’une voiture munie de haut-parleurs dans la ville voisine d’Athol. Lui et un autre frère étaient restés dans la voiture et passaient le disque “Ennemis” pendant que d’autres proclamateurs du Royaume prêchaient de maison en maison. Frère Collier fut arrêté et accusé d’avoir fait du porte à porte, bien que ce ne fût pas vrai à cette occasion. Il relate : “Nous avons attendu le procès avec intérêt, et nous nous sommes préparés en conséquence. J’ai bien étudié la brochure Conseils pour les procès que la Société avait publiée en vue de telles éventualités. Le jour du procès, plusieurs frères étaient présents au tribunal pour me donner du courage. J’ai suivi exactement les conseils de la Société, allant même jusqu’à interroger le chef de police. À la fin de l’audition, j’ai été acquitté, et le lendemain le journal local portait le titre suivant : ‘UN HABITANT D’ORANGE ÉVITE D’ALLER EN PRISON EN PRÊCHANT’.”

      Certains avocats qui n’étaient pas témoins de Jéhovah firent de grands efforts pour défendre le peuple de Dieu. Mais souvent les frères étaient défendus par des avocats qui étaient eux-​mêmes des frères. L’un de ces frères avocats s’appelait Victor Schmidt. Sa femme, Mildred, écrit entre autres : “Après la décision défavorable de la Cour suprême des États-Unis concernant le salut au drapeau, une vague d’émeutes et d’arrestations déferla sur les frères dans de nombreuses villes autour de Cincinnati. Comme mon mari ne conduisait pas, je devais lui servir de chauffeur lorsqu’il se rendait dans ces différentes villes. À certains moments, il y avait un nouveau procès presque tous les jours. Je ne pouvais donc plus travailler avec les pionniers. (...) Victor avait une grande foi en Jéhovah, et sa foi a fortifié la mienne. Lorsque nous approchions des villes où il devait défendre les frères devant le tribunal, il me demandait de ranger la voiture sur le bas-côté de la route, et alors il priait Jéhovah, en lui demandant de lui ouvrir la voie pour qu’il puisse aider les frères et aussi, si telle était sa volonté, de bien vouloir nous protéger et nous aider à ne jamais céder à la crainte de l’homme. Maintes et maintes fois nous avons eu des preuves de la puissance extraordinaire des forces angéliques de Jéhovah qui agissaient en notre faveur.”

      JUSQU’À LA COUR SUPRÊME DES ÉTATS-UNIS

      Plusieurs affaires juridiques impliquant les témoins de Jéhovah furent portées devant la Cour suprême des États-Unis. L’une était l’affaire Lovell contre la ville de Griffin. Plusieurs membres du peuple de Dieu avaient déjà été arrêtés pour avoir prêché la bonne nouvelle à Griffin, en Georgie. Mais un jour, un certain nombre de témoins furent arrêtés pour avoir violé une ordonnance interdisant “la diffusion (...) des publications de toutes sortes (...) sans l’autorisation écrite du maire de la ville de Griffin”. Frère Fiske nous fournit les détails suivants : “Il y avait dans notre groupe plusieurs frères qui étaient de grands gaillards de plus de 1,80 m, mais lorsque la police a cherché quelqu’un pour représenter tout le groupe, avec l’accord des surveillants présents, elle a choisi une petite sœur maigrichonne, pensant sans doute pouvoir l’intimider. Mais la sœur en question [Alma Lovell] avait bien étudié la brochure Conseils pour les procès. (...) Aucun des frères ne s’était aussi bien préparé qu’elle, si bien que lors du procès, elle a parlé pendant plus d’une heure, donnant un excellent témoignage. Montrant cependant que ce qu’elle disait ne l’intéressait pas, le juge l’écoutait les pieds sur son bureau. Lorsqu’elle s’est rassise, il a enlevé ses pieds du bureau et lui a dit : ‘C’est tout ?’ Elle a répondu : ‘Oui, Monsieur le juge.’ Là-dessus, et sans autres formalités, il a déclaré tous les frères coupables. L’avocat de la Société s’est aussitôt pourvu en appel.” Le 28 mars 1938, la Cour suprême rendit une décision unanime annulant l’ordonnance en question.

      Le 26 avril 1938, frère Newton Cantwell prêchait le Royaume avec ses deux fils mineurs. Ce témoin chrétien fut arrêté pendant qu’il faisait entendre le disque “Ennemis” et présentait le livre du même titre. Il fut traduit devant les tribunaux du Connecticut à la suite d’une plainte déposée par deux catholiques. Il fut accusé d’avoir troublé la paix et d’avoir violé un arrêté de l’État du Connecticut interdisant les quêtes faites au profit d’œuvres religieuses ou de bienfaisance sans l’autorisation du secrétaire du comité des œuvres sociales de l’État. Frère Cantwell fut déclaré coupable par les tribunaux du Connecticut. Il écrit : “La Société a interjeté appel, et l’affaire a été portée devant la Cour suprême des États-Unis. (...) Le jugement précédent a été cassé, et l’arrêté exigeant une autorisation pour diffuser des imprimés religieux ou accepter des dons au profit d’une œuvre religieuse fut déclaré contraire à la constitution tel qu’il avait été appliqué aux témoins de Jéhovah. Encore une victoire pour le peuple de Dieu !”

      En revanche, le 8 juin 1942, les témoins de Jéhovah essuyèrent une défaite importante devant la Cour suprême des États-Unis, cinq juges sur neuf s’étant prononcés contre eux. Il s’agit de l’affaire Jones contre la ville d’Opelika. Ce procès concernait la distribution des périodiques dans les rues et soulevait la question de savoir si frère Rosco Jones était vraiment coupable d’avoir violé une ordonnance de la ville d’Opelika, dans l’Alabama, en “vendant des livres” sans licence ni paiement d’une taxe.

      UN “JOUR FASTE” POUR LE PEUPLE DE DIEU

      Puis vint le 3 mai 1943, date que l’on pourrait qualifier de “jour faste” pour les témoins de Jéhovah. Pourquoi ? Parce qu’ils remportèrent douze victoires sur les treize affaires jugées ce jour-​là. L’affaire Murdock contre Pennsylvanie, concernant une taxe de patente, était particulièrement importante. En effet, lors de ce procès la Cour suprême des États-Unis revint sur la décision qu’elle avait prise dans l’affaire Jones contre la ville d’Opelika. Dans son jugement sur l’affaire Murdock, la Cour déclara : “On prétend toutefois que le fait qu’une taxe puisse supprimer ou limiter cette activité est sans importance si elle ne produit pas ce résultat. Mais en raisonnant de la sorte on ne tient pas compte de la nature de cette taxe. C’est une taxe de patente, — une taxe uniforme imposée sur l’exercice d’un droit protégé par les Amendements garantissant les droits des citoyens. Or, un État ne peut imposer une taxe pour la jouissance d’un droit garanti par la Constitution fédérale.” À propos de l’affaire Jones, la Cour déclara : “Le jugement dans l’affaire Jones contre Opelika a été cassé ce jour. Libérés de ce précédent, nous pouvons rétablir à leur position constitutionnelle et élevée les libertés d’évangélistes itinérants qui propagent leurs croyances religieuses et les doctrines de leur foi en distribuant des publications.” Le jugement dans l’affaire Murdock endigua le flot de persécutions que le peuple de Jéhovah avait subies à cause des ordonnances qui exigeaient le paiement d’une taxe de patente.

      Leurs efforts eurent des répercussions juridiques. C’est donc à juste titre qu’une revue de droit a écrit : “Il est clair que les actuelles garanties constitutionnelles de liberté individuelle, telles que la Cour suprême des États-Unis les interprète avec autorité, sont bien plus étendues qu’elles ne l’étaient avant le printemps de 1938, et que l’on doit trouver la raison principale de cette extension dans les trente et un procès des témoins de Jéhovah (seize jugements faisant loi), dont celui de Lovell contre la ville de Griffin fut le premier. Si ‘le sang des martyrs constitue la semence de l’Église’, quelle n’est pas la dette de la loi constitutionnelle envers la persévérance dans l’action — je devrais peut-être dire le dévouement — de ce groupement ?” — Minnesota Law Review, Vol. 28, No 4, mars 1944, p. 246.

      DES FOULES EN COLÈRE NE FONT PAS TAIRE CEUX QUI LOUENT JÉHOVAH

      Tandis qu’ils menaient des combats juridiques pour s’assurer la liberté du culte et leur droit d’annoncer la bonne nouvelle, dans le champ les témoins de Jéhovah durent souvent faire face à la violence de la foule. Cela aussi a un précédent biblique, car Jésus Christ passa par des épreuves analogues (Luc 4:28-30 ; Jean 8:59 ; 10:31-39). Le fidèle Étienne souffrit le martyre par les mains d’une foule en colère. — Actes 6:8-12 ; 7:54 à 8:1.

      Certains voyous profitèrent du congrès chrétien qui devait se tenir dans le monde entier du 23 au 25 juin 1939 pour harceler le peuple de Dieu. L’assemblée de New York était reliée directement par lignes téléphoniques aux autres assemblées tenues ailleurs aux États-Unis, au Canada, dans les îles Britanniques, en Australie et aux îles Hawaii. Pendant qu’ils annonçaient le discours intitulé “Gouvernement et paix” que frère Rutherford devait prononcer, les serviteurs de Jéhovah apprirent que des groupes de l’Action catholique allaient venir pour troubler cette réunion publique prévue pour le 25 juin. Ainsi, le peuple de Dieu s’attendait à des difficultés. Frère Blosco Muscariello relate ce qui suit : “Tout comme Néhémie, qui devait rebâtir la muraille de Jérusalem, fournit à ses hommes des instruments de travail et des armes (Néh. 4:15-22), nous aussi, nous étions bien équipés. (...) J’étais du nombre des jeunes hommes qui reçurent des instructions spéciales en tant que placeurs. Chacun de nous reçut un bâton qu’il devait utiliser si le discours principal était perturbé.” Frère Cantwell précise cependant : “On nous a dit de ne nous servir des bâtons que comme ultime défense, si nous y étions contraints.”

      On ignore généralement que lorsque frère Rutherford monta sur l’estrade du stade new-yorkais Madison Square Garden le dimanche après-midi 25 juin 1939, c’était un homme malade. Le discours commença. Parmi les retardataires il y avait environ 500 suppôts du prêtre catholique Charles Coughlin, le célèbre “prêtre des ondes” pendant les années trente, dont les émissions à la radio étaient écoutées par des millions d’auditeurs. Étant donné que le parterre du stade avait été réservé aux témoins, les partisans de Coughlin, dont plusieurs prêtres, durent s’asseoir en haut du balcon, derrière l’orateur.

      Un correspondant du périodique Consolation rédigea le rapport suivant : “Personne ne fumait dans le stade, mais dix-huit minutes après le début du discours, un homme à gauche de cette section du balcon alluma une cigarette, puis un autre à droite ; ensuite les lumières électriques de cette section se mirent à clignoter et, tout à coup, des hommes commencèrent à crier et à conspuer l’orateur.” Sœur Broad relate : “J’étais tendue et je m’attendais à ce que la confusion gagne tout le stade. Mais au bout de quelques minutes, je me suis aperçue que les manifestants étaient tous groupés derrière l’orateur. Je me suis dit : ‘Que va-​t-​il faire ?’ Il me semblait impossible qu’il puisse continuer de parler, alors qu’on jetait des objets sur l’estrade et qu’à tout moment quelqu’un pouvait bondir sur l’estrade et enlever le microphone.” Sœur Esther Allen se souvient d’avoir entendu “des huées et des cris de ‘Heil Hitler !’, ‘Vive Franco !’ et ‘À mort Rutherford !’”.

      Frère Rutherford, homme malade, allait-​il céder à la pression de ses adversaires violents ? Sœur Laupert écrit : “Plus ils criaient pour couvrir la voix de l’orateur, plus le juge Rutherford parlait avec puissance.” Frère Aleck Bangle écrit de son côté : “Le président de la Société ne se laissa pas intimider, mais il affirma courageusement : ‘Voyez comment les nazis et les catholiques essaient d’interrompre cette réunion, mais par la grâce de Dieu, ils échoueront.’” Et frère Roger Morgan ajoute : “Cette phrase nous fournit l’occasion que nous attendions d’applaudir à tout rompre, pour montrer que nous soutenions avec enthousiasme l’orateur. Frère Rutherford tint bon jusqu’à la fin de l’heure. Par la suite, nous étions émus chaque fois que nous écoutions dans les foyers les disques reproduisant ce discours.”

      “Les placeurs ont bien travaillé, nous précise C. H. Lyon. Deux des partisans de Coughlin qui se montrèrent particulièrement rebelles reçurent des coups de bâton sur la tête et, comme tous les autres, ils furent jetés dehors. Le lendemain un journal fit de la publicité à l’un des hommes de Coughlin en publiant sa photo où on le voyait la tête recouverte d’un pansement en forme de turban.”

      Trois des placeurs furent arrêtés et accusés de “voies de fait”. Ils furent jugés à New York les 23 et 24 octobre 1939, par trois juges (deux catholiques et un juif). Ils expliquèrent devant le tribunal qu’ils s’étaient rendus dans cette section du Madison Square Garden pour s’occuper des perturbateurs. Attaqués par les émeutiers, ils leur avaient résisté et avaient dû agir avec fermeté envers certains d’entre eux. Les témoins à charge firent de nombreuses déclarations contradictoires. Non seulement les juges acquittèrent les trois frères, mais ils leur dirent qu’ils avaient agi conformément à leurs droits.

      LA GUERRE MONDIALE ATTISE LES FLAMMES DE LA VIOLENCE

      L’opposition s’était donc manifestée aux assemblées des témoins de Jéhovah tenues en 1939. Mais à mesure que le monde se précipitait dans la guerre, les flammes de la violence contre eux allaient être attisées. Certes, ce ne fut que vers la fin de 1941 que les États-Unis déclarèrent la guerre à l’Allemagne, à l’Italie et au Japon, mais l’esprit de nationalisme se faisait sentir bien avant cette date.

      Au cours des premiers mois de la Seconde Guerre mondiale, Jéhovah Dieu fit un don précieux à son peuple. Dans son édition anglaise du 1er novembre 1939, La Tour de Garde publia un article intitulé “Neutralité”. Cet article portait comme sous-titre ces paroles que Jésus Christ prononça au sujet de ses disciples : “Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde.” (Jean 17:16, Darby). Cet examen biblique de la neutralité chrétienne arriva au moment opportun et prépara les témoins de Jéhovah à affronter les temps difficiles qui les attendaient.

      ON ESSAIE DE BRÛLER LA FERME DU ROYAUME

      La ferme du Royaume, près de South Lansing, dans l’État de New York, produisait pour le personnel du siège de la Société des fruits, des légumes, de la viande, du lait et du fromage. Frère David Abbuhl travaillait à la ferme en 1940, au moment où la paix et la sérénité qui y régnaient furent soudain troublées. Il écrit : “La veille du 14 juin 1940 [anniversaire de l’adoption du drapeau américain], un vieillard, qui passait chaque jour devant la ferme pour aller boire un whisky à South Lansing, nous informa que certains membres de la Légion américaine [une organisation d’anciens combattants] avaient l’intention de venir le lendemain pour incendier nos bâtiments et casser nos machines.” Les frères prévinrent le shérif.

      Frère John Bogard, qui était alors serviteur de la ferme, décrit en ces termes ce qui se passa lorsque l’ennemi se manifesta le lendemain : “Vers six heures du soir, nos adversaires commencèrent à converger vers la ferme dans des voitures. Le shérif et ses hommes arrivèrent et demandèrent leurs papiers aux chauffeurs des voitures, en les prévenant de ne pas toucher à la ferme du Royaume. Les voitures firent la navette devant la ferme jusque tard dans la nuit, mais grâce à la présence de la police leurs occupants durent rester sur la route, et leur projet de détruire la ferme échoua. Le personnel de la ferme passa une nuit mouvementée, mais nous avons tous pensé à ces paroles rassurantes que Jésus a dites à ses disciples : ‘Vous serez les objets de la haine de tous à cause de mon nom. Et pourtant pas un cheveu de votre tête ne périra.’ — Luc 21:17, 18.”

      Ainsi, cette tentative pour incendier la ferme fut contrecarrée. On a estimé le nombre des voitures à 1 000 et celui des manifestants à environ 4 000 ; ils étaient venus de toutes les parties de l’ouest de l’État de New York, dans l’intention de détruire la ferme du Royaume appartenant à la Société. Sœur Kathryn Bogard écrit : “Leur projet a échoué, et certains de ces hommes sont aujourd’hui eux-​mêmes des témoins, et même des ministres à plein temps !”

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    Annuaire 1975 des Témoins de Jéhovah
    • États-Unis d’Amérique (3e partie)

      LA VIOLENCE SE DÉCHAÎNE À LITCHFIELD

      À peu près à la même époque où l’on avait essayé de brûler la ferme du Royaume, une vague de persécutions déferla sur les témoins de Jéhovah à Litchfield, dans l’État d’Illinois. Frère Clarence Huzzey évoque ses souvenirs, en disant : “Je ne sais comment, mais nos ennemis à Litchfield eurent vent de nos projets, si bien que lorsque nous sommes arrivés pour visiter les habitants de la ville, ils étaient prêts pour nous accueillir. Le prêtre fit sonner les cloches de l’église, et à ce signal les gens ont commencé à s’attaquer aux frères et à les conduire à la prison locale. Plusieurs frères ont été sévèrement battus, et la foule a même menacé d’incendier la prison. Certains de nos assaillants ont identifié les voitures des frères et les ont démolies.”

      Frère Walter Wissman écrit de son côté : “Après que les frères eurent été battus par la foule, les gendarmes de la police routière les rassemblèrent dans la prison, afin de les protéger. Un frère, Charles Cervenka, fut jeté à terre lorsqu’il refusa de saluer le drapeau. On lui frotta le visage avec et on lui donna de grands coups de pied à la tête et au corps. C’est lui qui reçut les blessures les plus graves, à telle enseigne qu’il ne s’en remit jamais complètement. Il mourut quelques années plus tard. Il affirma que pendant qu’on le battait, il se disait qu’il était heureux que ce soit lui et non l’un des nouveaux frères, car il savait qu’il tiendrait bon, alors qu’un nouveau pourrait peut-être s’affaiblir et céder.”

      Frère Wissman ajoute encore : “La ville de Litchfield était très fière de ce qui s’était passé. En effet, quelque temps plus tard, dans les années 1950, Litchfield célébra son centenaire avec des chars de cavalcade représentant les événements remarquables qui jalonnaient les cent années de son histoire. Or, l’un de ces chars commémorait l’attaque organisée contre les témoins de Jéhovah en 1940. Apparemment les responsables considéraient que cet événement était une page glorieuse de l’histoire de leur ville. Puisse Jéhovah leur donner ce qu’ils méritent !”

      APPELS NON ÉCOUTÉS

      Les attaques violentes contre les témoins de Jéhovah devenaient si sérieuses et nombreuses que M. Francis Biddle, Procureur fédéral des États-Unis, et Mme Eleanor Roosevelt (femme du président Franklin Roosevelt) firent des appels publics pour arrêter ces persécutions. En fait, le 16 juin 1940, le jour même des événements de Litchfield, M. Biddle déclara dans un discours radiodiffusé dans tout le pays par le réseau de la N.B.C. :

      “Les témoins de Jéhovah ont été attaqués et battus à maintes reprises. Ils n’avaient commis aucun délit ; mais la foule les a jugés coupables et leur a infligé des châtiments populaciers. Le Procureur général a ordonné une enquête immédiate sur ces actes de violence.

      “Les citoyens doivent être vigilants et se tenir sur leurs gardes et, par-dessus tout, faire preuve de calme et de bon sens. Étant donné que les violences perpétrées par la populace rendent la tâche du gouvernement infiniment plus difficile, celles-ci ne seront pas tolérées. Nous ne vaincrons pas le mal nazi en imitant ses méthodes.”

      Pourtant, ces appels n’endiguèrent pas le flot de persécutions contre les témoins de Jéhovah.

      RÉUNIONS CHRÉTIENNES INTERROMPUES

      Au cours de ces années difficiles, il arrivait que des chrétiens américains soient attaqués pendant qu’ils étaient paisiblement réunis pour s’instruire dans la Bible. Un tel incident se produisit en 1940 à Saco, dans l’État du Maine. D’après frère Harold Duncan, tandis que les témoins de Jéhovah étaient réunis dans leur Salle du Royaume, située au premier étage d’un immeuble, pour y écouter un discours biblique enregistré sur disques, une foule d’entre 1 500 et 1 700 personnes se rassembla dans la rue. Il se souvient clairement qu’un prêtre était assis dans une voiture devant la salle. Frère Duncan écrit : “Le dépanneur de radios (dont la boutique se trouvait à côté) fit marcher tous ses postes le plus fort possible, afin de couvrir la voix de l’orateur. Puis les gens se mirent à jeter des pierres dans les fenêtres de la salle, des policiers habillés en civil éclairant avec leurs torches électriques les carreaux à casser. Je me rendis deux fois au poste de police, situé à un peu plus d’un pâté de maisons de là, mais seulement pour m’entendre dire : ‘Quand vos gens accepteront de saluer le drapeau américain, nous viendrons vous aider.’ La foule cassa 70 [petits carreaux], et une pierre grosse comme un poing passa juste à côté de la tête de sœur Gertrude Bob, et enleva un morceau de plâtre au coin du mur.”

      La foule se manifesta également en 1942, à une assemblée organisée à Klamath Falls, dans l’État d’Oregon. Frère Don Milford relate que les gens coupèrent les fils téléphoniques, interrompant ainsi le discours transmis d’un autre congrès. Mais un frère qui possédait le texte du discours prit aussitôt la relève, et le programme se poursuivit. Finalement, les gens firent irruption dans la salle. Les témoins se défendirent, et lorsqu’ils réussirent à refermer la porte d’entrée, ils découvrirent à l’intérieur de la salle l’un des assaillants, — “un homme grand et fort”, — étendu sans connaissance. Il s’agissait d’un policier. On mit son insigne à côté de son visage et on prit une photo. Frère Milford précise : “Nous avons appelé la Croix-Rouge, et deux femmes sont arrivées avec un brancard pour l’enlever. Plus tard, on l’a entendu dire : ‘Je ne pensais pas qu’ils se défendraient.’” La police refusa d’aider les témoins, et ce ne fut que quatre heures plus tard que la foule se dispersa grâce à l’intervention de la police de l’État.

      ATTAQUES EN DIFFUSANT LES PÉRIODIQUES DANS LES RUES

      Bien qu’il soit vrai que dans certaines villes la police refusa de protéger les témoins de Jéhovah, cela ne fut pas toujours le cas. Par exemple, pendant que frère Payne présentait les périodiques dans une rue de Tulsa, dans l’État d’Oklahoma, il remarqua qu’un agent le surveillait toujours de loin. Frère Payne écrit : “Un jour, je lui ai demandé pourquoi il me surveillait ainsi. Il m’a répondu que malgré l’importance du quartier qu’il devait surveiller, il se tenait près de moi de peur que je ne sois enlevé ou attaqué. Il avait lu comment les témoins étaient traités dans certaines petites villes, et il n’entendait pas permettre à qui que ce soit de nous gêner dans notre œuvre.”

      Il n’empêche que les serviteurs de Jéhovah furent souvent attaqués par des foules déchaînées pendant qu’ils donnaient le témoignage dans les rues à l’aide de La Tour de Garde et de Consolation. Par exemple, frère George McKee dit que semaine après semaine, dans une ville de l’Oklahoma, une foule de 100 à plus de 1 000 hommes en colère molestait les témoins qui présentaient les périodiques dans les rues. Le maire, le chef de police et d’autres fonctionnaires refusèrent de les protéger. Selon frère McKee, le plus souvent les gens étaient conduits par un médecin très connu, cousin de Belle Starr (célèbre femme-gangster) et chef dans la Légion américaine. D’abord, les frères étaient accostés par des ivrognes. Puis la foule survenait, armée de bâtons, de couteaux, de couperets et de fusils. Son objectif ? Chasser les témoins de la ville. Mais chaque samedi les proclamateurs du Royaume décidaient d’avance combien de temps ils voulaient rester dans les rues, et, en général, bien que la foule s’organisât rapidement, ils parvenaient à y rester le temps prévu. Ils plaçaient de nombreux périodiques aux gens qui faisaient leurs courses.

      Un certain samedi, environ quinze témoins furent attaqués. Frère McKee déclare : “Nous nous rendions compte que nous devions compter sur Jéhovah Dieu et sur notre bon jugement si nous voulions en sortir vivants. Sans crier gare, les gens ont attaqué trois d’entre nous avec des couteaux et des bâtons. (...) Les bras cassés, le crâne fêlé et souffrant d’autres blessures, nous nous sommes adressés à quatre médecins de la ville, mais ils ont tous refusé de nous soigner. Il nous a fallu faire quatre-vingts kilomètres avant de trouver un médecin compatissant. Mais nos blessures ne nous ont pas empêchés de retourner dans les rues le samedi suivant, pour annoncer la bonne nouvelle du Royaume. Voilà l’état d’esprit qui nous animait pendant toute cette période de difficultés et de persécutions.”

      VIOLENCE À CONNERSVILLE

      Un exemple frappant de la violence de la foule s’est vu en 1940 à Connersville, dans l’État d’Indiana. Plusieurs chrétiennes comparaissaient devant un tribunal, accusées faussement d’avoir “troublé l’ordre public”. Le premier jour du procès, pendant que frère Rainbow, serviteur de zone, et Victor et Mildred Schmidt quittaient le tribunal, une vingtaine d’hommes menacèrent de les faire mourir et essayèrent de renverser leur voiture.

      Le dernier jour du procès, le procureur passa presque tout le temps qu’il lui avait été imparti à inciter les gens à l’attaque, s’adressant parfois directement aux hommes armés qui se trouvaient dans la salle d’audience. Vers 21 heures, le jugement fut prononcé : “coupables”. Ce mot déchaîna la violence. Sœur Schmidt relate qu’elle et son mari, l’un des avocats de la défense, se trouvaient, avec deux autres frères, isolés des autres témoins et entourés d’une foule de deux cents à trois cents personnes. Voici son récit :

      “Presque aussitôt, nous avons été soumis à un bombardement d’œufs et de toutes sortes de fruits et de légumes. Plus tard, nous avons appris que les gens nous avaient jeté le contenu de tout un camion.

      “Nous avons essayé de courir jusqu’à notre voiture, mais nos assaillants nous en ont empêchés et nous ont poussés vers la route qui sortait de la ville. Tout à coup, les gens ont chargé, en frappant les frères et en me tapant sur le dos comme avec des fouets. Alors, une tempête éclata, avec des pluies torrentielles et un vent violent. Mais les éléments déchaînés étaient insignifiants à côté de la violence de cette foule poussée par les démons. À cause de l’orage, bon nombre de gens se sont réfugiés dans leurs voitures et nous ont suivis, tout en hurlant des insultes où figurait constamment le nom de Jéhovah. Comme nos cœurs étaient transpercés d’entendre ces blasphèmes !

      “Malgré le mauvais temps, il nous semblait qu’une bonne centaine d’hommes avançaient vers nous à pied. À un moment donné, au volant de sa voiture, sœur Jacoby (maintenant sœur Crain) de Springfield (Ohio) a essayé de nous délivrer de la foule, mais les gens ont failli renverser sa voiture, ils ont donné des coups de pied à la carrosserie et ont essayé d’arracher les portières. Quand ils ont eu fini d’attaquer la voiture, nos adversaires ont recommencé à nous taper dessus. La voiture a dû partir sans nous. La tempête continuait de plus belle puis, pendant que nous marchions, nous avons entendu la foule crier : ‘Jetons-​les dans le fleuve ! Jetons-​les dans le fleuve !’ Ce cri sans cesse répété m’a remplie d’effroi, car je voyais que nous approchions d’un pont. Mais, arrivés au fleuve, les gens ont subitement cessé de crier. Bientôt, nous nous trouvions de l’autre côté du pont. C’était comme si les anges de Jéhovah avaient aveuglé la foule, l’empêchant de voir où elle se trouvait. J’ai dit en moi-​même : ‘Oh, Jéhovah, merci !’

      “Après cela, quelques grands gaillards ont recommencé à frapper les frères. Comme c’est dur de voir quelqu’un que vous aimez être roué de coups ! Chaque fois qu’ils ont frappé Victor, il a chancelé, mais il n’est jamais tombé. C’était épouvantable ! (...)

      “Maintes et maintes fois, les gens se sont approchés de moi par-derrière et m’ont frappée dans le dos comme avec un fouet. Finalement, nous nous sommes trouvés séparés des deux autres frères, et pendant que nous marchions en nous tenant par le bras, Victor m’a dit : ‘Nous n’avons pas souffert autant que Paul. Nous n’avons pas encore résisté jusqu’au sang.’ [Voir Hébreux 12:4.]

      “Il faisait nuit et il était très tard (j’ai appris par la suite qu’il était environ 23 heures). Nous étions au-delà des limites de la ville et presque épuisés. Soudain, une voiture s’est arrêtée près de nous, et une voix familière nous a dit : ‘Montez vite !’ C’était un jeune pionnier très brave, Ray Franz, qui était venu nous sauver de la foule déchaînée ! (...)

      “Encore une fois, nous avions l’impression que les anges de Jéhovah avaient aveuglé nos ennemis pour les empêcher de nous voir monter dans la voiture. Nous y avons retrouvé sains et saufs notre cher frère Rainbow, sa femme et trois autres témoins. Je ne sais pas comment cette petite voiture a pu transporter huit personnes ! Quant à nous, nous étions tous persuadés que les anges de Jéhovah avaient empêché l’ennemi de nous voir y monter. En effet la foule était toujours aussi violente à notre égard et rien n’indiquait qu’elle voulait nous relâcher. C’était donc comme si Jéhovah avait étendu son bras affectueux et nous avait délivrés ! Plus tard, nous avons appris que les deux frères qui avaient été séparés de nous s’étaient réfugiés dans une meule de foin. Ils y ont été retrouvés par des frères le lendemain matin. L’un d’eux avait été gravement blessé par un projectile.

      “Nous sommes arrivés chez nous vers 2 heures du matin, complètement trempés et transis de froid, car la tempête avait mis fin à une vague de chaleur et entraîné derrière elle une masse d’air froid. Nos frères et sœurs nous ont soignés, refermant cinq plaies ouvertes au visage de Victor. Comme nous étions reconnaissants de nous retrouver entre les mains affectueuses de nos chers frères !”

      Cependant, Jéhovah soutient et fortifie ses serviteurs au milieu de pareilles épreuves. Sœur Schmidt conclut en disant : “Ainsi, nous avions subi une autre sorte d’épreuve que, par sa miséricorde, Jéhovah nous avait permis de supporter, en permettant que ‘l’endurance fasse œuvre complète’.” — Jacq. 1:4.

      D’AUTRES ACTES DE BRUTALITÉ

      Les témoins de Jéhovah ont été la cible de nombreux autres actes de violence de la part des foules en colère. En décembre 1942, plusieurs témoins de Jéhovah furent molestés pendant qu’ils distribuaient des périodiques dans une rue de Winnsboro, au Texas. Parmi eux se trouvait frère Pillars, serviteur des frères (surveillant de circonscription). Voyant la foule s’approcher d’eux, les témoins comprirent qu’ils ne pouvaient continuer leur activité dans une telle situation. Ils décidèrent donc de regagner leur voiture. Frère Pillars relate ses souvenirs en ces termes : “Le pasteur baptiste, un certain Phillips, était assis dans sa voiture munie de haut-parleurs et se trouvait vers le milieu de la rue principale. Il avait prêché sur le Christ et son crucifiement, mais dès qu’il nous a vus, il a changé de sermon. Il s’est mis à vitupérer contre les témoins de Jéhovah parce qu’ils refusaient de saluer le drapeau. Il a déclaré qu’il serait heureux de mourir pour la Bannière étoilée [le drapeau américain] et que quiconque refusait de la saluer devrait être chassé de la ville. Arrivés à la hauteur de sa voiture, nous avons vu une autre foule qui se dirigeait vers nous. Bientôt nous étions entourés et nous avons été retenus jusqu’à l’arrivée du shérif, qui nous a arrêtés.”

      Plus tard, la foule pénétra dans le bureau du shérif, qui ne fit rien pour protéger les témoins. Les gens s’emparèrent d’eux et les sortirent dans la rue, où ils leur donnèrent des coups de poing, en particulier à frère Pillars. Celui-ci raconte : “J’ai été aidé d’une manière extraordinaire. Je prenais une de ces raclées ! Blessé au visage, je perdais du sang par le nez et par la bouche, mais je ressentais peu de douleur. J’étais étonné, et je sentais que les anges me soutenaient. (...) Je comprenais mieux comment nos frères allemands pouvaient endurer fidèlement et sans chanceler les persécutions nazies.”

      Frère Pillars perdit connaissance plusieurs fois, mais ses persécuteurs le ranimèrent, afin de le battre de nouveau. Finalement, ses tortionnaires le trempèrent dans l’eau froide et essayèrent de lui faire saluer un petit drapeau qui mesurait dix centimètres sur cinq, “le seul drapeau, devait-​il déclarer plus tard, que ces patriotards avaient pu trouver”. Pendant qu’ils tenaient le drapeau, ils lui soulevaient le bras, mais le frère laissait retomber sa main, montrant par là qu’il refusait de saluer. Bientôt ils lui mirent une corde autour du cou, le jetèrent à terre et le traînèrent jusqu’à la prison. Vaguement, il les entendit dire : “Pendons-​le. Comme ça, nous serons définitivement débarrassés de ces Témoins !” Peu après, ils essayèrent de le pendre. Frère Pillars écrit : “Ils me mirent une nouvelle corde de chanvre de douze millimètres autour du cou, avec le nœud derrière l’oreille, et ils me traînèrent dans la rue. Ensuite, ils jetèrent l’autre bout de la corde par-dessus un tuyau qui sortait du bâtiment, et quatre ou cinq hommes se mirent à tirer dessus. La corde se tendit, et quand elle me souleva, je perdis connaissance.”

      Lorsque frère Pillars reprit connaissance, il se trouvait dans la prison non chauffée. Un médecin était en train de l’examiner et disait : “Si vous voulez sauver cet homme, vous feriez mieux de l’envoyer tout de suite à l’hôpital, car il a perdu beaucoup de sang et ses yeux sont dilatés.” Le shérif lui répondit : “C’est la plus belle tête de mule que j’aie jamais rencontrée !” Frère Pillars précise : “Comme cette insulte me réconfortait, car elle confirmait que je ne leur avais pas cédé !”

      Après le départ du médecin, la foule pénétra dans cette prison froide et sombre. On fit craquer des allumettes près du visage de frère Pillars pour mieux le voir. Quelqu’un demanda : “Est-​il mort ?” Un autre répondit : “Non, mais il n’en a plus pour longtemps.” Bien que transi de froid et trempé jusqu’aux os, frère Pillars essaya de ne pas trembler dans l’espoir de se faire passer pour mort. Enfin tous partirent, et un grand silence régna. Au bout d’un certain temps, la porte s’ouvrit et des policiers d’État entrèrent et portèrent frère Pillars jusqu’à une ambulance, qui le conduisit à l’hôpital de Pittsburg, au Texas. Il avait été malmené par la foule pendant six heures. Mais que se produisit-​il quand les gens l’eurent pendu ? Pourquoi était-​il toujours en vie ? Frère Pillars déclare : “J’appris la réponse à ces questions tard le jour suivant.” Il ajoute :

      “Je me trouvais dans la salle des détenus de l’hôpital de Pittsburg quand je reçus la visite de frère Tom Williams, avocat de Sulphur Springs qui luttait courageusement pour la justice. Ayant essayé sans succès de trouver où l’on m’avait amené, il dut menacer de poursuivre en justice les autorités de la ville ; alors elles lui révélèrent que j’étais à l’hôpital. Quel plaisir de voir le visage d’un frère ! C’est là qu’il m’apprit que toute la ville parlait de moi : J’avais été pendu, mais la corde avait cassé !

      “Plus tard, lorsque la police fédérale se saisit de l’affaire, ce qui aboutit à une enquête par jury, un groupe de Pentecôtistes se présentèrent comme témoins. Ces hommes dirent : ‘Aujourd’hui ce sont les témoins de Jéhovah. Demain ce sera nous !’ Ils décrivirent la pendaison en ces termes : ‘Nous l’avons vu se balancer au bout de la corde. Puis elle a cassé. Lorsque nous avons vu cela, nous savions que c’était le Seigneur qui l’avait cassée.’”

      Le shérif et les autres fonctionnaires impliqués dans cette affaire s’enfuirent dans un autre État, si bien qu’ils ne passèrent jamais en jugement. Frère Pillars retrouva ses forces et reprit son activité comme serviteur des frères dans la même région.

      COMMENT ENDURER DE CRUELLES PERSÉCUTIONS

      Peut-être avez-​vous tendance à dire : “Je ne pourrais jamais endurer des persécutions si cruelles !” Non, vous ne pourriez pas les endurer par votre propre force. Mais Jéhovah peut vous rendre fort, si vous profitez dès maintenant de tout ce qu’il nous donne pour nous édifier spirituellement. Les persécutions sont principalement rattachées à la question de la souveraineté universelle. En effet, Satan a défié Jéhovah Dieu en prétendant que nul homme ne lui resterait fidèle dans l’épreuve. Quel privilège de rester fidèle à Jéhovah Dieu et de soutenir sa cause, prouvant ainsi que Satan est un menteur ! — Job 1:1 à 2:10 ; Prov. 27:11.

      Depuis cette époque difficile où les témoins de Jéhovah américains subirent de nombreuses attaques par des foules en colère, le peuple de Dieu se rend compte de plus en plus qu’il dépend entièrement de Jéhovah. Certes, les chrétiens sont prêts à se défendre et à défendre les leurs en harmonie avec les principes du christianisme, mais ils ne se munissent pas d’armes meurtrières au cas où ils seraient attaqués (Mat. 26:51, 52 ; II Tim. 2:24). Au contraire, ils reconnaissent que ‘les armes de leur guerre ne sont pas charnelles’. — II Cor. 10:4 ; voir La Tour de Garde, édition française du 1er mars 1970, pages 153-159 (17/69, pages 33-43).

      ASSEMBLÉE THÉOCRATIQUE À SAINT LOUIS

      L’humanité connaissait les douleurs de la Seconde Guerre mondiale, et les serviteurs de Dieu étaient en butte à des persécutions, mais ‘Jéhovah des armées était avec eux’. (Ps. 46:1, 7.) Dieu veilla à ce qu’ils reçoivent une abondance de bonnes choses spirituelles. À ce sujet, citons le cas de l’Assemblée théocratique des témoins de Jéhovah, organisée du 6 au 10 août 1941, à Saint Louis, aux États-Unis.

      Les serviteurs de Jéhovah attendaient avec impatience cette assemblée. Bientôt, nombre d’entre eux roulaient vers Saint Louis. Sœur McCreery écrit : “Nous avons bientôt remarqué que tous les témoins mettaient un périodique [La Tour de Garde ou Consolation] sur la vitre de leur voiture, afin de s’identifier ; nous les avons donc imités. Pendant tout le voyage, nous avons passé notre temps à saluer des gens que nous ne connaissions pas du tout mais qui étaient manifestement nos frères, tant ils nous souriaient et nous saluaient amicalement !”

      Malgré les pressions qu’exercèrent sur elle des organisations de l’Action catholique et d’anciens combattants, la direction des Arènes refusa d’annuler le contrat conclu avec les témoins de Jéhovah. Cependant, l’Église catholique fit de la propagande mensongère à leur sujet, si bien que nombre d’habitants de la ville revinrent sur leur promesse d’héberger des membres du peuple de Dieu. Robert Rainer relate : “Des religieuses allaient de porte en porte pour dire aux gens de ne pas louer des chambres aux témoins de Jéhovah.” D’après sœur Margaret Rogers, il y avait à Saint Louis “tant de témoins sans chambre qu’il a fallu fabriquer sur place des matelas pour leur permettre de dormir aux Arènes”.

      Toujours à propos du problème de l’hébergement des congressistes, frère et sœur Janssen écrivent : “Pendant le congrès, un journal publia une photo d’une mère et de son enfant endormis sur la pelouse du stade. Il n’en fallut pas plus pour que les habitants au cœur plus sensible que celui de leurs faux enseignants commencent à appeler le service du logement pour mettre à sa disposition des chambres pour les témoins.” Bientôt ce service recevait des offres de chambres par télégrammes, coups de téléphone, lettres, visites personnelles et par d’autres moyens. Les gens arrêtaient même les proclamateurs du Royaume dans la rue pour leur offrir une chambre.

      Pour certains témoins une cité de caravanes fut aménagée. Ce camp finit par accueillir 677 caravanes, 1 824 tentes, 100 camping-cars, 99 camions et 3 autocars, le tout abritant une population de 15 526 personnes. Sœur Edna Gorra a déclaré : “Ce camp était immense. Il comportait des rues, dont chacune était désignée par un nom, des lavabos, des bains, des douches, etc. C’était merveilleux de voir des gens venus de tant d’États différents vivre ensemble en paix dans leurs caravanes, leurs tentes et leurs camping-cars.”

      POINTS SAILLANTS DU PROGRAMME

      Le programme de ce congrès était spirituellement enrichissant. Sœur Hazel Burford, actuellement missionnaire à Panama, déclare à ce sujet : “Nous avons été réjouis de recevoir une explication claire de la question de la domination universelle de Jéhovah en tant que Souverain suprême, et d’apprendre que cette question impliquait l’intégrité de ses serviteurs. (...)

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