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Les Églises dans l’arène politiqueLa Tour de Garde 1982 | 15 avril
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Les Églises dans l’arène politique
“IL EST temps que les croyants aient droit de cité au gouvernement.” Telle est l’opinion d’un pasteur américain. La partagez-vous? Pensez-vous que les croyants devraient se mêler de politique? Beaucoup sont de cet avis, épouvantés qu’ils sont par l’effondrement des valeurs morales, l’accroissement de la criminalité, le déclin économique, les crises internationales, la pauvreté, la famine et la vague d’incroyance qui déferle sur le monde entier.
Il est vrai que les gouvernements sont responsables de bon nombre de ces problèmes. Mais ils sont souvent impuissants à les résoudre. Pis encore, beaucoup ont une réputation entachée de scandales. Ce qu’on a dévoilé sur la corruption et la tromperie en haut lieu a affaibli la confiance des citoyens au point que beaucoup tombent d’accord avec cette femme d’âge mûr qui a dit: “Je commence à croire que tout le système politique est devenu corrompu et immoral.”
Nombre de croyants sincères estiment donc qu’il est du devoir de la religion de faire quelque chose. Pour eux, la religion représente Dieu, et ils croient — avec juste raison d’ailleurs — que le savoir-faire des hommes ne suffira pas à résoudre leurs problèmes. Ils prient pour que Dieu vienne à leur secours, mais sans savoir exactement de quelle façon il le fera. Ils se disent alors que c’est peut-être à eux d’agir, et ils sont heureux de voir des “croyants” intervenir dans la politique pour apporter une note de “piété” au sein du gouvernement. Ministres protestants, prêtres catholiques et autres fidèles des Églises sont donc de plus en plus actifs dans le domaine politique.
Mais est-ce le meilleur moyen, pour la religion, d’apporter un soulagement? Voyons ce que certains croyants font actuellement et quels objectifs ils espèrent atteindre.
La religion dans l’arène politique
Aux États-Unis, certaines religions forment des groupes de pression et maintiennent des représentants au sein même de la capitale pour tenter d’influencer les membres du corps législatif. À quoi espèrent-elles arriver? Un prêtre catholique répond: “Nous pensons que nous exerçons une grande influence à long terme sur les options morales qui donnent le ton de la politique nationale.” Un ministre protestant a ajouté: “Il faut que nous puissions dire aux membres du gouvernement: ‘Vous avez mal agi; vous avez pris la mauvaise voie.’”
De telles pressions s’exerçaient de façon discrète depuis longtemps. Mais, récemment, il s’est produit un phénomène — beaucoup moins discret celui-là — qui est la création, par des fondamentalistes protestants, d’organisations qui servent chacune une cause bien précise. Ces organisations, telles que la Majorité morale aux États-Unis, ont pris la parole en termes vigoureux sur des questions comme le soutien à Israël, les droits des homosexuels, le traité du Canal de Panama, la sécurité de Taïwan et l’avortement. Les hommes politiques ont appris à ne pas sous-estimer l’influence de ces organisations. Celles-ci ont fait perdre les élections à des sénateurs qui avaient pris la défense de programmes qu’elles n’approuvaient pas.
Le Conseil œcuménique des Églises, qui a son siège en Europe, s’est immiscé dans la politique d’une autre manière encore, puisque, depuis 1970, cet organisme aurait fait don de trois millions de dollars à divers mouvements politiques révolutionnaires.
Des ministres ordonnés ont aussi cherché à se faire élire à des postes gouvernementaux. Mais voici, d’après une coupure de presse, ce qui est peut-être la dernière étape de l’engagement politique: “Des prêtres philippins abandonnent leurs paroissiens pour rejoindre les rebelles.” L’article parlait de quatre prêtres catholiques qui avaient rejoint un mouvement de guérilleros communistes. Cette participation active à des mouvements extrémistes est très fréquente, mais elle a déjà coûté cher. En Amérique latine, elle a entraîné la mort, l’enlèvement ou l’exil d’environ 850 prêtres, religieuses et laïques au cours des dix dernières années.
Que pensez-vous d’une telle activité politique de la part de chefs religieux? L’approuvez-vous? Êtes-vous partagé? Peut-être ne voyez-vous rien de mal à ce qu’une religion s’exprime discrètement sur des questions politiques, mais êtes-vous mal à l’aise de savoir que des prêtres prennent part à des révolutions?
Cependant, si nous approuvons l’immixtion de la religion dans la politique, il est difficile de dire où cela doit s’arrêter. S’il est convenable que des ministres ordonnés exercent certaines pressions dans une capitale en faveur de programmes qu’ils jugent bons, pourquoi serait-il mal que des fondamentalistes protestants organisent des groupes de pression à l’échelle nationale dans le but de favoriser des programmes qui leur paraissent importants? Maintenant, si la Majorité morale peut parler en faveur de la défense d’Israël, pourquoi le Conseil œcuménique des Églises ne pourrait-il pas contribuer financièrement aux causes militaires qu’il approuve? Et si cela non plus n’est pas mal, pourquoi des prêtres catholiques, en Amérique du Sud ou en Asie, ne pourraient-ils pas choisir de combattre et de donner leur vie plutôt que de payer pour que d’autres se fassent tuer?
Et pourtant, ne trouvez-vous pas qu’il y a quelque chose qui cloche dans ce raisonnement? Est-ce vraiment là le meilleur moyen d’aider les hommes en ces jours difficiles?
L’effort de la religion pour exercer une influence dans le domaine politique n’est pas chose nouvelle. Le tableau ci-dessous rappelle quelques événements importants dans lesquels religion et politique ont été intimement liées.
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Comment la religion peut-elle apporter un soulagement?La Tour de Garde 1982 | 15 avril
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Comment la religion peut-elle apporter un soulagement?
L’OPPRESSION, la faim, l’effondrement des mœurs, la drogue, la menace d’une guerre nucléaire — ce sont là quelques-uns des problèmes que les ministres ordonnés de certaines religions s’efforcent de combattre par leur activisme. Il est clair que tous les chrétiens sont concernés par ce genre de problèmes. Mais l’immixtion dans la politique est-elle le moyen d’apporter un soulagement?
Les chefs religieux font de la politique parce qu’ils veulent donner une “note morale” ou avertir les gouvernements lorsque ceux-ci prennent la “mauvaise voie”. Mais quand ce sont les ecclésiastiques eux-mêmes qui prennent la mauvaise voie? Aux États-Unis, par exemple, un prêtre dévoué à la cause du nationalisme serbe plastiqua la maison d’un consul yougoslave. On ne peut que condamner un tel acte de terrorisme, surtout de la part d’un prêtre. Quels que soient ses mobiles, un prêtre prétend représenter Dieu. Or, la Parole de Dieu avertit clairement tous les croyants en ces termes: “Ne vous vengez pas vous-mêmes (...); car il est écrit: ‘La vengeance est à moi; c’est moi qui paierai de retour, dit Jéhovah.’” (Romains 12:19). Des actes comme celui du prêtre serbe ne peuvent qu’affaiblir la direction morale que certaines religions s’efforcent de donner.
Même au sein de l’Église catholique, beaucoup doutent sérieusement des prêtres et des religieuses qui prennent part aux révolutions. Un jésuite de Colombie a dit: “Les premiers à souffrir d’une révolte armée sont les pauvres, pas le clergé ni les évêques. Comment peut-on donc soutenir le point de vue de ces derniers?” Le pape lui-même a essayé de couper court à l’activisme de certains ecclésiastiques, en disant que le devoir d’un prêtre ou d’une religieuse est de satisfaire les besoins spirituels du troupeau, et non d’organiser la rébellion.
L’aide financière que le Conseil œcuménique des Églises accorde à certains groupes révolutionnaires donne aussi matière à controverse, d’autant plus que parmi les groupes ainsi aidés, il en est qui avaient déjà persécuté des missionnaires. C’est d’ailleurs ce qui a conduit l’Armée du Salut à se retirer temporairement de l’organisme en question.
Même les groupes de pression protestants aux États-Unis se sont attiré des critiques. Un rédacteur en chef a fait remarquer: “Dans les activités de la droite chrétienne, tout ce qui reste de chrétien, c’est le nom de Jésus.” Cet homme avait manifestement l’impression qu’en se mêlant de politique, les ecclésiastiques se comportaient plus en politiciens sans scrupules qu’en ministres religieux. Cela nous rappelle l’avertissement de Jacques, qui écrivit que le vrai chrétien doit se garder “exempt de toute tache du côté du monde”. — Jacques 1:27.
Pour les personnes réfléchies, l’activisme religieux soulève donc des questions bien épineuses. Mais que faut-il penser des ecclésiastiques qui se contentent de donner un avis “discret” sur certaines questions politiques bien précises? Même cette façon de faire pose des problèmes, car les points de vue des chefs religieux sont contradictoires. Cela n’apporte donc aucun soulagement.
Aux États-Unis, par exemple, certains ecclésiastiques militent pour le désarmement. D’autres, par contre, veulent que leur pays ait “l’armée la plus puissante jamais vue depuis la création”. La Majorité morale travaille pour la “survie de l’Amérique” et de son système capitaliste. Cependant, un représentant du Conseil œcuménique des Églises a écrit: “Pour sauver l’humanité de la destruction, du saccage, de l’exploitation et de l’oppression que le système capitaliste a engendrés, il faut une révolution mondiale.” Sur quoi il s’est mis à louer la version cubaine de cette “révolution mondiale”.
Même en matière de sexualité, les chefs religieux donnent des avis divergents. Comment voulez-vous donc que l’observateur sache quel critère “moral” il faut suivre et quelle “mauvaise voie” il faut éviter? La notion de “bien” et de “mal” varie-t-elle suivant le pays où l’on naît, le parti politique auquel on appartient, la couleur de la peau ou le niveau de vie? Dieu n’a-t-il pas fixé des principes qui puissent s’appliquer à tous les hommes?
De bien des façons, l’immixtion de la religion dans la politique a donc semé la confusion plutôt que d’introduire une note de “piété” dans les affaires du monde. Mais cela signifie-t-il que la religion n’a aucun rôle à jouer? Ne peut-elle rien faire pour apporter un soulagement?
La meilleure aide qui soit
Le fait est que la vraie religion peut être d’un grand secours. Mais avant de voir de quel genre de secours il s’agit, il est indispensable que nous comprenions bien certains points fondamentaux.
Tout d’abord, pour que ses paroles aient du poids, la religion doit parler avec la voix de Dieu, non avec la voix d’un homme. Comment est-ce possible? La Bible nous fournit la réponse en ces termes: “Toute Écriture est inspirée de Dieu et utile pour enseigner, pour reprendre, pour remettre les choses en ordre, pour discipliner dans la justice, pour que l’homme de Dieu soit tout à fait qualifié, parfaitement équipé pour toute œuvre bonne.” (II Timothée 3:16, 17). Un ministre religieux a beau tenir une Bible à la main, s’il exprime son opinion personnelle, celle-ci n’a pas plus de valeur que l’opinion de n’importe quel autre humain. En revanche, si ce qu’il dit se trouve dans la Bible, dans l’“Écriture”, alors il exprime les pensées de Dieu.
Rappelons-nous maintenant ces paroles de Jésus: “Mon royaume ne fait pas partie de ce monde.” (Jean 18:36). La vraie religion, celle qui est basée sur la Bible, doit être neutre quant aux affaires politiques. Qu’il s’agisse d’une nation, d’une race, d’un système politique ou de mesures économiques, elle n’est ni pour ni contre. Les chrétiens défendent le Royaume de Dieu, et non un quelconque “royaume” de ce monde. Ils n’ont donc pas à prendre parti dans les conflits du monde actuel, pas plus que Jésus ne prit position dans les querelles envenimées qui opposaient les Juifs et les Romains de son temps. — Marc 12:17.
Comme certains chrétiens aujourd’hui, Jésus apporta une aide physique aux malades et aux nécessiteux chaque fois qu’il le pouvait. Mais il ne s’est pas mêlé de politique. Son œuvre principale consistait à prêcher la “bonne nouvelle du royaume”. (Matthieu 9:35.) Compte tenu des conditions difficiles qui règnent aujourd’hui dans le monde, prêcher cette “bonne nouvelle” est donc le meilleur moyen pour un chrétien d’aider son prochain.
Pourquoi est-ce plus utile que de faire de la politique? Comme toute personne réaliste en conviendra, c’est parce que, en dépit des efforts sincères et assidus de certains hommes d’État, aucune action politique ne résoudra jamais complètement les problèmes de l’humanité. L’élimination de la pauvreté, de la maladie, de la corruption et de tous nos autres maux réclame une autorité et une puissance suprahumaines. La Bible explique que seul Dieu pourra accomplir ces choses, par le moyen de son Royaume ou gouvernement céleste dont Jésus Christ est le roi. — Jérémie 10:23; Daniel 2:44.
Jésus n’a donc pas donné à ses disciples la mission de chercher à influencer les hommes politiques du monde, mais celle de faire des disciples. C’est pour cela qu’ils prêchent aujourd’hui “cette bonne nouvelle du royaume” par toute la terre habitée (Matthieu 24:14). Ils doivent expliquer aux hommes pourquoi le Royaume apportera bientôt un soulagement et comment l’on sait que sa venue est maintenant très proche. Leur activité consiste à parler à leurs semblables des bienfaits que ce Royaume
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