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Un fléau tenace — La face cachée de la révolution sexuelleRéveillez-vous ! 1984 | 8 décembre
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Un fléau tenace — La face cachée de la révolution sexuelle
BIEN des gens rejettent la faute sur Christophe Colomb. Si c’est le cas, ses marins n’ont pas seulement rapporté du Nouveau Monde des objets en or et des histoires extraordinaires, mais leurs corps portaient les germes d’un fléau.
Toutefois, tous les chercheurs n’acceptent pas cette hypothèse. Certains vont jusqu’à prétendre que le fléau est presque “aussi vieux que l’homme”. Selon eux, des momies égyptiennes portent les traces des séquelles de cette maladie. Par ailleurs, les écrits de l’Antiquité semblaient décrire ces symptômes avec force détails. En outre, les chercheurs se demandent comment un petit nombre de marins auraient pu contaminer une aussi vaste population.
L’origine du fléau reste donc au cœur d’un débat de spécialistes et pourrait bien demeurer un mystère. Toutefois, une chose est sûre: vers la fin du XVe siècle (peu après le retour de Christophe Colomb), un fléau apparut en Europe, se propagea comme un grand embrasement et provoqua des milliers, voire des millions de morts. Dans la panique qui s’ensuivit, les victimes de ce fléau furent bannies, mises en quarantaine, pendues et même noyées.
N’en soyez pas surpris, les nations gagnées par l’angoisse se rejetèrent réciproquement la responsabilité de la maladie. À ce sujet, l’auteur Louis Lasagna a écrit ce qui suit: “Les Anglais et les Turcs l’appelaient le mal français; les Perses en rendaient responsables les Turcs; les Flamands et les Hollandais la désignaient sous le nom de vérole espagnole; les Français l’appelaient la maladie italienne ou napolitaine; de leur côté, les Italiens rejetaient la responsabilité sur les Espagnols ou les Français, et les Portugais la qualifiaient de maladie castillane; (...) les Russes pensaient qu’elle venait de Pologne, tandis que les Polonais tenaient les Allemands pour les responsables.” L’empereur germanique Maximilien Ier prit de la hauteur vis-à-vis des événements et, dans son édit de 1495, proclama que la maladie était un châtiment pour blasphème.
À peine trente-cinq ans plus tard, le médecin et poète Fracastor composa un poème autour du thème d’un berger atteint par cette maladie. Si le poème est tombé depuis longtemps dans l’oubli, ce n’est pas le cas du nom effrayant donné à ce berger, nom d’où dérive celui de la maladie: Syphilus.
Un mal qui se cramponne
À l’ère du scanographe et de la chirurgie au laser, on pourrait croire à l’extinction définitive des fléaux qui tuent et qui mutilent. Pourtant, la syphilis et un large éventail de maladies dévastatrices sont devenues choses courantes dans notre XXe siècle, au même titre que la pollution de l’air. Les médecins qualifiaient de maladie vénérienne ce fléau des temps modernes, le mot dérivant de Vénus, déesse romaine de l’amour. Cependant, une nouvelle expression a vu le jour et met davantage l’accent sur la transmission de la maladie plutôt que sur son mode d’acquisition: MST pour “maladie sexuellement transmissiblea”. C’est un terme générique qui désigne une vingtaine d’affections, depuis l’herpès, qui a acquis une grande notoriété, jusqu’à une maladie plus obscure, la shigellose (voir le tableau pour certaines d’entre elles). Selon l’Organisation mondiale de la santé, les MST constituent “une épidémie mondiale”.
C’est pourquoi les gens posent un regard différent sur la “révolution sexuelle” tant célébrée. Si dans un premier temps ils ont été éblouis par son éclat et sa fascination, ils entrevoient à présent sa face cachée qui se caractérise par une forme d’aliénation, par la douleur et un état pitoyable.
“Une ère d’anarchie sexuelle”
“De vastes changements dans le domaine de la morale sexuelle secouent l’Amérique. On a exprimé la crainte de voir la nation entrer dans une ère d’anarchie sexuelle.” Ces lignes furent écrites en 1966 dans le magazine U.S.News & World Report. Mais ce qui choquait alors les lecteurs ne suscite plus aucune réaction aujourd’hui.
À quoi est dû un pareil changement? À la réunion de plusieurs conditions au cours des années soixante. La liberté de la contraception et la libéralisation des lois sur l’avortement ont permis d’avoir des rapports sexuels sans courir de risque. Des années de lutte dans les domaines économique, politique et social ont entraîné la remise en cause des valeurs morales séculaires. Au premier rang des contestataires se trouvaient les défenseurs de la “nouvelle morale”, au nombre desquels on comptait médecins, hommes politiques, philosophes, écrivains et membres du clergé; tous prétendaient que les “vieilles” restrictions d’ordre sexuel étaient de nature tyrannique et nuisible.
Quelles furent les conséquences de cette nouvelle morale? Elle a provoqué un “glissement spectaculaire vers le laxisme”. Les gens firent l’expérience de la liberté sexuelle. “J’attendais avec impatience une nouvelle ère de liberté sexuelle, a confié l’auteur Celia Haddon. J’avais la conviction que les rapports sexuels entre hommes et femmes ne tarderaient pas à être plus loyaux, plus agréables et plus satisfaisants.”
Pourtant, nombreux sont ceux qui n’ont puisé aucun contentement dans le vagabondage sexuel. Des espérances peu réalistes n’ont fait qu’engendrer des frustrations et de nouvelles anxiétés. À présent, la publication de certaines enquêtes nous apprend que les maladies vénériennes connaissent une forte recrudescence dans le monde. Pour un individu ayant une grande ‘activité génésique’, le risque d’être contaminé ne paraît plus écarté, mais extrêmement possible. Aussi n’est-il pas étonnant de voir les plus acharnés défenseurs de l’amour libre être gagnés par la peur.
Ceux qui ne le sont pas feraient bien de réfléchir au problème.
Les maladies meurtrières
Si la syphilis ne provoque plus des millions de morts comme à l’époque de Christophe Colomb, elle n’en demeure pas moins redoutable. Les examens médicaux ont montré qu’un spirochète, le tréponème pâle, exsude des exulcérations présentes sur les organes génitaux de l’individu atteint, le mode de contamination étant essentiellement vénérien. Une fois à l’intérieur de sa nouvelle victime, le tréponème va envahir le courant sanguin et le système lymphatique, et si sa progression n’est pas interrompue, le corps tout entier est contaminé. Mais la progression des tréponèmes est insidieusement lente. Entre dix et quatre-vingt-dix jours s’écoulent avant que la victime ne remarque l’exulcération caractéristique qui siège à l’endroit du contact infectant, d’habitude les organes génitaux. En l’absence de tout traitement, l’envahisseur peut causer des atteintes irréparables aux organes vitaux, au point même d’entraîner la mort.
Galien, médecin du IIe siècle, inventa le nom du partenaire antique de la syphilis, la gonorrhée ou gonococcie, le symptôme révélateur étant une sensation de cuisson lors de la miction. Mais, selon le ministère américain de la Santé, “chez les femmes, (...) les symptômes peuvent être insuffisants pour susciter les soupçons de la patiente et l’amener à rechercher des soins”. Chez les hommes, les symptômes disparaissent généralement au bout de deux mois. Toutefois, les médecins expliquent que la gonococcie progresse dans le courant sanguin et envahit les organes vitaux, les femmes étant en particulier exposées à des complications gonorrhéiques. À cet effet, on a pu lire dans JAMA (Journal de l’Association médicale américaine): “La plus grave de ces complications est la salpingite aiguë. (...) Aux États-Unis, près d’un million de femmes sont traitées pour cette affection chaque année.” Quelles en sont les conséquences? “La stérilité, les grossesses extra-utérines et les douleurs pelviennes chroniques.”
Cependant, il convient de noter que la majorité des cas de salpingite aiguë sont peut-être dus à des maladies dont la plupart des gens n’ont jamais entendu parler, à savoir les infections à chlamydiae. Les centres américains de dépistage des maladies ont reconnu que “les infections provoquées par chlamydiae trachomatis sont devenues les maladies sexuellement transmissibles les plus fréquentes aux États-Unis”. De son côté, le journal The Age a signalé que la recrudescence des infections à chlamydiae représente un “danger insidieux” pour les Australiens. Les symptômes des infections à chlamydiae sont suffisamment ressemblants à ceux de la gonococcie que même les médecins risquent de s’y tromper.
“Malheureusement, fait remarquer le docteur Yehudi Felman, bon nombre de médecins considèrent encore les infections à chlamydiae comme des maladies mineures.” (Selon le Medical World News). Mais pour les deux millions et demi, voire trois millions de patients qui en sont atteints aux États-Unis, ce ne sont pas des maladies mineures, ni pour les bébés atteints de pneumonie ou de cécité, qui sont nés de mères infectées.
La syphilis et la gonococcie n’occupent plus le premier rang des MST. En Grande-Bretagne, ce sont les maladies autres que la syphilis et la gonococcie (y compris certaines des affections les plus méconnues comme le chancre mou et le granulome inguinal ou donovanose) qui représentent 84 pour cent des cas de MST recensés. Pourquoi ce fléau des MST continue-t-il à occuper le devant de la scène?
‘Disparu de la scène’
En 1949, le docteur John Mahoney expliqua qu’à la suite de l’emploi des antibiotiques “la gonococcie avait presque disparu en tant qu’entité clinique importante”. Ces mots étaient caractéristiques de la foi que la profession médicale et le grand public plaçaient dans les nouveaux médicaments miracles tels que la pénicilline. Acquis à l’idée que la science avait porté un coup fatal à cette MST, de nombreux médecins perdirent tout intérêt pour l’étude de la maladie. Dans les pays d’Afrique du Centre et de l’Ouest, les programmes financés par les Nations unies pour la suppression de la syphilis et des maladies connexes semblèrent d’une telle efficacité que les responsables relâchèrent leur surveillance.
Aussi les changements rapides survenus au cours des années 1960 prirent-ils au dépourvu presque tout le monde. Entre ‘1965 et 1975, le nombre de cas recensés de gonococcie a triplé aux États-Unis’. (Centres de dépistage des maladies.) L’augmentation du tourisme due en grande partie au développement du transport aérien a contribué à la propagation de la maladie d’un pays à l’autre. Dès lors, une épidémie mondiale de MST ne pouvait que couver. De son côté, Theodor Rosebury écrivait: ‘On a fait une terrible découverte: Les jeunes médecins et les étudiants en médecine ignorent presque tout des MST.’ — D’après l’ouvrage Les microbes et les règles de morale, angl.
Par conséquent, les médecins ont eu fort à faire pour prendre le pas sur la recrudescence épidémique des MST, même s’ils prétendent que des traitements efficaces existent pour la plupart d’entre ellesb. Par le fait, le nombre de sujets affectés progresse plus vite que les cas guéris.
Une grande quantité de maladies sexuellement transmissibles ont frappé l’humanité depuis des années, mais deux ont fait récemment l’objet d’une grande publicité: l’herpès et le SIDA. L’article suivant se propose d’en parler.
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Herpès et SIDA sous le feu des projecteursRéveillez-vous ! 1984 | 8 décembre
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Herpès et SIDA sous le feu des projecteurs
“JE ME sens lépreux. Qui voudrait de moi sachant que je suis atteint d’une maladie incurable sexuellement transmissible?” Ce sont là les propos tenus par un herpétique. Ce mal sévit aux États-Unis, au Canada, en Europe et au Japon. Aux États-Unis, on estime que le nombre d’individus atteints par la maladie varie chaque année entre 200 000 et 500 000. Au Canada, un médecin a estimé que “20 000 à 50 000 nouveaux cas sont recensés chaque année”.
Le responsable de tous ces maux est une minuscule particule, un virus, qui fait partie de la grande “famille” des herpès. La varicelle et le zona sont des affections courantes provoquées par les herpès virus. L’herpès virus qui provoque l’herpès génital est semblable (parfois identique) au virus qui est à l’origine des boutons de fièvre sur les lèvres (herpès labial). Toutefois, lorsque l’herpès siège sur les organes génitaux, le porteur a été d’ordinaire (mais pas toujoursa) contaminé au cours de rapports sexuels avec un partenaire qui en était déjà victime.
Entre trois et sept jours après la contamination, la personne atteinte éprouve une sensation de cuisson ou de prurit dans la région génitale, un signe annonciateur de l’apparition de vésicules remplies de liquide. Les vésicules harcèlent le porteur pendant une période de deux à six semaines avant de guérir. Mais l’herpès ne s’en va pas pour autant. Selon les médecins, il bat en retraite, dans le tissu nerveux, et se réfugie dans le ganglion du nerf trijumeau. Là, l’agent infectieux demeure inactif jusqu’à ce qu’un facteur (tel que le stress déclenche une poussée récurrente. Le virus fait alors le voyage inverse jusqu’à la peau et commence un nouveau cycle douloureux pour le patient.
L’impact le plus insidieux de l’herpès, c’est peut-être son action sur les émotions du malade. “Le principal problème lié à l’herpès n’est pas tant le virus lui-même que la façon dont sa présence engendre des craintes, des doutes et des perturbations dans la vie de tous les jours.” (D’après une observation du docteur Oscar Gillespie). De son côté, un herpétique a confié: “Il est très difficile de décrire le sentiment de colère et de culpabilité que vous éprouvez lorsque vous êtes atteint par la maladie et que vous êtes totalement à sa merci. Je crois que seul un autre herpétique peut comprendre ce que vous ressentez.” De plus, ce bouleversement émotionnel ne fait que prolonger le cycle de la souffrance en déclenchant souvent une nouvelle poussée récurrente de la maladie.
Pourquoi la qualifier d’incurable?
Pourquoi le système immunitaire de l’organisme ne détruit-il pas tout simplement l’herpès virus? Les médecins expliquent que l’herpès échappe à ce sort en se fixant sur la membrane d’une cellule, en pénétrant au sein de celle-ci et en s’y cachant. Protégé à l’intérieur de la cellule, le virus va prendre le contrôle du “cerveau” de la cellule, le noyau, et transformer la cellule en une véritable usine servant à la fabrication d’autres virus. Entre 80 000 et 120 000 nouveaux virus sont fabriqués en l’espace de trois à cinq heures. La membrane cellulaire éclate alors et laisse échapper une armada de particules dangereuses qui vont affecter le courant sanguin et d’autres cellules.
Vous comprenez ainsi aisément pourquoi il est aussi difficile de tuer l’herpès virus. Un traitement devrait en quelque sorte pénétrer à l’intérieur des cellules infectées pour tuer le virus. Or, un tel médicament aurait à détruire les cellules infectées sans toucher les cellules saines. On comprend maintenant pourquoi la science médicale est mise jusqu’à présent en échec (voir le tableau). Des informations récentes ayant trait à la mise au point de vaccins antiherpétiques ont redonné une lueur d’espoir. Mais si un peu de prévention peut apporter un soulagement aux individus, qu’en est-il cependant de ceux qui sont déjà touchés par la maladie?
Le SIDA: une nouvelle MST?
“Dans toute ma carrière, je n’ai jamais rencontré une situation aussi frustrante et aussi déprimante”, a confié le docteur P. Mansell au magazine Newsweek. Ce médecin faisait allusion à une maladie qui a retenu l’attention de tous les médias: le SIDA (syndrome immuno-déficitaire acquis). Par ce terme on désigne une dépression grave du système de défense immunitaire de l’organisme. Ceux qui en sont victimes succombent à des formes rares de cancer et de pneumonie.
Quelle est l’étendue du SIDA? Aux États-Unis, on a recensé à ce jour plus de 4 000 casb et au moins 32 autres pays ont signalé des malades atteints de ce mal. Des pays relativement non touchés comme le Japon ont d’ailleurs pris toutes les mesures pour lutter contre ce mal, au cas où...
Le taux de mortalité des victimes du SIDA est incroyablement élevé. Plus de soixante pour cent des premiers malades sont morts en l’espace d’un an. D’autres observateurs craignent que toutes les victimes du SIDA meurent de cette maladie. Pourtant la genèse du syndrome est bien innocente: symptômes voisins de ceux de la grippe, fatigue et perte de poids. Malheureusement, le docteur Frederick Siegal a fait cette remarque: “Le jour où la plupart des patients atteints du SIDA vont consulter un médecin, la partie est déjà perdue.”
D’après les centres américains de dépistage des maladies, ce sont les homosexuels ‘actifs’ (ayant une multitude de partenaires) qui courent le plus grand risque de contracter le SIDA. Parmi les populations à risques, citons les hémophiles et les drogués utilisant des injections intraveineusesc. Mais puisque soixante-dix pour cent des victimes du SIDA étaient des homosexuels, on suspecte fortement la maladie d’être dans la plupart des cas sexuellement transmissible.
La panique du SIDA
“La peur se propage plus rapidement que la maladie elle-même”, expliquait la revue Discover. Il ne fait aucun doute que des titres du genre “Un contact ordinaire suffit à la contagion” aient provoqué un vent de panique:
● Des membres du personnel hospitalier ont refusé de soigner des patients atteints du SIDAd.
● Les entrepreneurs de pompes funèbres ont montré de la répugnance à embaumer les corps des victimes du SIDA.
● La police de San Francisco a reçu des appareils de réanimation et des gants en caoutchouc pour éviter toute infection par le SIDA lors des premiers secours.
● Des techniciens ont refusé de tendre un microphone à une personne atteinte du SIDA qui était invitée sur un plateau de télévision. Le but de l’émission? Dissiper les craintes relatives au SIDA.
● Les centres téléphoniques (créés à cause du SIDA) “ont été submergés par les appels de correspondants qui étaient soucieux de savoir s’il était possible de contracter la maladie en touchant les poignées du métro ou en se servant des toilettes utilisées par les homosexuels”.
Toutefois, c’est la communauté homosexuelle qui a été la plus touchée. Les bars et les saunas fréquentés par les homosexuels ont signalé un ralentissement de leurs affaires, leur clientèle craignant de contracter le SIDA. Puisque les homosexuels ayant de multiples partenaires constituent la population à plus hauts risques, certains d’entre eux ont opéré des changements radicaux dans leur mode de vie. Peu, s’il en est, sont devenus hétérosexuels. D’autres ont évité les contacts sexuels anonymes et se sont installés dans un régime homosexuel ‘monogamique’.
Toutefois, c’est la victime du SIDA qui endure l’angoisse véritable. Traitée en paria par ses voisins et ses collègues de travail, abandonnée par ses amants, la victime du SIDA doit également porter le fardeau d’une maladie incurable. “Cela vous pend au-dessus de la tête, a expliqué une victime du SIDA. Il y a toujours cette incertitude obsédante qu’un jour, demain peut-être, vous allez attraper quelque chose contre lequel votre système immunitaire impuissant ne pourra lutter.”
Si la réaction du public peut paraître excessive dans une certaine mesure, la crainte du SIDA, elle, est bel et bien fondée. Le SIDA tue en traître. Et les rapports établissant qu’il s’était étendu au grand public par les transfusions sanguines n’ont fait qu’accroître les craintes et le ressentiment (voir le tableau à la page 9)e. Ainsi, les homosexuels deviennent non seulement les victimes de l’hostilité, mais aussi d’un mode de vie où les dangers ne sont pas absents.
[Notes]
a Il arrive parfois que des sujets contractent l’herpès avec leurs doigts en touchant des vésicules herpétiques. De là, ils peuvent propager la maladie aux autres parties du corps, par exemple les organes génitaux, par simple attouchement.
b Il se peut que tous les cas recensés n’impliquent pas le même syndrome, puisque le SIDA recouvre un large éventail de symptômes. Par ailleurs, les cas de SIDA peuvent être grossièrement sous-estimés, de nombreuses victimes craignant les retombées liées au fait d’être porteur de ce mal.
c Les centres de dépistage des maladies ont précisé à Réveillez-vous! que les explications tenant à établir un lien entre le SIDA et les pratiques vaudou des Haïtiens ne sont pas fondées.
d Les centres de dépistage des maladies ont établi une liste de précautions à prendre pour les laborantins et le personnel hospitalier, bien qu’ils prétendent que la transmission du SIDA “ne semble pas probable lors d’un contact occasionnel”. Ces précautions prévoient le port de gants lors de la manipulation des échantillons de sang provenant des malades atteints du SIDA, la destruction des aiguilles employées sur ces patients ainsi que le port de blouses de chirurgien.
e Le 23 avril 1984, des chercheurs ont annoncé avoir isolé le virus qui provoque le SIDA. L’existence d’un test sanguin efficace permettant d’identifier ce mal a été annoncé. Toutefois, on est encore loin d’avoir trouvé les moyens de le guérir.
[Entrefilets, page 10]
Le docteur Frederick Siegal a fait cette remarque: “Le jour où la plupart des patients atteints du SIDA vont consulter un médecin, la partie est déjà perdue.”
La peur de contracter une maladie sexuellement transmissible a amené beaucoup de gens à considérer la promiscuité sexuelle sous un jour nouveau.
[Encadré/Illustration, page 8]
Peut-on guérir l’herpès?
Les médecins expliquent que les faux bruits de guérison concernant l’herpès ont non seulement allumé de faux espoirs, mais ont contribué à aggraver une situation qui n’était déjà guère brillante. Les centres de dépistage des maladies ont jugé inefficaces certains traitements parmi lesquels on compte les vaccins, les immuno-stimulants, les vitamines C, E et B12, les régimes alimentaires, le zinc, les comprimés de lactobacillus (acidophilus), les crèmes stéroïdes et la photothérapie.
Mais pourquoi tant de gens disent-ils avoir été soulagés grâce à ces “thérapeutiques”? Les médecins rappellent que le stress et l’anxiété semblent déclencher les poussées récurrentes de l’herpès. Un traitement qui calme le stress et rend moins anxieux le patient peut donc laisser entrevoir le décours temporaire de la maladie. Toutefois, ce n’est qu’une question de temps avant que l’herpès virus, tapi dans les cellules de l’organisme, ne décide de déclencher une autre offensive. Bien entendu certains des traitements énoncés ci-dessus font l’objet d’une controverse, mais il serait sage d’examiner minutieusement les données d’un traitement avant de s’y soumettre.
À l’heure actuelle, tout ce que la science médicale peut proposer, c’est une diminution de l’intensité des symptômes herpétiques. L’Aciclovir, un médicament qui a été récemment commercialisé aux États-Unis et en Europe, favorise la guérison des vésicules herpétiques, mais n’empêche pas, hélas, les phénomènes de récurrence.
Les médecins dispensent aux herpétiques des conseils qui relèvent du bon sens et peuvent procurer un certain soulagement: repos, bains chauds, emploi d’une vessie de glace et hygiène correcte. Cependant, ces conseils ne constituent pas, et de loin, un moyen de guérison.
[Encadré/Illustration, page 9]
Le SIDA et le sang
Les premiers touchés furent les hémophiles. Le traitement destiné à leur maladie (facteur sérique de coagulation VIII) provient du sang de centaines de donneurs. Aussi, lorsque des hémophiles contractèrent le SIDA, on suspecta immédiatement le sang. Puis un enfant qui avait reçu une transfusion de sang d’un donneur porteur du SIDA fut atteint à son tour de cette maladie. Bien que les risques de contracter le SIDA à la suite d’une transfusion semblaient minces, les centres de dépistage des maladies demandèrent aux “membres des groupes à hauts risques [en premier lieu les homosexuels] de s’abstenir de donner du plasma ou du sang”.
Mais obtenir le consentement des donneurs de sang a été plus facile à dire qu’à faire. La communauté homosexuelle a crié à la discrimination quand on lui a suggéré de s’abstenir du don du sang. En Europe, les médecins ont décidé de limiter l’importation de fractions de sang en provenance des États-Unis et certains patients ont même refusé de recevoir des transfusions de sang.
La crainte de contracter le SIDA par des aiguilles infectées a même causé un début de panique chez les donneurs de sang. Selon un porte-parole des banques de sang du Grand New York, le nombre de donneurs a baissé de vingt-cinq pour cent pendant le mois de juillet 1983, et cela bien que les aiguilles employées lors des prélèvements soient stérilisées et mises sous emballage hermétique avant emploi, et détruites après usage.
Si l’annonce récente d’un test systématique des échantillons de sang peut préserver les banques de sang de la contamination par le SIDA, la peur qu’a provoquée cette maladie a rappelé au public que la transfusion de sang est une thérapeutique qui s’accompagne de risques non négligeables.
[Schémas, page 7]
(Voir la publication)
Première étape: L’herpès virus se fixe sur la membrane de la cellule et pénètre en son sein.
MEMBRANE CELLULAIRE
NOYAU
ADN CELLULAIRE
HERPÈS VIRUS
ADN VIRAL
Deuxième étape: Le virus prend le contrôle du noyau cellulaire et va s’en servir pour synthétiser des milliers d’herpès virus.
DESTRUCTION DU NOYAU CELLULAIRE
NOYAU VIRAL
ADN VIRAL
NOUVEAU VIRUS
Troisième étape: La paroi cellulaire se brise et libère des milliers de virus.
PAROI CELLULAIRE
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La “nouvelle morale” moissonne-t-elle ce qu’elle a semé?Réveillez-vous ! 1984 | 8 décembre
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La “nouvelle morale” moissonne-t-elle ce qu’elle a semé?
“DIEU a remplacé le feu et le soufre par le SIDA”, a écrit un lecteur indigné au New York Post. Beaucoup de gens estiment que la progression épidémique du SIDA, de l’herpès et des autres MST n’est pas seulement une conséquence de la révolution sexuelle, mais un châtiment divin pour débauche.
Le spectre des MST est tout à fait effrayant. Pourtant la Bible n’indique pas que Dieu se sert de la maladie pour châtier une conduite rebelle. La maladie est la conséquence inéluctable du péché héréditaire qui frappe tous les humains (Romains 5:12). Aussi, même des humains qui craignent Dieu et mènent une vie droite sont parfois victimes de terribles maladies.
Néanmoins, l’adhésion à des préceptes de piété peut améliorer le sort d’un individu, y compris son état de santé. La Bible condamne par exemple l’abus de boissons alcooliques (I Corinthiens 6:9, 10; I Timothée 3:8). Les Proverbes (23:29-34) énoncent certaines des raisons pour lesquelles il s’agit là d’une sage prise de position:
“Pour qui les ‘Malheur’? Pour qui la gêne? Pour qui les disputes? Pour qui la préoccupation? Pour qui les blessures sans raison? Pour qui les yeux ternes? Pour ceux qui restent longtemps auprès du vin (...). À sa fin il mord comme un serpent, et il sécrète du venin comme une vipère. Tes yeux verront d’étranges choses, et ton cœur exprimera des choses perverses. Et tu deviendras assurément comme celui qui se coucherait au cœur de la mer, oui, comme celui qui se coucherait au sommet d’un mât.”
Blessures, vie délabrée, hallucinations, comptent parmi les effets nuisibles de l’ivrognerie. Or, on ne peut rendre Dieu responsable des maux qu’un individu s’attire en faisant fi des principes divins. En Galates 6:7, 8, la Bible précise: “Ne vous laissez pas égarer: on ne se moque pas de Dieu. En effet, quoi que l’homme sème, c’est aussi ce qu’il moissonnera; car celui qui sème en vue de sa chair moissonnera de sa chair la corruption.”
La véracité de ce principe se vérifie aussi dans le domaine de la morale sexuelle. En I Corinthiens 6:18, la Bible émet cette mise en garde: “Fuyez la fornication. (...) celui qui pratique la fornication pèche contre son propre corps.” Le terme “fornication” englobe un large registre de péchés d’ordre sexuel, y compris les relations charnelles avant le mariage et l’homosexualité. Remarquez bien qu’il s’agit d’un péché contre son propre corps. L’apôtre fit cette autre remarque: “Or le corps n’est pas pour la fornication.” (I Corinthiens 6:13). Les facultés procréatrices des humains ont été conçues en vue d’un dessein sacré: peupler la terre d’enfants justes (Genèse 1:28). Les relations sexuelles devaient également procurer un plaisir mutuel au couple dans le cadre du mariage. — I Corinthiens 7:3-5; Proverbes 5:18-20.
La promiscuité sexuelle constitue donc une insulte à cet arrangement divin. Dès lors, elle est moralement avilissante et rend celui qui la pratique impur aux yeux de Dieu. En fin de compte, elle conduit au jugement exprimé en I Corinthiens 6:9, 10: “Ni fornicateurs, ni idolâtres, ni adultères, ni hommes qu’on entretient pour assouvir sur eux des appétits contre nature, ni hommes qui couchent avec des hommes (...) n’hériteront le royaume de Dieu.” Cependant, celui qui ‘pèche contre son corps’ peut également ‘moissonner ce qu’il a semé’ sur le plan physique et émotionnel. Les maladies sexuellement transmissibles ne sont qu’une fraction de la multitude de problèmes que rencontre celui ou celle qui couche avec n’importe qui: mariages brisés ou peu sûrs, chagrins répétés, crainte d’une grossesse, méfiance vis-à-vis d’autrui. Les homosexuels, eux aussi, ‘reçoivent en eux-mêmes la rétribution intégrale qui leur était due en raison de leur égarement’, dit la Bible (Romains 1:27). Leurs actes sexuels impudiques et obscènes, accomplis avec de multiples partenaires ou avec un seul, sont “contre nature”. (Romains 1:26.) Dès lors, devrions-nous être surpris de voir leur vie être affectée par un grand nombre de troubles physiques?
Une liberté dévoyée
Ainsi le fléau des MST n’a pas seulement été une source de gêne physique pour une poignée de personnes. À cause de ce fléau, un mode de vie prometteur de liberté s’en est trouvé assombri et n’a procuré à beaucoup que détresse et chagrin. L’idée selon laquelle on pouvait se livrer à des relations sexuelles illicites sans aucune conséquence, grâce à la pilule et à la pénicilline, s’est avérée une belle niaiserie. Bien sûr, les chrétiens ne se réjouissent pas des souffrances d’autrui. Toutefois, ils nourrissent l’espoir de voir ceux qui se sont embarqués et fait piéger sur la voie de la promiscuité sexuelle réfléchir à leur mode de vie et à ce qu’il en résulte. Il n’est ni trop tard ni trop difficile pour de telles personnes de procéder au réajustement indispensable. Des chrétiens du premier siècle réussirent à fuir le piège de l’immoralité sexuelle et, de nos jours, les Témoins de Jéhovah ont aidé des milliers de gens à y parvenir. — I Corinthiens 6:9-11.
Pourtant il est triste de devoir convenir que la majorité des humains semble résolue à continuer sa course égoïste. De même que la peur des bombes atomiques n’a su promouvoir la paix, de même la peur d’attraper une MST ne saurait encourager à la longue une conduite chaste. Cela rejoint les propos d’un étudiant d’une université: “Je pense que le SIDA et l’herpès sont définitivement entrés dans les esprits. Mais je ne crois pas qu’ils aient réduit d’une manière quelconque l’empreinte de la révolution sexuelle chez les jeunes de mon âge.”
Il serait hors de propos de déterminer si le SIDA, l’herpès et leurs autres compagnons, souvent mortels, continueront à se propager à un rythme épidémique ou bien tomberont dans l’oubli. Mais l’aspect rayonnant de la nouvelle morale aura cependant causé des dommages irrévocables. Cette nouvelle morale aura été dénoncée comme un mode de vie improductif et dangereux. À leur grande consternation, les défenseurs de l’amour libre découvrent qu’après tout un amour illicite n’est pas aussi ‘libre’ que cela, le prix à payer étant souvent trop élevé.
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