Coup d’œil sur le monde
L’usage du tabac augmente
Malgré les avertissements concernant les effets nocifs du tabac, la consommation de cigarettes augmente dans le monde entier. Selon un rapport présenté le 30 septembre 1969 devant un comité de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, en 1966 (dernière année pour laquelle les chiffres sont complets) on consomma dans le monde plus de 2,8 mille milliards de cigarettes. Ce chiffre représente une augmentation de 45 pour cent sur la consommation moyenne de 1955 à 1959 et indique un accroissement annuel de 70 000 000 000 de cigarettes fumées. En France, en 1968, on a fumé 63 milliards et demi de cigarettes, soit une augmentation de 4,9 pour cent sur 1967.
À propos de la nocivité du tabac, une enquête menée dernièrement en Amérique a révélé que les enfants qui respirent à la maison un air pollué par la fumée du tabac sont deux fois plus exposés aux affections respiratoires que ceux qui vivent dans un foyer où personne ne fume. Le médecin qui a mené cette enquête déclara que celle-ci a démontré que non seulement le fumeur ruine sa propre santé, mais qu’il met également en danger celle de ses enfants. Par ailleurs, huit cents pédiatres réunis à Strasbourg ont mis l’accent sur le rôle nocif du tabac chez la femme enceinte et ses conséquences redoutables sur le développement de l’enfant.
Première foire pornographique au monde
C’est au Danemark qu’a eu lieu en octobre dernier la première foire de la pornographie, qui a attiré plus de journalistes que la visite de M. Krouchtchev ou le mariage de la princesse Margaret. On évalue le chiffre d’affaires annuel de l’industrie pornographique danoise à près de 400 millions de francs français. L’exportation représente 80 pour cent de cette somme. Il est à noter que les meilleurs clients sont les États-Unis et l’Allemagne de l’Ouest. Le ministre danois de la justice a autorisé cette foire pour “dédramatiser” la pornographie. Selon lui, la censure ne profitait qu’aux éditeurs qui pouvaient, grâce à elle, décupler leurs tirages et leurs prix. Il pense aussi que l’attrait de la chose défendue accentue le goût du risque, et que la suppression de la censure portera un coup fatal aux professionnels de ce genre de littérature.
Quelques groupements danois ont créé un “comité de lutte” décidé à engager une “croisade de sept ans” contre l’abolition de la censure dans ce domaine. Le président de ce comité déclara : “Il a fallu sept tours de ville pour faire tomber les murs de Jéricho. Nous combattrons sept ans et sept fois sept ans si cela est nécessaire pour arriver à nos fins.” Un groupe de militants dressa dans un bois du Jutland une pierre tombale portant l’épitaphe suivante : “Ci-gît la grande pudeur danoise, assassinée en juin 1969. Elle ressuscitera quand l’âme de notre peuple se réveillera.”
Le nouveau rituel de la messe
Selon la congrégation romaine pour le culte divin, le nouveau rituel de la messe, entré en vigueur le 30 novembre, a pour but de rendre celle-ci plus intelligible aux fidèles et de les appeler à mieux y participer, en particulier les femmes. Il s’agit de la plus grande réforme liturgique depuis le concile de Trente. L’application de cette réforme peut néanmoins être progressive, à condition d’être achevée le 28 novembre 1971. De nouvelles mélodies soutiendront les textes en langue vivante. Dernièrement, le vicariat de Rome a même pris la défense de la “messe des jeunes”, et Radio-Vatican a diffusé une œuvre musicale chantée accompagnée de guitare et batterie, afin de montrer la place de la musique moderne dans la liturgie. Cependant, dans le cadre d’une campagne de protestation contre le nouveau rituel de la messe, les cardinaux Ottaviani et Bacci ont adressé une lettre au pape le suppliant d’abroger la législation à ce sujet. Cette lettre dit entre autres que “ces nouveaux changements ne pourront que désorienter totalement les fidèles et la meilleure partie du clergé déjà en proie à une torturante crise de conscience à un moment où se multiplient les plus graves dangers contre la pureté de la foi et l’unité de l’Église”.
“L’alcoolisme, maladie sociale”
Tel a été le thème du troisième Congrès national sur l’alcoolisme tenu à Versailles, congrès qui a fait ressortir des faits notoires sur l’alcoolisme en France. On a souligné notamment que l’on compte dans ce pays quatre millions de “buveurs excessifs” et un million et demi à deux millions d’alcooliques. La sécurité routière tient l’alcool responsable de 40 pour cent des accidents de la circulation, tandis que les magistrats reconnaissent le rôle important qu’il joue dans l’accroissement de la criminalité. On a signalé que 67 pour cent des cancers de la cavité buccale, du pharyngo-larynx et de l’œsophage surviennent chez des alcooliques. La France est parmi les premiers pays du monde pour la mortalité par ces cancers. Il a également été souligné que, contrairement à ce qu’affirment certains, l’alcoolisme juvénile est en recrudescence depuis 1965, car beaucoup de jeunes se mettent à boire pour lutter contre leur anxiété, leur sentiment d’échec et de solitude, leurs frustrations affectives, et pour se sentir mieux intégrés à la “bande”. En 1969, la France a détenu le record de l’alcoolisme avec une moyenne de consommation de 27 litres d’alcool pur par habitant. Commentant l’asservissement de nombreuses personnes à l’alcool et à la drogue, Le Figaro déclara : “Si les jeunes, mais aussi tant d’adultes, voire de vieillards, cherchent dans l’alcool ou la drogue un refuge ou une évasion, c’est qu’ils n’ont pas trouvé (...) dans le monde où ils ont à vivre, les valeurs et les joies qui font le prix de la vie. À la mort de Dieu, succèdent infailliblement ‘les paradis artificiels’.”
“Optimiste avec modération”
À l’issue des débats du synode, le cardinal Suenens, porte-parole des partisans d’une collégialité accrue au sein de l’Église catholique, se déclara “optimiste avec modération”. Il ajouta : “On pourrait comparer la session du synode qui vient de se terminer à une cabine d’ascenseur qui se trouverait au troisième étage, mais qui est attendue au dixième. Si on la regarde d’en bas, elle est haute ; si on la regarde d’en haut, elle est basse.” Selon ce prélat, les réformes récentes les plus importantes seraient la régularité des synodes (qui seront convoqués tous les deux ans) et la création d’une commission internationale de théologiens. Le cardinal Suenens aurait aimé voir figurer à l’ordre du jour du synode la question de l’élection du pape ainsi que celle du rôle des nonces apostoliques ou celle du célibat sacerdotal.
La marijuana dans l’église
Si beaucoup de nos contemporains se détournent de la religion, c’est souvent à cause de l’attitude des ecclésiastiques eux-mêmes. Par exemple, Robert Cromey, pasteur épiscopalien, déclara en septembre dernier, devant un tribunal américain, qu’à son avis la marijuana pourrait être l’un des sacrements au même titre que le pain et le vin du culte “chrétien”. Il avoua que lui-même fume cette substance illégale et affirma croire que l’usage de la drogue était probablement derrière de nombreuses expériences religieuses consignées dans la Bible. Quoi d’étonnant que, devant de tels propos, de nombreuses personnes abandonnent les Églises ?