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Les pétroliers géants — des “monstres marins” en voie d’extinction?Réveillez-vous ! 1978 | 22 mars
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Le début des années 1960 a vu naître le premier pétrolier d’une capacité de 100 000 tonnes. À partir de ce moment, on fit des progrès si rapides qu’à peine établi, chaque nouveau record était déjà battu. À ce jour, le plus grand des pétroliers géants a un port en lourd d’environ 500 000 tonnes.
On a déjà fait les plans de navires plus grands encore. Les chantiers navals de Belfast pourraient construire des pétroliers d’une capacité de 1 000 000 de tonnes. Rien ne semble pouvoir arrêter les constructeurs si ce n’est la résistance des matériaux et l’absence de ports assez profonds pour accueillir des navires aussi énormes.
Mais pourquoi a-t-on fait des pétroliers de plus en plus grands?
Les raisons
La raison fondamentale est FINANCIÈRE. Beaucoup de multimilliardaires du monde entier ont amassé la majeure partie de leur fortune en spéculant sur les pétroliers géants. Les compagnies pétrolières prétendent que c’est grâce à ces navires qu’on a pu maintenir relativement bas le prix d’un grand nombre de produits pétroliers. Pourquoi en est-il ainsi? D’après l’Encyclopédie britannique, “le coût du transport diminue à mesure que les dimensions du bateau augmentent. Le prix du transport du pétrole dans un navire d’une capacité de 200 000 tonnes est 25 pour cent plus bas que dans un bateau d’une capacité de 16 000 tonnes”. (Édition de 1976, Macropædia, tome XVI, p. 689.) Cette situation est due à plusieurs facteurs. L’équipage est à peu près le même, que le pétrolier soit grand ou petit. Les frais de personnel ne varient donc pas. De plus, à une vitesse donnée, un grand navire se déplace plus facilement qu’un petit; il a donc besoin de moins d’énergie et par conséquent de moins de carburant.
La demande croissante en produits pétroliers a également contribué à la vogue des pétroliers géants. Dans les années 1930, le charbon satisfaisait 75 pour cent des besoins en énergie du monde. Dans les années 1950, la préférence alla au pétrole. Or, si la Russie et ses alliés sont capables de pourvoir à leurs besoins, l’Europe occidentale et le Japon, eux, dépendent presque entièrement des pays producteurs, principalement des États arabes. Dans les années 1970, même l’Amérique du Nord a dû importer du pétrole, alors qu’auparavant elle pouvait se suffire à elle-même.
Devant la demande toujours croissante, il fallait une flotte de pétroliers pour transporter le pétrole depuis les endroits où il abonde, autour du golfe Persique, jusqu’aux pays consommateurs, à des milliers de kilomètres de distance. Au début des années 1970, la demande mondiale en pétrole augmentait au taux annuel de 7 à 9 pour cent. On avait donc besoin de bateaux-citernes plus grands et les pétroliers géants répondaient à ce besoin.
Après l’essor, la crise
Puis, à la fin de 1973, les États arabes mirent l’embargo sur les exportations de pétrole. En quelques semaines, le prix du pétrole du Moyen-Orient avait quadruplé, ce qui augmenta les revenus des producteurs, mais mit un frein à la demande qui, en certains endroits, avait crû jusque-là d’environ 10 pour cent par an.
Avant cette crise soudaine, on pensait que la demande en pétrole augmenterait régulièrement. C’est pourquoi on construisait de nombreux pétroliers géants. Mais, brusquement, la flotte mondiale de pétroliers se trouva trop importante pour la demande. Les navires en cours de construction allaient s’ajouter au surplus, aggravant encore la situation. Partout dans le monde, des pétroliers géants étaient désarmés, et, quand c’était possible, les commandes de nouveaux bateaux-citernes étaient annulées.
D’autres problèmes
Ces problèmes économiques ne sont pas les seules difficultés que les pétroliers géants ont rencontrées pendant leur courte histoire. Selon certaines autorités, les progrès technologiques, qui ont permis la construction de ces gigantesques navires, ont été plus rapides que la solution des problèmes de sécurité qu’ils posaient.
L’un des plus graves est le risque d’explosion. Quand les réservoirs ont été vidés, il s’en échappe des gaz très inflammables, à moins qu’on ne prenne des précautions spéciales. En général, le risque d’explosion est proportionnel aux dimensions du réservoir. Après que trois pétroliers géants eurent explosé en décembre 1969, on employa de nouvelles méthodes pour nettoyer les réservoirs. On refoula les gaz explosifs avec les gaz d’échappement inertes (non volatils) provenant des moteurs du bateau, technique qui n’empêcha pas le pétrolier géant Berge Istra d’exploser, le 29 décembre 1975.
Un autre problème concerne la navigation. À cause de leurs dimensions et de leur forme, il est difficile de manœuvrer avec précision ces énormes navires et il faut un temps considérable pour les arrêter.
Le “tirant d’eau” (partie du navire qui est sous l’eau) de ces pétroliers géants est si grand que peu de ports peuvent les accueillir. Dans certains endroits, tel le Pas-de-Calais, ces bateaux ne se trouvent qu’à 30 ou 60 centimètres du fond de la mer. Souvent on doit les décharger dans des ports spécialisés aux eaux profondes, comme Bantry Bay, en Irlande.
Beaucoup de gens se plaignent de ce que ces pétroliers géants présentent un danger constant de pollution. Après une collision ou un échouement, accidents difficiles à éviter, d’énormes quantités de pétrole risquent de se répandre. Quand le Torrey Canyon s’échoua à Land’s End, en Angleterre, en 1967, ses 100 000 tonnes de pétrole brut se déversèrent dans la mer. Ce fut un désastre pour les poissons et les oiseaux, car des kilomètres de côtes furent polluées. Cette catastrophe accéléra la mise au point de meilleures méthodes de nettoyage en vue de catastrophes futures. Outre de tels désastres, de nombreuses autorités s’inquiètent des dégâts inconnus causés à l’écologie délicate des mers par les millions de tonnes de pétrole répandues chaque année accidentellement ou par négligence.
Ce revers du destin des pétroliers géants illustre bien la nature capricieuse des affaires humaines. À présent, tout projet visant à développer ces vaisseaux est enterré. Certains prédisent même “la mort des dinosaures de haute mer”. Selon le cours normal des choses, la flotte mondiale des pétroliers géants devrait disparaître. Mais, bien que leur avenir représente un grand point d’interrogation, seul le temps nous dira si ces “monstres marins” sont simplement en état d’hibernation ou s’ils sont en voie d’extinction.
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“Noé” au SurinamRéveillez-vous ! 1978 | 22 mars
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“Noé” au Surinam
DANS le sud-est du Surinam, un “korjaal” (bateau) de dix-huit mètres navigue sur le Tapanahony. À son passage, les enfants des villages s’écrient: “Noa e psa!” (“Voilà Noé qui passe!”). Pourquoi cela? Eh bien, cette embarcation a été construite par les vingt-sept Témoins de Jéhovah d’une congrégation très zélée, qui s’en servent comme moyen de transport pour prêcher dans les villages éparpillés le long de la rivière et pour se rendre dans la capitale quand des assemblées chrétiennes s’y tiennent. Les villageois, qui savent que le bateau appartient aux Témoins, l’ont d’eux-mêmes appelé “Noé”.
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