Les biblistes catholiques sont-ils fidèles à la Parole de Dieu?
LES biblistes catholiques de notre temps sont très actifs et très productifs. Mais se montrent-ils fidèles à la Parole de Dieu?
Ces hommes ont produit d’excellentes versions des Écritures, notamment en français, en anglais et en espagnola. De plus, en règle générale, les traducteurs catholiques souscrivent de nos jours à cette pensée exprimée dans la préface anglaise de la Bible de Jérusalem: “Celui qui traduit la Bible en une langue locale (...) [ne doit pas] imposer son propre style à l’original: Cela reviendrait à noyer l’individualité des différents écrivains qui ont réagi chacun à sa manière à l’action de l’Esprit (...). Le premier devoir du traducteur est de transmettre aussi clairement que possible la pensée de l’auteur (...). Il serait très dangereux de privilégier la forme aux dépens du fond.”
Fait intéressant, les éditeurs de la Bible de Jérusalem reconnaissent, contrairement à de nombreux traducteurs contemporains, qu’on ne devrait pas rendre par un nom commun le Tétragramme hébreu qui représente le nom propre de Dieu, mais se contenter de le transcrire. C’est pour cela qu’elle utilise le terme “Yahvé”, une forme du nom divin Jéhovah. Sur la raison de ce choix, voici ce qu’on peut lire dans l’édition anglaise: “Ceux qui désirent utiliser cette traduction des Psaumes peuvent lui substituer [à ‘Yahvé’] le traditionnel ‘Seigneur’. Mais ce serait perdre beaucoup de la saveur et de la signification des originaux. Par exemple, la proposition ‘le Seigneur est Dieu’ constitue certainement une tautologie [une répétition inutile], mais on ne peut pas en dire autant de l’assertion ‘Yahvé est Dieu’.” Voilà qui est fort bien senti.
Le discernement s’impose
Par moments, néanmoins, on peut percevoir l’ombre d’un parti pris dans les travaux des savants catholiques. Ainsi, à en croire la traduction de Pierre de Beaumont (éd. de 1972), lors du festin de mariage à Cana Jésus aurait répondu à sa mère: “Femme, que veux-tu de moi?” Le lecteur pourrait penser qu’il demandait conseil à Marie. Toutefois, dans la Bible de Jérusalem ce verset se lit ainsi: “Que me veux-tu, femme? Mon heure n’est pas encore venue.” (Jean 2:4). Comme le révèle cette version plus fidèle, le premier traducteur s’est manifestement laissé influencer par la doctrine de son Église touchant Marie, la mère de Jésus.
Il est particulièrement nécessaire de faire preuve de discernement lorsque des renseignements dignes de foi sont mêlés à des remarques qui dénigrent les Écritures. Citons cette analyse pénétrante du péché originel que l’on trouve dans une note de la Bible de Jérusalem (sur Genèse 2:17): “C’est la faculté de décider soi-même ce qui est bien et mal et d’agir en conséquence, une revendication d’autonomie morale, par laquelle l’homme renie son état de créature. Le premier péché a été un attentat à la souveraineté de Dieu, une faute d’orgueil.”
Cette glose témoigne d’une profonde intelligence du texte. Pourtant, comme la phrase suivante l’indique, les commentateurs ne croient pas qu’Adam et Ève aient réellement existé et qu’ils aient mangé le fruit défendu; nous lisons: “Cette révolte s’est exprimée concrètement par la transgression d’un précepte posé par Dieu et représenté sous l’image du fruit défendu.” (C’est nous qui soulignons.) De même, suivant la Nouvelle encyclopédie catholique (éd. de 1967, angl.), ce passage de la Genèse serait purement allégorique, et non historique.
Notez ce que cet ouvrage de référence dit à ce propos: “Il est évident que le récit de la Genèse relatif à la création de l’homme et du monde, au jardin d’Éden et à la chute, entre autres choses, n’est pas vraiment historique au sens habituel du terme.” Et l’article d’ajouter: “La Bible, qui est une œuvre littéraire, incorpore dans sa tradition le mythe en tant que genre et ne rejette pas les modèles mythiques des autres civilisationsb.”
Les exégètes qui se permettent de pareilles remarques se montrent-ils fidèles à l’Écriture Sainte? Jésus, pour sa part, considérait la création telle qu’elle est relatée dans la Bible comme un fait bien réel. Témoin ces paroles émanant de lui: “N’avez-vous pas lu que le Créateur, dès l’origine, les fit homme et femme, et qu’il a dit: Ainsi donc l’homme quittera son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, et les deux ne feront qu’une seule chair? Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Eh bien! ce que Dieu a uni, l’homme ne doit point le séparer.” — Matthieu 19:4-6 (Jé); Genèse 1:27; 2:24.
L’apôtre Paul, lui aussi, tenait le récit de la Genèse pour authentique. En effet, il exhorta ses lecteurs à ne pas se laisser abuser comme Ève par la ruse du serpent (II Corinthiens 11:3). Cette mise en garde aurait perdu toute sa valeur si Ève n’avait pas été réellement séduite. Qui plus est, en encourageant les chrétiennes à la soumission, Paul souligna qu’Adam avait été créé le premier, et que ce n’est pas lui, mais Ève, qui avait été trompée (I Timothée 2:11-14). Là encore, son argumentation aurait eu bien peu de poids si les événements rapportés dans la Genèse ne s’étaient pas vraiment produits.
Le déluge de l’époque de Noé
Si l’on en croit la Bible de Jérusalem, les récits tels que celui du déluge s’appuieraient sur des traditions auxquelles “il serait absurde de demander la rigueur que mettrait un historien moderne”. Dans le même ordre d’idées, la Nouvelle encyclopédie catholique affirme: “À présent, on admet généralement que l’épisode de l’arche de Noé n’est pas une narration historique, qu’il s’agit plutôt d’une création littéraire d’un tout autre genre (...). Celui qui veut voir en lui un récit historique, en considérant que l’auteur se proposait de décrire dans le détail un événement du passé, s’expose à la confusion et s’enferme dans des impasses intellectuelles qui se traduiront inévitablement par des problèmes de foi.”
Pourtant, Jésus Christ considérait le déluge comme un fait réel, car il annonça que sa présence serait comparable aux jours de Noé (Matthieu 24:37-39). De son côté, Paul nous présente en Noé un exemple de foi. Enfin, l’apôtre Pierre parle de Noé et du déluge dans ses deux lettres divinement inspirées. — Hébreux 11:7; I Pierre 3:20; II Pierre 2:5.
L’histoire de Jonas
Tournons maintenant notre attention vers le livre de Jonas. La Bible de Jérusalem décrit l’histoire qu’il relate comme une “aventure un peu ridicule” et fait cette remarque: “Dieu (...) est maître des lois de la nature, mais les prodiges sont ici accumulés comme autant de ‘bons tours’ joués par Dieu au prophète: la tempête subite, Jonas désigné par le sort, le poisson monstrueux, le ricin qui pousse en une nuit et qui sèche en une heure, et le tout est raconté avec une ironie non déguisée, bien étrangère au style de l’histoire. Le livre est destiné à plaire, et aussi à instruire.”
Jésus Christ, quant à lui, était convaincu que Jonas avait bel et bien existé. D’ailleurs il déclara: “En fait de signe il ne lui sera donné [à cette génération] que celui de Jonas. Car Jonas a été un signe pour les habitants de Ninive; il en sera de même avec le Fils de l’homme pour cette génération (...). Lors du jugement, les habitants de Ninive se lèveront en même temps que cette génération, et ils la condamneront; en effet, ils se sont convertis en réponse à la proclamation faite par Jonas, et il y a ici bien plus que Jonas.” Jésus dit encore: “Jonas est resté dans le ventre du monstre marin trois jours et trois nuits; de même, le Fils de l’homme restera au cœur de la terre trois jours et trois nuits.” (Luc 11:29-32; Matthieu 12:40; La Bible, traduction officielle de la liturgie). Ces paroles n’auraient aucune valeur si Jonas n’avait pas réellement vécu les péripéties qu’elles évoquent. Les érudits catholiques sont-ils donc fidèles à la Parole de Dieu quand, contrairement à Jésus Christ, ils présentent le livre de Jonas comme une légende?
Le Cantique des cantiques
Considérons un autre exemple, celui du Cantique des cantiques rédigé par Salomon. D’après la Bible de Jérusalem, ce livre aurait été écrit au plus tôt dans la seconde moitié du Ve siècle avant notre ère, soit bien longtemps après l’époque du roi Salomon. Cependant, il est à noter que l’Encyclopédie catholique (angl.) de 1908 soutient la tradition juive qui attribue l’œuvre à Salomon. Nous lisons: “La tradition, en accord avec la suscription, fait de Salomon l’auteur de ce cantique. De même, à notre époque, un certain nombre d’exégètes ont entériné cette opinion (...). De Wette dit: ‘Il y a là une série d’images et d’allusions, une fraîcheur de vie qui caractérisent le temps de Salomon.’ Ce chant témoigne de l’amour que Salomon portait à la nature (on y rencontre pas moins de vingt et un noms de plantes et quinze noms d’animaux), à la beauté et aux arts, à la magnificence royale (...). En outre, l’accent est incontestablement mis sur les sentiments les plus tendres et sur l’amour de la paix, ce qui correspond bien à la réputation de Salomon.”
Les Évangiles
Comment les exégètes catholiques regardent-ils les récits bibliques concernant Jésus Christ? La Nouvelle encyclopédie catholique fait ce commentaire au sujet de sa résurrection: “Toute tentative visant à démontrer la résurrection du Christ à partir des Évangiles (...) doit avant tout tenir compte du fait que ces récits ne sont pas des biographies de Jésus, et encore moins de l’histoire scientifique.” Mais s’ils ne sont pas “de l’histoire scientifique”, que sont-ils? Doit-on comprendre qu’ils relèvent de la fiction ou de la mythologie?
Cette prise de position de certains biblistes catholiques au sujet de la valeur des Évangiles va directement à l’encontre des paroles de Jésus, qui donna cette assurance à ses apôtres: “Le Défenseur, l’Esprit saint, (...) vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit.” (Jean 14:26; Traduction officielle de la liturgie). De plus, le témoignage que l’apôtre Paul rendit à la résurrection du Christ est en parfaite harmonie avec les Évangiles. — I Corinthiens 15:1-8.
Serez-vous fidèle à la Parole de Dieu?
L’Église catholique a pris le parti d’encourager les laïcs à lire la Bible. Mais, comme nous l’avons vu, ses exégètes trahissent souvent la Parole de Dieu par leurs commentaires.
Et vous, reconnaissez-vous dans la Bible la Parole inspirée de Dieu? Si tel est le cas, restez-lui fidèle. Lisez et étudiez régulièrement les Écritures. Bien sûr, ce livre a été écrit de telle sorte qu’il faut se tourner vers un intermédiaire humain pour le comprendre. Toutefois, les hommes et les femmes qui aiment vraiment la vérité ne devraient-ils pas s’assurer que ceux à qui ils demandent de l’aide sont sincèrement attachés à la Parole de Dieu?
[Notes]
a Par exemple, voir La Bible de Jérusalem; The New American Bible; Nácar-Colunga.
b Le mot “mythe” est ici pris au sens d’“allégorie”.