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Le crime organisé : en quoi il vous affecteRéveillez-vous ! 1997 | 8 mars
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Le crime organisé : en quoi il vous affecte
DE NOTRE CORRESPONDANT AU JAPON
Le parrain d’une famille mafieuse pique le doigt d’un novice. Le sang goutte sur l’image d’un “ saint ”, qui disparaît ensuite dans les flammes. ‘ Si tu viens à divulguer l’un quelconque des secrets de l’organisation, ton âme brûlera comme ce saint ’, dit le parrain au jeune homme.
DU FAIT de la loi du silence, l’omertà en italien, le crime organisé a opéré dans un secret presque total pendant des années. Aujourd’hui, cependant, les dénonciations de repentis (pentiti) renvoient partout les bandes criminelles à la une des journaux. Le personnage le plus haut placé que ces transfuges aient accusé est Giulio Andreotti, sept fois président du Conseil d’Italie et à présent jugé pour ses liens avec la Mafia.
Partout les organisations criminelles étendent leurs tentacules dans tous les milieux : la Mafia en Italie et aux États-Unis, où elle est également appelée Cosa Nostra ; les cartels de la drogue en Amérique du Sud ; les Triades en Chine ; les yakuzas au Japon. Leurs activités affectent chacun d’entre nous et pèsent sur le coût de la vie.
Aux États-Unis, cinq familles mafieuses se partageraient New York. Elles engrangent des milliards de dollars par l’extorsion, le racket de protection, l’usure, le jeu, la prostitution et la vente de drogue. Ces clans auraient la mainmise sur les syndicats d’éboueurs, de camionneurs, du bâtiment, de la distribution alimentaire et de l’industrie de l’habillement. Grâce au pouvoir qu’ils détiennent sur eux, ils peuvent neutraliser les conflits sociaux ou saboter un projet. Sur un chantier, par exemple, un bulldozer sera immobilisé un jour, les freins du tractopelle lâcheront le lendemain, et les ouvriers feront traîner le travail en longueur. Ces incidents et d’autres persisteront jusqu’à ce que l’entrepreneur accepte de se plier aux exigences de la bande, qu’il s’agisse de commissions ou de l’obtention de marchés. “ Les commissions versées à la Mafia peuvent garantir aux chefs d’entreprises des livraisons rapides et la docilité d’un personnel qui acceptera même d’être sous-payé ”, rapporte la revue Time.
En Colombie, deux cartels de la drogue se faisaient la guerre. Jusqu’à ce que Pablo Escobar, le chef du cartel de Medellín, soit abattu en 1993. Le cartel de Cali s’est alors assuré le monopole mondial du trafic de cocaïne. Avec, en 1994, une recette brute de 7 milliards de dollars rien qu’aux États-Unis, cette organisation est devenue probablement le plus important syndicat du crime organisé du monde. L’arrestation en 1995 de son cerveau, José Santacruz Londoño, lui a porté un coup. Mais il y a toujours un successeur impatient de prendre la relève.
Avec le démantèlement du rideau de fer, la mafia russe a fait ses débuts sur la scène internationale. Le résultat ? Propos d’un banquier recueillis par Newsweek : “ En Russie, toute entreprise doit traiter avec la mafia. ” À Brighton Beach (New York), la mafia russe ferait, par des montages complexes, de jolis profits sur l’essence. Ce sont les automobilistes qui paient, tandis que l’État se voit privé d’une partie de ses recettes fiscales. Les bandes russes dirigent également des réseaux de prostitution en Europe de l’Est. Leurs crimes restent généralement impunis : qui oserait affronter ces anciens athlètes ou ex-combattants de la guerre d’Afghanistan armés jusqu’aux dents ?
La situation n’est pas différente en Orient. Au Japon, les artistes du show-business peuvent s’attendre à toutes sortes de problèmes s’ils n’honorent pas le groupe local de yakuzas en lui versant de substantielles contributions. Dans ce pays aussi les bars, et même les prostituées, sont victimes d’un racket de protection. Qui plus est, les yakuzas ont largement pénétré l’économie japonaise en montant leurs propres sociétés, en extorquant des fonds aux entreprises influentes et en s’associant à des syndicats du crime à l’étranger.
Les organisations criminelles basées à Hong-Kong et à Taïwan tissent, elles aussi, une toile planétaire. Hormis leur nom de Triades, on ne sait pas grand-chose de leur mode d’organisation. Leur existence remonte au XVIIe siècle, quand des moines chinois se formèrent en bande contre les Mandchous, qui avaient annexé la Chine. Bien qu’elles regroupent des dizaines de milliers de membres, les Triades de Hong-Kong formeraient des syndicats temporaires pour un crime ou une série de crimes précis ; d’où les difficultés de la police à établir leur identité. Elles amassent des milliards de dollars grâce au trafic d’héroïne et ont transformé Hong-Kong en un centre de contrefaçon de cartes de crédit.
Dans Les nouvelles bandes ethniques (angl.), William Kleinknecht écrit au sujet du crime aux États-Unis : “ Dans le monde nouveau du crime organisé, aucune bande ethnique n’a de plus bel avenir que les bandes chinoises. [...] Les groupes criminels chinois gagnent rapidement du terrain dans de nombreuses villes. [...] À New York, ils se classent deuxièmes après la Mafia. ”
À propos d’une autre forme de trafic venant de Hong-Kong, un responsable du ministère américain de la Justice déclare : “ Le trafic d’émigrants illégaux est une manifestation du crime organisé. ” Certaines autorités estiment à 100 000 le nombre de Chinois qui entrent clandestinement aux États-Unis chaque année. Le clandestin doit généralement payer un minimum de 15 000 dollars pour son voyage vers un pays riche, dette qu’il devra acquitter dans sa presque totalité après son arrivée. C’est ainsi qu’il devient souvent esclave dans un atelier clandestin ou dans une maison close. Le cauchemar au pays de ses rêves.
N’étant pas lié à des activités criminelles, peut-être pensez-vous ne pas être affecté par le crime organisé. Mais est-ce bien le cas ? Beaucoup de toxicomanes commettent des crimes pour s’acheter de la drogue provenant des cartels sud-américains. Le crime organisé veille à ce que les marchés publics reviennent aux sociétés qui ont des liens avec lui. Si bien que les administrés paient plus cher. La Commission présidentielle sur le crime organisé a déclaré un jour qu’aux États-Unis “ le crime organisé fausse les prix par le vol, l’extorsion, la corruption, l’entente illégale sur les prix et l’interdiction de concurrence ”, et que les consommateurs sont obligés de payer “ ce qui n’est ni plus ni moins qu’un impôt ” à la Mafia. Ainsi, nul n’échappe aux effets du crime. Chacun de nous paie la facture.
Mais pourquoi le crime organisé prospère-t-il aujourd’hui ?
[Encadré, page 5]
Les origines de la Mafia
“ La Mafia est née en Sicile à la fin du Moyen Âge. Peut-être était-elle au départ une organisation secrète qui s’employait à renverser la domination des divers conquérants de l’île, tels que les Sarrasins, les Normands et les Espagnols. La Mafia tire ses origines des nombreuses petites armées privées, ou mafie, dont des propriétaires absentéistes louaient les services pour protéger leurs biens fonciers des bandits dans le climat d’anarchie qui a prévalu dans une grande partie de la Sicile au cours des siècles. Aux XVIIIe et XIXe siècles, les voyous pleins d’énergie de ces armées privées se sont organisés entre eux et sont devenus si puissants qu’ils se sont retournés contre leurs maîtres et ont fait régner leur loi sur de nombreuses terres, soutirant de l’argent à ces propriétaires en échange de la protection de leurs récoltes. ” (La Nouvelle Encyclopédie britannique). Le racket de protection est devenu leur modus operandi. Ils ont exporté leurs méthodes aux États-Unis, où ils ont élargi leurs activités au jeu, à l’usure, à la prostitution, au racket de syndicats et au trafic de drogue.
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Le crime organisé : pourquoi il prospèreRéveillez-vous ! 1997 | 8 mars
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Le crime organisé : pourquoi il prospère
AL CAPONE, l’infâme gangster de la prohibition (1920-1933), affirmait n’être qu’un chef d’entreprise qui obéissait à la loi... à la loi de l’offre et de la demande. Un avocat du plus puissant syndicat yakuza a eu ces mots : “ On ne peut nier qu’en matière [de drogue, de jeu et de sexe] la demande est forte. ” Cette demande nourrit le crime organisé. Bien que personne ne souhaite en être victime, certains se tournent vers les organisations criminelles pour bénéficier de leurs services.
Prenez, par exemple, le racket de protection, que les gangsters de nombreux pays utilisent comme source de revenus. S’il arrive parfois aux bandes de s’en prendre à des commerçants respectables, elles ciblent de préférence les patrons d’affaires louches. Le propriétaire d’un casino de Shinjuku (Tokyo), qui dissimule son négoce sous une enseigne de salle de jeux vidéo, raconte : “ Un employé a été poignardé et s’est fait voler 2 millions [de yens (100 000 francs français)]. Mais nous n’allions pas appeler la police. ” Pourquoi ? “ Notre activité est illégale, alors nous ne voulons rien avoir à faire avec la police. Quand un client veut faire du scandale, nous appelons les yakuzas. ” Cet homme verse chaque mois l’équivalent de 20 000 francs français aux yakuzas, une misère comparée au 1,5 million de francs que lui rapporte dans le même temps son activité illégale. D’où vient cet argent ? De la poche de ceux que séduisent les formes de jeu illégales.
Il en va de même de certaines entreprises “ respectables ” qui souhaitent éviter les problèmes. Selon les estimations d’un magistrat new-yorkais, le directeur d’une entreprise de peinture qui gagnait 15 millions de dollars par an en économisait 3,8 millions en versant des commissions à des gangsters. Ces commissions lui permettaient d’employer une main-d’œuvre sous-payée et lui évitaient les conflits avec le syndicat, que contrôlait la Mafia. Au Japon, durant une période de prospérité économique, des financiers ont investi leur argent dans l’immobilier. Les vieilles maisons et les vieux magasins ont été démolis pour laisser la place à des immeubles de grand standing. Lorsque les habitants refusaient de déménager ou de vendre, ces investisseurs appelaient les jiageyas, sociétés liées pour la plupart aux yakuzas, pour les expulser.
Quand, pendant les années 80, les yakuzas ont vu la facilité avec laquelle on pouvait emprunter et gagner de l’argent, ils ont fondé des sociétés et sont entrés de plain-pied dans le secteur immobilier et sur le marché boursier. Des banques et d’autres établissements financiers ont lourdement investi dans ces sociétés, bien décidés à accroître leurs propres profits. Mais quand le boom économique s’est arrêté, les banques ont eu beaucoup de mal à récupérer leur argent. À propos de la récession persistante que connaît le Japon, un ancien responsable de la police a déclaré (propos relevés dans Newsweek) : “ Si les problèmes de prêts irrécouvrables ne peuvent être résolus rapidement, c’est en réalité parce qu’une grande partie de ces prêts sont liés au crime organisé. ”
On le voit, le crime organisé prend racine et prospère là où les gens sont capables de tout pour satisfaire leurs désirs. La soif de plaisir, de sexe et d’argent constitue un terrain fertile pour la vente de drogue, la prostitution, le jeu et l’usure, toutes activités qui, en général, nourrissent et engraissent le crime organisé. Indéniablement, le crime organisé s’emploie à satisfaire les exigences de ceux qui sont résolus à écouter leur chair.
Pseudo-familles
Outre cette demande en activités illicites, il en est maintenant une autre qui fait la prospérité du crime organisé. Le chef aujourd’hui décédé d’un des plus puissants syndicats yakuzas soutenait qu’il recueillait les hors-la-loi et les empêchait ainsi de mal tourner. Il se présentait comme un père pour ses hommes de main. La plupart des syndicats du crime, dans quelque pays que ce soit, bâtissent leur organisation sur ces pseudo-relations familiales.
Voyez, par exemple, Chi Suna, issu d’une famille pauvre de Hong-Kong. Souvent, son père le rossait pour des broutilles. Chi Sun est devenu rebelle et, à 12 ans, il s’est joint à une Triade. Au sein de cette organisation criminelle, il s’est senti chez lui. En raison de sa bravoure dans les combats à l’arme à feu, il a bientôt eu plusieurs hommes sous ses ordres. Jusqu’au jour où il s’est retrouvé en prison. Il n’avait que 17 ans.
Comme Chi Sun, beaucoup se joignent à une organisation criminelle pour y trouver le lien familial qui faisait défaut chez eux. Les gangsters se veulent attentionnés, mais les jeunes sont souvent déçus quand ils se rendent compte que chacun se soucie avant tout de ses propres intérêts.
Ange de lumière
Quand, en 1992, le plus puissant syndicat japonais du crime a été déclaré groupe violent aux termes d’une nouvelle loi, un de ses chefs a affirmé que les membres de son groupe se considéraient comme des individus “ chevaleresques ” en guerre contre le mal. Lors du terrible tremblement de terre qui a frappé Kobe en 1995, cette bande a distribué de l’eau, de la nourriture et d’autres secours à ses voisins. “ Cette générosité, rapportait Asahi Evening News, ne manquera pas de renforcer l’image dont jouissent les yakuzas au Japon : celle de bandits au grand cœur. ”
Les patrons des syndicats du crime tentent souvent de se donner des airs de bienfaiteurs. Pablo Escobar, le tristement célèbre chef du cartel de Medellín, était pour les habitants des quartiers pauvres de sa ville “ une figure mythique, partie Messie, partie Robin des Bois, partie Dieu le Père dans le sens presque féodal du patrón, le seigneur ”, a écrit Ana Carrigan dans Newsweek. Il construisait des skatings pour les enfants et des logements décents pour les pauvres, il donnait des emplois aux enfants des rues. C’était un héros pour ceux qui bénéficiaient de ses largesses.
Les criminels qui semblent invulnérables derrière l’écran de leurs syndicats ne sont que des jouets du maître universel du crime, dont la Bible nous révèle l’identité : “ Satan lui-même se transforme toujours en ange de lumière. Ce n’est donc pas extraordinaire si ses ministres aussi se transforment toujours en ministres de justice. Mais leur fin sera selon leurs œuvres. ” (2 Corinthiens 11:14, 15). La plupart de nos contemporains ne croient pas que Satan est une personne réelle. Un poète français du XIXe siècle a dit : “ Le stratagème le plus intelligent du Diable est de vous persuader qu’il n’existe pas. ” Caché dans les coulisses, il tire les ficelles, non seulement des syndicats du crime, mais du monde. “ Le monde entier se trouve au pouvoir du méchant ”, explique la Bible. Jésus a décrit Satan comme “ un homicide lorsqu’il a commencé, [...] un menteur et le père du mensonge ”. — 1 Jean 5:19 ; Jean 8:44.
Les prophéties bibliques révèlent que Satan le Diable est particulièrement actif depuis 1914. Depuis cette année-là, il mobilise ses hordes dans une guerre totale contre le peuple de Dieu. Il aspire l’humanité dans un tourbillon dévastateur. C’est avant tout à cause de lui que le crime et les organisations criminelles prospèrent de nos jours. — Révélation 12:9-12.
Le vrai cerveau des organisations criminelles sera-t-il finalement neutralisé ? L’humanité goûtera-t-elle un jour la paix et l’ordre ? Pouvez-vous, à titre individuel, rompre avec l’empire méchant que Satan a édifié sur la terre à notre époque ?
[Note]
a Certains noms ont été changés pour la sécurité des personnes concernées.
[Encadré, page 7]
Comment protéger votre famille
L’ABSENCE de chaleur et d’unité au foyer peut faire d’un enfant une proie rêvée pour les syndicats du crime. Aux États-Unis, la majorité des jeunes impliqués dans un meurtre perpétré par une bande viendraient de familles brisées ou à tout le moins peu chanceuses. “ Vu leur situation, explique un responsable d’un centre de détention pour mineurs de Caroline du Nord, ils sont facilement attirés par le lien très fort qui unit le patron et ses hommes de main et par ce sentiment d’appartenance à une organisation. Ce sentiment, ils y goûtent pour la première fois de leur vie. ”
Il en est de même en Orient. Remarque d’un jeune yakuza prêt à servir de bouclier humain à son chef : “ Chez moi, j’étais tout le temps seul. C’était ma famille, et pourtant il n’y avait pas moyen d’avoir une discussion franche. [...] Alors que maintenant, avec mes collègues, je peux vraiment parler. ” Les jeunes qui souffrent de solitude éprouvent de la reconnaissance pour ces membres d’organisations criminelles qui les introduisent dans un système aux allures de famille.
“ Les yakuzas vous entourent énormément, dit le chef d’une bande féminine de motards d’Okinawa. C’est peut-être leur ruse, mais, vous comprenez, quand on n’a jamais connu la gentillesse, ça ne laisse pas indifférent. ” Le directeur d’un centre d’aide aux jeunes délinquantes confirme que les bandes sont “ réellement douées pour ravir le cœur des jeunes filles ”. Quand une fille qui se sent seule les appelle en plein milieu de la nuit, des gangsters accourent pour l’écouter, sans forcément lui faire des avances.
Ces attentions durent jusqu’à ce que le poisson soit bien ferré. Une fois pris au piège, les jeunes sont exploités à mort : les filles dans des réseaux de prostitution, les garçons dans la machine du crime.
Comment protéger ceux que vous aimez ?
“ Pères, n’exaspérez pas vos enfants, pour qu’ils ne se découragent pas ”, dit la Bible (Colossiens 3:21). Cela ne signifie pas que les parents devraient être permissifs. Un proverbe biblique déclare : “ Un garçon laissé à lui-même fera honte à sa mère. ” (Proverbes 29:15). La Bible encourage plutôt les pères (et les mères) à être raisonnables avec leurs enfants, à les écouter et à communiquer librement avec eux. Les enfants seront ainsi poussés à se confier à eux en période de difficultés.
Les parents ne doivent pas seulement communiquer franchement avec leurs enfants. Ils doivent également leur donner des principes. Mais où un père peut-il trouver ces principes ? La Bible répond : “ Vous, pères, n’irritez pas vos enfants, mais continuez à les élever dans la discipline et les avertissements de Jéhovah. ” (Éphésiens 6:4). Prenez du temps pour examiner les Écritures avec vos enfants dans le cadre de discussions bibliques en famille. Et implantez dans leur cœur une crainte salutaire de Jéhovah afin qu’ils suivent toujours sa direction, pour leur plus grand profit. — Isaïe 48:17.
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Un monde sans crime : comment ?Réveillez-vous ! 1997 | 8 mars
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Un monde sans crime : comment ?
PARTOUT dans le monde on lutte contre le crime organisé. Selon U.S.News & World Report, “ de nombreux points ont été marqués contre la Mafia en très peu de temps. Ces résultats remarquables sont dus principalement à une loi, le Racketeer Influenced and Corrupt Organizations Act (RICO) ”. La loi en question permet la condamnation des organisations criminelles au motif d’un système de racket, et non de seuls actes individuels. Cette mesure, ainsi que les renseignements recueillis grâce aux écoutes téléphoniques et aux dénonciations de gangsters désireux d’obtenir l’indulgence des juges, contribue au succès de la lutte contre la Mafia aux États-Unis.
En Italie aussi les autorités font la guerre aux clans mafieux. Dans des régions comme la Sicile, la Sardaigne et la Calabre, bastions du crime organisé, l’armée déploie des unités chargées de patrouiller dans les bâtiments publics et les zones sensibles pour prévenir toute attaque de la part d’éléments criminels. L’État compare la situation à une guerre civile. Une guerre qui porte du fruit : des chefs célèbres de syndicats du crime sont derrière les barreaux, et un ancien président du conseil est accusé de collusion avec la Mafia.
Au Japon, l’État a pris des mesures autoritaires contre les yakuzas en adoptant, le 1er mars 1992, la loi contre le crime organisé. Aux termes de cette loi, une organisation criminelle reconnue comme telle se voit interdire 11 formes de coercition violente, dont l’exigence d’un prix du silence, le racket de protection et le règlement de conflits contre un prix. Par ce texte, l’État entend couper les vivres aux bandes. Le coup a été rude pour les organisations criminelles. Certaines se sont dispersées, et un patron s’est suicidé — tout cela, apparemment, en raison d’une stricte application de cette loi.
Incontestablement, les États et les services de police mènent un véritable combat contre le crime organisé. Et pourtant, on relevait cette phrase dans un article du Mainichi Daily News consacré à une conférence internationale réunissant en 1994 des juges et des responsables de la police : “ Le crime organisé progresse et s’enrichit presque partout dans le monde. Il engrange chaque année la somme colossale de 1 milliard de milliards de dollars. ” Eh oui, les efforts de l’homme pour éradiquer les syndicats du crime sont limités. Entre autres raisons parce que la justice est bien souvent lente et corrompue. De l’avis de beaucoup, plus d’une loi semble favoriser les criminels plutôt que leurs victimes. La Bible a déclaré il y a quelque 3 000 ans : “ Parce que la sentence contre une œuvre mauvaise n’a pas été exécutée rapidement, voilà pourquoi le cœur des fils des hommes s’est pleinement enhardi en eux à faire le mal. ” — Ecclésiaste 8:11.
Rompre avec le milieu
Outre qu’ils sévissent directement contre le crime organisé, les États tentent d’aider les membres des syndicats du crime à en sortir. La rupture n’est pas facile. Un vieux dicton veut que l’on ne quitte la Mafia que dans un cercueil. Et les yakuzas exigent des démissionnaires une forte somme d’argent ou tout ou partie de leur petit doigt. Outre la peur des représailles qu’il éprouve, un gangster doit se frotter aux réalités d’une vie moralement droite. Par exemple, il aura beaucoup de mal à se faire embaucher. Certains pays ont toutefois créé un téléphone rouge pour soutenir ceux qui veulent rompre avec leurs activités criminelles et trouver un emploi moralement acceptable.
Il faut une puissante motivation pour résister aux pressions du gang et affronter les préjugés de la société. L’intéressé le fera peut-être par amour pour sa famille, parce qu’il aspire à une vie paisible ou parce qu’il désire faire ce qui est droit. Mais l’histoire de Yasuo Kataoka (article suivant) illustre bien quelle est la plus forte des motivations.
Yasuo Kataoka est représentatif de ces centaines de personnes qui ont changé du tout au tout, qui ont abandonné leurs comportements bestiaux pour adopter une personnalité nouvelle “ créée selon la volonté de Dieu dans une justice et une fidélité vraies ”. (Éphésiens 4:24.) Ces loups d’hier résident aujourd’hui en paix avec des personnes douces comme des agneaux ; mieux, ils aident autrui ! — Isaïe 11:6.
Rompez avec l’esprit de ce monde
Nous l’avons dit dans l’article précédent, le monde entier, et pas seulement les syndicats du crime, est sous l’autorité invisible de Satan le Diable. Sans que nos contemporains s’en rendent compte, Satan a organisé le monde pour servir ses fins criminelles. Tout comme les syndicats du crime offrent richesse et (pseudo-)liens familiaux, il joue les maîtres bienveillants en octroyant aux gens biens matériels, plaisirs et sentiment de camaraderie. Sans en avoir conscience, peut-être vous êtes-vous laissé abuser par ses machinations (Romains 1:28-32). La Bible dit que “ l’amitié pour le monde est inimitié contre Dieu ”. (Jacques 4:4.) L’amitié pour le monde satanique qui est le nôtre est dangereuse. Le Créateur de l’univers possède une armée d’anges qui, sous la direction de Jésus Christ, s’apprête à attaquer Satan et les démons pour libérer le monde de leur influence mauvaise. — Révélation 11:18 ; 16:14, 16 ; 20:1-3.
Dès lors, comment vous soustraire à l’influence du monde de Satan ? Non pas en menant une existence de reclus, mais en rompant avec les attitudes et les raisonnements qui l’emportent aujourd’hui. Pour y parvenir, il vous faudra combattre les tactiques de Satan visant à vous effrayer et résister aux incitations qu’il utilise pour maintenir les gens sous sa coupe (Éphésiens 6:11, 12). Cela suppose des sacrifices, mais en étant déterminé et en acceptant l’aide des Témoins de Jéhovah, vous serez victorieux, comme d’autres l’ont été avant vous.
Que se passera-t-il après que Dieu aura débarrassé ce monde chaotique du crime ? “ Quant à la descendance des méchants, elle sera bel et bien retranchée ”, dit la Bible, avant d’ajouter : “ Les justes posséderont la terre, et sur elle ils résideront pour toujours. ” (Psaume 37:28, 29). “ La connaissance de Jéhovah ”, qui remplira alors la terre, aura transformé les individus au comportement bestial, de sorte que l’on n’aura aucune raison de trembler devant eux. — Isaïe 11:9 ; Ézéchiel 34:28.
Pareille métamorphose est d’ores et déjà une réalité, comme le montrera maintenant le récit d’un ancien yakuza.
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Rompre avec le crime organisé : “ J’étais un yakuza ”Réveillez-vous ! 1997 | 8 mars
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Rompre avec le crime organisé : “ J’étais un yakuza ”
“ PAPA, quand tu rentreras à la maison, on ira aux réunions ensemble. Tu me le promets ? ” J’étais en prison pour la troisième fois quand j’ai reçu cette lettre de ma fille cadette. Elle et ma femme assistaient régulièrement aux réunions des Témoins de Jéhovah. Et comme le courrier que je recevais de ma famille était mon unique réconfort, j’ai promis.
Je me suis interrogé : ‘ À quoi rime cette existence de criminel qui te sépare des tiens ? ’ Et j’ai repensé à ma petite enfance. Mon père est mort quand je n’avais que 18 mois (je ne me rappelle même pas son visage), et ma mère s’est remariée deux fois. Cette situation familiale m’a profondément marqué, et au collège j’ai commencé à fréquenter des truands. Devenu violent, je me battais souvent après l’école. Dans ma deuxième année de collège, j’ai organisé une bande d’élèves pour affronter un autre groupe. On m’a arrêté et placé quelque temps en maison de redressement.
Glissant de plus en plus vers la violence, je n’ai pas tardé à former une bande de délinquants. Nous traînions devant le bureau d’un groupe yakuza. À 18 ans, j’étais un membre à part entière de ce groupe. À 20 ans, j’ai été arrêté et condamné à trois ans de prison pour divers actes de violence. J’ai été incarcéré à la prison pour mineurs de Nara. Mais, comme je ne m’amendais pas, on m’a envoyé dans une prison pour adultes. Je suis devenu pire encore, si bien que je me suis retrouvé à Kyōto dans un établissement pour criminels endurcis.
Je me demandais ce qui me poussait au crime. Avec le recul, je me rends compte que le problème tenait à un raisonnement insensé : je croyais mon attitude virile, j’y voyais une preuve de ma masculinité. Quand j’ai été libéré, à l’âge de 25 ans, mes “ collègues ” me considéraient comme quelqu’un. Je pouvais maintenant poursuivre mon ascension dans le monde du crime.
Les réactions de ma famille
Vers la même époque, je me suis marié, et bientôt j’ai eu deux filles. Mais ma vie n’a pas changé pour autant. Je continuais à naviguer entre la maison et le poste de police, où je me retrouvais régulièrement pour violences aggravées et extorsion. Chaque fois je gagnais un peu plus le respect de la bande et la confiance du patron. Finalement, mon “ grand frère ” yakuza est devenu le chef de la bande, et moi son second, à ma plus grande joie.
Je me demandais quels sentiments mon mode de vie inspirait à ma femme et à mes filles. De la gêne, probablement. Je suis retourné en prison à 30 ans, puis une nouvelle fois à 32 ans. Cette dernière peine, de trois ans, a été très pénible. Mes filles n’avaient pas le droit de visite. Je souffrais de ne pas pouvoir leur parler ni les prendre dans mes bras.
C’est vers le début de ma dernière incarcération que ma femme a commencé à étudier la Bible avec les Témoins de Jéhovah. Dans ses lettres, elle me parlait tous les jours de la “ vérité ” qu’elle découvrait. Que pouvait bien être cette vérité ? J’ai lu la Bible en entier, et j’ai réfléchi à ce que ma femme m’écrivait au sujet de l’espérance chrétienne et du dessein de Dieu.
L’espérance de la vie éternelle sur une terre paradisiaque m’attirait, car j’avais très peur de la mort. Je m’étais toujours dit que la mort était pour les perdants. Je le comprends maintenant, c’était cette crainte effroyable qui me poussait à blesser les autres avant qu’ils ne me blessent. Les lettres de ma femme m’ont également fait comprendre la vanité de mon objectif : grimper les échelons dans le crime organisé.
Je n’avais toutefois pas envie d’étudier la vérité. Ma femme s’est vouée à Jéhovah et s’est fait baptiser. Si j’avais accepté d’aller aux réunions des Témoins de Jéhovah, je n’envisageais pas pour autant d’en devenir un. J’avais l’impression que ma femme et mes filles m’abandonnaient.
Je sors de prison
Enfin, le jour de la libération est arrivé. À la porte de la prison (la prison de Nagoya), de nombreux gangsters étaient là pour m’accueillir. Mais, dans toute cette foule, c’est ma femme et mes filles que je cherchais. En voyant mes filles, qui avaient beaucoup grandi durant ces trois ans et demi, je me suis mis à pleurer.
Deux jours après mon retour à la maison, fidèle à ma promesse, j’ai assisté à une réunion des Témoins de Jéhovah. La bonne humeur de chacun m’a surpris. Malgré le bel accueil, je ne me sentais pas à l’aise. Quand j’ai su plus tard que ces Témoins qui m’avaient salué connaissaient mon passé de criminel, j’ai été proprement dérouté. Néanmoins, j’ai ressenti la chaleur des Témoins, et le discours biblique m’a plu. Il parlait de la vie éternelle sur une terre transformée en paradis.
L’idée que ma femme et mes filles vivent sans moi dans le Paradis m’affligeait énormément. J’ai médité profondément sur ce qu’il me fallait faire pour vivre éternellement avec les miens. J’ai commencé à envisager de rompre avec ma vie de gangster, et je me suis mis à étudier la Bible.
Je romps avec le crime organisé
J’ai cessé d’assister aux réunions de la bande et de fréquenter les yakuzas. Il ne m’a pas été facile de transformer mon esprit. Je me promenais pour le plaisir dans une grosse voiture d’importation, histoire de flatter mon amour-propre. Il m’a fallu trois ans pour me décider à troquer ce véhicule contre un autre plus modeste. J’avais également tendance à opter pour la voie de la facilité. En apprenant la vérité, j’ai compris que je devais changer. Mais, comme le dit Jérémie 17:9, “ traître est le cœur, plus que toute autre chose, et il est extrêmement mauvais ”. Je savais ce qui était bien, mais j’avais beaucoup de mal à mettre en pratique ce que j’apprenais. Mes difficultés me semblaient une montagne. Troublé, j’ai pensé plus d’une fois arrêter d’étudier la Bible et renoncer à l’idée de devenir Témoin de Jéhovah.
C’est alors que le Témoin qui étudiait la Bible avec moi a invité un ministre itinérant dont le passé ressemblait au mien à prononcer un discours public dans notre congrégation. Cet homme a fait les 640 kilomètres séparant Akita de Suzuka pour venir m’encourager. À partir de ce moment-là, chaque fois que j’étais fatigué de lutter et que je songeais à abandonner je recevais une lettre de lui dans laquelle il me demandait si je progressais dans la voie du Seigneur.
Je priais sans cesse Jéhovah de m’aider à rompre tout lien avec les yakuzas. J’avais confiance qu’il m’exaucerait. En avril 1987, j’ai finalement réussi à me retirer de la bande. Mon travail m’obligeait à quitter tous les mois ma famille pour aller à l’étranger. J’en ai donc changé pour devenir concierge. Je disposais ainsi de mes après-midi pour me livrer à des activités spirituelles. Pour la première fois de ma vie j’ai reçu un salaire. Il était plutôt maigre, mais j’étais très heureux.
Quand j’étais le numéro deux d’une organisation yakuza, j’étais à l’aise sur le plan financier ; mais aujourd’hui je possède des richesses durables, des richesses spirituelles. Je connais Jéhovah et ses desseins, j’ai des principes, et j’ai de vrais amis. Les yakuzas étaient attentionnés, mais ce n’était que superficiel ; je n’en connais pas un qui aurait été prêt à mourir pour les autres.
En août 1988, j’ai symbolisé l’offrande de ma personne à Jéhovah par le baptême, et en septembre de la même année, j’ai commencé à consacrer au moins 60 heures par mois à communiquer à autrui la bonne nouvelle qui avait changé ma vie. Je suis évangélisateur à plein temps depuis mars 1989 et j’ai aujourd’hui le bonheur d’être assistant ministériel dans la congrégation chrétienne.
J’ai réussi à éliminer tout vestige de ma vie de yakuza. À l’exception d’un seul : mes tatouages, qui subsistent pour me rappeler mon passé, à moi, à ma famille et à mon entourage. Un jour, ma fille aînée est rentrée en pleurant : elle ne voulait plus retourner à l’école parce que ses camarades lui avaient dit que j’étais un yakuza et que j’étais tatoué. Je lui ai expliqué, à elle et à sa sœur, ce qu’il en était exactement, et elles ont compris. J’attends impatiemment le jour où la terre sera un paradis et où ma chair deviendra “ plus fraîche que dans la jeunesse ”. Alors mes tatouages et les souvenirs de mes 20 années chez les yakuzas appartiendront au passé (Job 33:25 ; Révélation 21:4). — Par Yasuo Kataoka.
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