“ELLE est tombée! Babylone la Grande est tombée, elle qui a fait boire à toutes les nations le vin de la colère de sa fornication!” “Babylone la Grande est tombée, et elle est devenue une habitation de démons, un repaire de toutes les vapeurs impures et un repaire de tous les oiseaux impurs et haïs!” — Révélation 14:8; 18:2.

La chute de Babylone la Grande

Ces événements trouvent un parallèle dans la chute de la Babylone symbolique, l’empire universel de la fausse religion. Au début du XX^e siècle, avant 1919, les Étudiants de la Bible, comme on appelait alors les Témoins de Jéhovah, devaient être libérés d’une forme de captivité spirituelle. Ils étaient en effet captifs des idées et des pratiques de la fausse religion. Bien qu’ils aient rejeté des dogmes erronés, tels ceux de la Trinité et de l’immortalité de l’âme, ils se souillaient encore par des pratiques d’origine babylonienne. Beaucoup s’attachaient au développement du caractère et avaient cultivé de ce fait une tendance à l’autosatisfaction. Certains honoraient la créature: Charles Russell, le premier président de la Société Watch Tower, était l’objet du culte de la personnalité auquel ils se livraient. Sans aucune raison biblique, ils fêtaient Noël et les anniversaires. La croix occupait encore une place importante dans leur esprit. Certains portaient même sur le revers de leur vêtement un emblème représentant une croix et une couronne, alors que d’autres recherchaient la respectabilité conforme aux critères de la chrétienté. Puis, en 1917, peu après la mort de Russell, un changement important s’amorça.

Cette année-​là, la Société Watch Tower publia un commentaire sur le livre de la Révélation intitulé Le mystère accompli. Cet ouvrage démasquait le clergé de la chrétienté, dévoilant entre autres choses son rôle dans la Grande Guerre, qui faisait alors rage en Europe. Certains membres du clergé protestant, un des groupements représentant Babylone la Grande au Canada, portèrent ces déclarations à la connaissance de leurs amis politiques du gouvernement canadien et accusèrent les Étudiants de la Bible de sédition. C’est ainsi que le 12 février 1918, les activités de la Société Watch Tower furent interdites au Canada.

Aux États-Unis, les membres du clergé s’empressèrent de suivre l’exemple de leurs confrères canadiens: dans les jours qui suivirent, des publications éditées par la Société Watch Tower furent confisquées à Los Angeles (Californie). Puis, en mai 1918, un mandat d’arrêt fut émis contre Joseph Rutherford, le nouveau président de la Société Watch Tower, et sept autres responsables. En juin, avec une rapidité surprenante, ces chrétiens furent traînés devant un tribunal et déclarés coupables. Sept d’entre eux furent condamnés à 20 ans de prison, et l’autre à une peine de 10 ans. Quelle fut la réaction du clergé? Dans son livre La religion américaine moderne: l’ironie totale (angl.), Martin Marty déclare: “Le clergé se retourna contre les Russellistes [connus plus tard sous le nom de Témoins de Jéhovah] et applaudit en apprenant que des dirigeants Témoins de Jéhovah avaient été condamnés à des peines de 20 ans d’emprisonnement.” L’heure était au rire pour les représentants de Babylone la Grande, mais ils oubliaient ce dicton: rira bien qui rira le dernier.

Ainsi, en 1918, la captivité babylonienne symbolique se transforma également pour certains serviteurs de Jéhovah en un emprisonnement proprement dit. Une vague de persécution déferla sur les Étudiants de la Bible aux États-Unis, au Canada et dans d’autres pays. Dans certaines villes, des ecclésiastiques nationalistes suscitèrent des émeutes pour chasser ces chrétiens. Des Étudiants de la Bible furent enduits de goudron et recouverts de plumes. On en frappa d’autres à coups de gourdin. De nombreux actes injustes et honteux furent ainsi commis à l’encontre de cette minorité de chrétiens sincèresb.

Puis, en 1919, un changement inattendu de situation se produisit. La Grande Guerre avait pris fin en novembre 1918. On fit appel au sujet des condamnations qui pesaient sur les administrateurs de la Société Watch Tower, déclarant qu’il s’agissait d’une erreur judiciaire. Rutherford et ses compagnons furent libérés, à la grande déception de leurs ennemis religieux. Comme le dit Martin Marty, “personne ne se réjouit au sein des religions traditionnelles”. Finalement, tous les accusés furent entièrement disculpés. Le juge catholique Martin Manton, que le pape Pie XI fit plus tard “Chevalier de l’Ordre de Saint Grégoire le Grand”, avait refusé la mise en liberté sous caution des huit Témoins, ce qui leur avait valu d’être injustement emprisonnés pendant neuf mois. En 1939, l’incarcération de ce magistrat partial révéla sous leur vrai jour les principes de cet homme: il avait sollicité des pots-de-vin!

À leur libération, en 1919, Rutherford et ses associés retournèrent au siège de la Société Watch Tower, à Brooklyn. Ils entreprirent alors de se réorganiser en vue de la plus vaste campagne de prédication du Royaume que le monde ait jamais connue. Les Étudiants de la Bible avaient brisé les chaînes de la crainte de l’homme, et désormais ils discernaient clairement leur position vis-à-vis de toutes les fausses religions. Babylone la Grande était leur ennemie implacable; sa chute devait être dévoilée et le vrai culte restauré parmi les nations.

Ces chrétiens intrépides intensifièrent leur ministère de maison en maison. Ils défilèrent également dans les rues, démasquant la fausse religion à l’aide de pancartes sur lesquelles on lisait: “La religion est un piège et une escroquerie” et “Servez Dieu et Christ, le Roi”. Comme cela avait été le cas pour l’antique ville de Babylone, la fausse religion continua d’exister et de prospérer, mais relativement aux Témoins de Jéhovah, Babylone la Grande était tombée en 1919. Ils étaient libres de toute entrave babylonienne!