Un accident grave laisse des souvenirs heureux
De notre correspondant en Équateur
L’ACCIDENT eut lieu à Cuenca l’après-midi du 20 janvier 1969. Un camion à benne basculante, chargée, faisait marche arrière dans l’allée étroite qui longeait une école primaire. Une fillette de dix ans, pensant sans doute que le camion pouvait passer sans difficulté, resta dans l’allée. Cependant, la robe de l’enfant se prit dans une des roues arrière de l’énorme véhicule qui la traîna avec lui sous les yeux horrifiés des spectateurs.
Entendant des cris, le chauffeur s’arrêta et descendit pour voir ce qui se passait. Imaginez sa stupéfaction de voir la fillette écrasée sous les roues de son camion qui s’étaient arrêtées sur son corps ! Il n’y avait qu’une solution : faire avancer le véhicule, mais alors tout le poids de celui-ci appuyait de nouveau sur le petit corps meurtri. On constata par la suite que les roues avaient passé sur la jambe gauche de la victime puis sur son abdomen. On la fit transporter d’urgence dans une clinique. Au grand étonnement de tout le monde, elle n’avait pas perdu connaissance.
Quand sa mère angoissée arriva, la fillette lui dit aussitôt : “Maman, je ne peux pas mourir maintenant, car je n’ai pas encore conduit une étude biblique !” Elle dit alors aux infirmières qu’il ne fallait pas lui administrer de sang. Celles-ci n’en croyaient pas leurs oreilles quand elles entendirent cette enfant expliquer qu’elle ne voulait pas mourir parce qu’elle désirait avoir l’occasion d’enseigner la Bible à quelqu’un. Pour ces infirmières, c’était une chose incroyable !
Un médecin qui respecte les convictions d’autrui
Lorsque le médecin arriva, il recommanda aussitôt une intervention chirurgicale qui permettrait de connaître l’étendue des lésions internes. Le père de l’enfant donna son consentement à condition que l’on n’administre pas de sang à la patiente. N’ayant jamais pratiqué une opération aussi grave sans faire de transfusions sanguines, le médecin hésita. Cependant, les parents lui expliquèrent leur désir de respecter la loi divine relative au sang (Lév. 17:14 ; Actes 15:20). Ils supplièrent le médecin de faire son possible pour sauver leur enfant, en lui assurant qu’ils porteraient eux-mêmes la responsabilité de leur refus de transfusions.
Le médecin s’engagea à faire tout ce qu’il pouvait. “J’ai mes propres convictions religieuses, dit-il, et je désire qu’on les respecte. C’est pourquoi je respecterai les vôtres.”
Juste avant d’être transportée à la salle d’opération, la petite blessée dit à son père : “Ne t’inquiète pas, papa.” Cinq heures s’écoulèrent lentement. Pendant cette attente angoissante, au grand étonnement des membres de la famille et des amis venus tenir compagnie aux parents, ceux-ci leur expliquèrent calmement que si leur fillette venait à mourir, ils avaient néanmoins la certitude de la revoir lors de la résurrection promise par Dieu. La scène était inoubliable.
La confiance des parents fit une impression profonde non seulement sur le médecin, mais sur beaucoup de ceux qui s’étaient réunis pour attendre le résultat de l’opération. “Je suis père, moi aussi, déclara un ami, mais vous êtes beaucoup plus calme que je ne le serais en pareille circonstance.”
Un autre homme déclara : “Si j’avais la même foi que ces gens, je serais l’homme le plus heureux du monde.”
Une voisine qui avait perdu son mari vint pour réconforter les parents. En repartant, elle leur dit : “Depuis la mort de mon mari, il y a deux ans, je suis déprimée. Devant votre foi en Dieu et votre espérance, je me sens heureuse pour la première fois.”
Après l’opération
Le chirurgien vint finalement donner son compte rendu de l’opération. L’enfant n’avait aucune fracture, mais elle avait subi de graves lésions internes. Elle avait perdu la moitié de son sang du fait que la principale artère du diaphragme avait été coupée. Toutefois, quand l’opération commença, l’hémorragie s’était déjà arrêtée grâce à la coagulation du sang. Le chirurgien ne comprenait pas comment la fillette n’avait pas succombé à cette rupture artérielle à une dizaine de centimètres seulement du cœur.
Le foie de l’enfant était déchiré et l’énorme poids du camion avait enfoncé l’estomac dans le diaphragme, provoquant ainsi deux hernies de ce muscle. Celui-ci, en s’affaissant, avait déchiré le poumon gauche et en même temps le péricarde. Autrement dit, l’accident avait failli provoquer la rupture du cœur, ce qui aurait été mortel pour la victime.
Le chirurgien se déclara satisfait de l’opération. Il apprécia beaucoup l’attitude calme des parents qui ne s’étaient pas laissé aller à des cris ou à des pleurs susceptibles de le crisper. Il put donc entreprendre l’intervention l’esprit détendu.
Cependant, tout danger n’était pas écarté, car la perte de sang ou une infection pouvait être mortelle. Au cours de la longue opération, le chirurgien dut examiner l’intestin, centimètre par centimètre, pour s’assurer qu’il n’y avait aucune déchirure. Il devait également soumettre tous les organes à un examen minutieux afin d’y déceler d’éventuelles lésions. On pouvait encore voir les effets de l’énorme pression exercée par le poids du camion sur le corps de la victime : de petits vaisseaux sanguins avaient éclaté sur le côté du cou et dans l’œil.
Le lendemain matin, Mimi (tel est le surnom de la fillette) était éveillée et avait l’esprit tout à fait lucide. Aussi étonnant que cela paraisse, elle ne se plaignait d’aucune douleur. La période postopératoire critique de quarante-huit heures passa sans qu’il y eût aucun signe d’infection. Tout le personnel de la clinique s’étonna de voir que l’enfant avait survécu à l’opération sans transfusions sanguines, et que cinq jours plus tard elle revenait rapidement à l’état normal.
Une semaine après l’accident, Mimi put sortir de la clinique et elle continua de faire de bons progrès. C’est alors que se manifesta une complication très grave : un liquide était en train de se former autour du cœur, probablement en raison de la déchirure du péricarde. Tout le monde connut de nouveau des moments angoissants. En effet, si le liquide ne se dispersait pas de façon naturelle, l’enfant serait probablement obligée de subir une autre opération grave, cette fois-ci au cœur.
Le lendemain, un cardiologue examina Mimi. Ni lui ni son médecin traitant ne purent cacher leur étonnement. Pendant la nuit, le liquide s’était dispersé et tous les organes fonctionnaient normalement.
Cinq semaines et demie après l’accident, Mimi retourna à l’école et jouait de nouveau avec ses camarades de classe. Toutes les lésions internes étaient guéries et on ne décelait aucun effet évident de sa terrible aventure.
Des souvenirs heureux
Comment un accident aussi grave pouvait-il laisser des souvenirs heureux ? Le père de Mimi déclara par la suite : “J’étais étonné de mes propres réactions. Je ne savais pas que j’étais capable de supporter une nouvelle aussi tragique sans m’effondrer. Cependant, j’ai eu tout de suite conscience de l’aide de Jéhovah, qui connaît nos besoins. Le simple fait de savoir que Dieu, dans sa bonté, dirige toutes choses, me donna un courage que je n’avais jamais connu auparavant, et j’ai pu rester calme même devant la possibilité de perdre ma fille. J’avais souvent lu que Jéhovah fortifie ses enfants dans l’épreuve. Aujourd’hui, je sais que cela est vrai.”
De son côté, la mère de la fillette déclara : “Quand j’ai vu mon enfant blessée, j’ai été transie d’horreur. Cependant, un instant plus tard, je me suis sentie envahie par une chaleur bienfaisante en me souvenant que nous dépendons de Jéhovah pour tout. Incontestablement, son esprit donne de la force et du courage.”
Ce fut l’opération la plus grave jamais pratiquée dans cette clinique, et le chirurgien l’avait réussie sans utiliser de sang. Il déclara : “Cette intervention m’a appris quelque chose.” Qu’avait-il donc appris ?
Peu de temps après, un étudiant dut subir une appendicectomie. Lorsque quelqu’un suggéra qu’une transfusion sanguine était indiquée, ce même chirurgien refusa d’y recourir, en disant : “Depuis janvier dernier, je me rends compte qu’il est préférable de ne pas recourir aux transfusions sanguines.” L’étudiant ne tarda pas à se remettre de l’intervention et à reprendre ses études.
Le cas de Mimi fit une profonde impression sur le surveillant de la congrégation locale des témoins de Jéhovah, un Nord-Américain. “J’ai été frappé, dit-il, par la façon de procéder ici dans pareil cas. Elle est bien différente de ce qui arrive souvent aux États-Unis et dans d’autres pays. Je n’ai vu dans les journaux aucune manchette à sensation telle que ‘LES CROYANCES D’UNE SECTE RISQUENT DE COÛTER LA VIE À UN ENFANT’. Au contraire, une émission radiophonique parlait de la foi et du calme de cette famille éprouvée. Au lieu de priver les parents de leur droit de décider du genre de soins à donner à leur enfant, et cela au moyen d’une injonction de tribunal, le chirurgien respecta leurs convictions religieuses et leur prise de position.”
Un éminent médecin déclara : “Sachez que, dans les milieux médicaux, on considère ce cas comme un véritable miracle.” De plus, il a permis de répandre des dizaines de brochures expliquant la loi de Dieu concernant le sang. Bon nombre d’entre elles ont été remises à des médecins désireux d’avoir de plus amples renseignements sur cette question importante.
Enfin, Mimi elle-même dit : “Je remercie Jéhovah de m’avoir aidée, car si j’avais succombé, beaucoup de gens auraient pensé que c’était parce que je n’avais pas reçu de sang. Maintenant, beaucoup ont eu l’occasion de constater qu’il vaut toujours mieux obéir à la loi de Dieu, même dans une situation critique.”