L’idée de Dieu se développe-t-elle graduellement ?
SELON l’un des théologiens les plus en vue de l’Amérique, Harry Emerson Fosdick, la Bible montre un développement graduel de l’idée que l’homme se fait de Dieu. Dans un article publié dans le New Outlook de mai 1953 il a dit entre autres choses :
“ Le problème le plus important dans l’apologétique chrétienne... consiste à formuler un concept de Dieu qui, pour être intelligible, raisonnable et conforme aux besoins de l’homme, ne donne lieu qu’à un minimum d’argumentation, un concept qui, pour ces raisons, s’impose de lui-même. Le problème n’est pas nouveau, au contraire, il est aussi ancien que l’homme primitif, il remonte au temps où l’homme apprit à penser. La question — déterminée par les connaissances acquises — s’est toujours posée : Quelle idée devons-nous nous faire de Dieu ?
“ La Bible elle-même constitue une excellente illustration. Quel contraste entre les idées de Dieu à ses débuts primitifs et à sa fin ! Depuis le premier cri de bataille : “ Yahvé est un guerrier ; son nom est Yahvé ”, jusqu’à la béatitude de Jésus : “ Heureux les artisans de paix : ils seront appelés fils de Dieu ” — quel approfondissement du concept de la nature divine ! Quelle expansion de l’idée que l’homme se fait de Dieu !
“ Les écrivains des Écritures ont cheminé sur une route ascendante leur révélant des vues sans cesse plus étendues, et parce qu’un Dieu de cet univers ne peut qu’être infini, ce processus ne peut jamais s’arrêter ; il requiert aujourd’hui notre attention critique. ”
M. Fosdick veut donc nous faire croire que l’homme s’est graduellement élevé de l’idée selon laquelle Yahvé ou Jéhovah était un guerrier à celle d’un Dieu bénissant les pacificateurs, et que la Bible, loin d’être la révélation que Dieu a donnée à l’homme, n’est que le récit des efforts de l’homme tendant à se faire une idée appropriée de Dieu (Ex. 15:3, Jé ; Mat. 5:9, Jé). Ces raisonnements de M. Fosdick n’ont certainement rien à faire avec une apologétique chrétienne, car Jésus-Christ n’a jamais enseigné de telles choses, lui qui a dit : “ Ta parole est la vérité. ” — Jean 17:17.
Un examen humble et honnête de la Bible montrera que les commentaires de M. Fosdick ne s’accordent pas avec les déclarations de la Parole de Jéhovah. Celle-ci montre que tandis que les exigences auxquelles les créatures de Jéhovah doivent satisfaire diffèrent suivant ses desseins et l’époque à laquelle elles vivent, ses quatre attributs fondamentaux — la justice, la puissance, la sagesse et l’amour — restent toujours les mêmes. Ne lisons-nous pas dans le premier livre de la Bible comment Abraham en appelle à la justice de Dieu ? “ Est-ce que le juge de toute la terre ne rendra pas justice ? ” Et le fondateur du christianisme et ses apôtres n’ont-ils pas souligné le fait que Jéhovah est un Dieu équitable et juste ? — Gen. 18:25, Jé ; Luc 18:7 ; Rom. 9:14.
Et le messager angélique envoyé chez Abraham ne révéla-t-il pas Jéhovah comme le Tout-Puissant en posant cette question : “ Y a-t-il rien de trop merveilleux pour Yahvé ? ” Jésus-Christ a prononcé un concept identique en disant : “ Pour Dieu tout est possible. ” (Gen. 18:14, Jé ; Mat. 19:26, Jé). Par conséquent, on ne constate, au cours d’une période de deux mille ans, aucun changement du concept de Dieu par rapport à sa justice et à sa puissance.
De plus, le récit de la Genèse concernant la création ne témoigne-t-il pas de la sagesse de Jéhovah, et Moïse n’a-t-il pas déclaré à plusieurs reprises que Dieu est la source de la sagesse et qu’il l’a impartie à ses serviteurs ? (Genèse, chap. 1 et 2 ; Ex. 28:3 ; 36:1, 2). Et le Christ et ses premiers disciples n’ont-ils pas attesté le même fait ? — Luc 11:49 ; Rom 11:33 ; Jacq. 1:5.
Et par rapport au fait que Jéhovah est un Dieu d’amour, de miséricorde et de paix, nous ne trouvons pas de différence non plus entre le Dieu de Moïse et celui de Jésus-Christ. Notons de quelle façon Jéhovah s’est révélé quand Moïse lui a demandé de voir sa gloire : “ Jéhovah ! Jéhovah ! Dieu miséricordieux et compatissant, lent à la colère, riche en bonté et en fidélité, qui conserve sa grâce jusqu’à mille générations (qui garde sa faveur à des milliers, Jé), qui pardonne l’iniquité, la révolte et le péché. ” — Ex. 34:6, 7, Cr 1905.
Mais quelqu’un objectera peut-être : Que dites-vous du reste de cette citation : “ mais il ne les laisse pas impunis, visitant l’iniquité des pères sur les enfants et sur les enfants des enfants jusqu’à la troisième et à la quatrième génération ! ” ? Ces paroles semblent contredire celles qui les précèdent, mais un peu de réflexion nous les rendra intelligibles. N’est-il pas vrai que lorsqu’un peuple tel qu’Israël se détournait de l’adoration de Jéhovah pour pratiquer une religion païenne, Dieu les laissait aller en captivité et que les conséquences en étaient ressenties non seulement par eux-mêmes mais aussi par leurs descendants jusqu’à la troisième et à la quatrième génération ? Ne s’agit-il pas simplement d’une loi inexorable selon laquelle les parents, de par leur manière d’agir, font venir, par la force des choses, le bien ou le mal sur leurs enfants ? N’est-ce pas simplement récolter ce qu’on a semé ?
Sous ce rapport l’enseignement de Jésus-Christ est exactement le même que celui de Moïse, fait que les ecclésiastiques modernistes aiment à ignorer. Notons l’avertissement qu’il adressa aux chefs religieux de son temps : “ Ainsi, de votre propre aveu, vous êtes les fils de ceux qui ont assassiné les prophètes ! Eh bien ! vous, comblez donc la mesure de vos pères ! Serpents, engeance de vipères ! comment pourrez-vous éviter d’être condamnés à l’enfer (à la géhenne, Cr) ? Voici donc que j’envoie vers vous des prophètes, des sages et des scribes (des instructeurs publics, NW) : vous en tuerez certains et les mettrez (en poteau, NW), vous en flagellerez d’autres dans vos synagogues et les pourchasserez de ville en ville. Et ainsi retombera sur vous tout le sang des justes répandu sur la terre, depuis le sang d’Abel le juste jusqu’au sang de Zacharie, fils de Barachie, que vous avez assassiné entre le sanctuaire et l’autel ! En vérité, je vous le dis, tout cela va retomber sur la présente génération ! ” (Mat. 23:31-36, Jé). Ces paroles se réalisèrent par la destruction complète de Jérusalem en l’an 70. Cette destruction était justifiée et conforme au fait que Jéhovah est un Dieu de guerre.
Oui, la Bible est la révélation divine et pas simplement un recueil des idées que l’homme se fait de Dieu. De sa première à sa dernière page elle révèle Jéhovah comme un Dieu d’amour, de sagesse, de justice et de puissance. Jéhovah se montre d’abord comme un Dieu d’amour qui dispense ses bénédictions à ses créatures. Mais quand celles-ci ne veulent pas des dons de Dieu, se rebellent et pratiquent l’iniquité, il n’a d’autre choix que d’agir en Dieu de guerre. Les Écritures hébraïques se taisent-elles sur les qualités d’amour, de tendresse et de miséricorde de Jéhovah ? “ Jéhovah m’est apparu de loin. Je t’ai aimée d’un amour éternel, c’est pourquoi j’ai prolongé pour toi la miséricorde. ” (Jér. 31:3, Cr 1905). Les Écritures chrétiennes grecques ne disent-elles rien de la justice et de la juste indignation de Jéhovah ? “ À moi la vengeance, à moi la rétribution, dit Jéhovah. ” “ Car notre Dieu est aussi un feu dévorant. ” (Rom. 12:19, NW ; Héb. 12:29). Par conséquent, ce n’est pas se faire une idée primitive de Dieu que de croire en Jéhovah.