La société occidentale est-elle une société chrétienne ?
ROBERT E. L. STRIDER, directeur du Collège Colby dans le Maine, envisagea cette question pénétrante dans le discours qu’il prononça, en juin dernier, à la remise des diplômes. On comprendra sa conclusion, que “ notre société n’est pas une société chrétienne ”, si l’on considère la conduite peu chrétienne de ceux qui composent le monde occidental. La foi solide en Dieu est rare, et rares sont ceux qui suivent les traces de Jésus.
Le pasteur danois, Per Dolmer, admit que la grande majorité des habitants de son pays appartenaient à l’Église d’État mais, de son propre aveu, cela ne voulait pas dire qu’ils fussent chrétiens. Il dit : “ Cependant, pour l’amour de la vérité, il convient d’ajouter que, si 97 pour cent des gens appartiennent à l’Église d’État, la plus grande partie d’entre eux vivent loin de la foi en Dieu, sont entièrement et absolument indifférents à Son égard, ne pensent jamais à Lui, vivent contrairement à la volonté révélée de Dieu et, pour ce qui concerne la majorité d’entre eux, ils meurent dans cette indifférence et cette mécréance. ”
Dans le même ordre d’idées, la conversation que Sydney J. Harris, écrivain ayant “ sa colonne ” dans un journal, eut avec un Hindou et qu’il rapporta, offre un grand intérêt. Dans la Free Press de Détroit, du 21 septembre 1961, Harris raconta, en substance, l’entretien : “ Depuis que je voyage dans le monde chrétien de l’Ouest ”, dit l’Hindou au dîner, “ mes lectures dans le Nouveau Testament me déconcertent. Comment interprétez-vous les paroles de Jésus ?
— Que voulez-vous dire ? demandai-je, effrayé de ce qui allait suivre.
— Voici ce que je veux dire, répondit-il poliment : Comment conciliez-vous Sa pure doctrine sur l’obéissance passive avec vos canons, vos avions et les guerres que vous livrez toutes les quelques décades ? Quelle nation chrétienne a tendu l’autre joue ? Qui d’entre vous est prêt à rendre le bien pour le mal ? Comment les gens qui partagent la bonne nouvelle de Son message peuvent-ils s’entre-tuer continuellement, tandis que des deux côtés on Le prie ?
— Eh bien ! bafouillai-je, après tout, c’est une doctrine parfaite que Jésus a prêchée. Il est impossible au commun des mortels de vivre conformément à elle.
— Je le comprends, dit-il en inclinant la tête de haut en bas, mais cela devrait être votre but et je constate seulement que vous faites le contraire (...).
— La masse des Indiens n’est sans doute pas meilleure, moralement et spirituellement, que les Occidentaux, ne croyez-vous pas ?
— Peut-être, convint-il. Tout de même, nous ne prétendons par avoir reçu du Fils de Dieu une révélation particulière. Nous ne prétendons pas imiter le Prince de la paix pour suivre ensuite le Prince de la guerre.
— Tous ne partagent pas l’opinion que Jésus était un pacifiste, objectai-je. Certaines personnes soulignent le fait qu’il fouetta les changeurs en les chassant du temple.
— Ah ! mais il y a une différence entre fouetter, comme on fouetterait par amour un enfant désobéissant, et tuer gratuitement des millions d’innocents, hommes, femmes et enfants, et tous au nom de Dieu. Il vous est ordonné d’aimer votre prochain et, aujourd’hui, dans ce monde tout petit, votre prochain, ce sont tous vos semblables.
— Il me reste une défense à présenter, mon argument massue, si vous me permettez l’expression. N’avons-nous pas le droit, l’obligation de combattre l’injustice, la méchanceté et la tyrannie ? demandai-je.
— Si, dit-il, vous devez le faire, mais dans votre esprit et votre âme, car c’est là qu’elle prend naissance, et non pas dans quelque pays étranger. Quand vous serez purifiés, l’exemple de votre bonté sera l’arme du monde la plus efficace, si ce n’est dans le présent alors dans l’avenir. ”
Harris conclut par cet aveu : “ Peut-être pourrez-vous répondre à l’Hindou. En toute honnêteté, j’en fus incapable. ” Peu importe la façon dont on envisage les arguments de l’Hindou, il est évident que les nations occidentales sont, en réalité, incapables de se défendre devant le reproche qu’on leur fait de n’avoir pas suivi l’exemple donné par le Christ. Dans le vrai sens du mot, elles ne sont pas chrétiennes !